Contrôle du juge de cassation sur la faute commise par le titulaire du marché pouvant justifier une résiliation du marché à ses torts exclusifs

Catégorie

Contrats publics

Date

April 2014

Temps de lecture

3 minutes

CE 26 février 2014 Société « Environnement services », req. n° 365546, 365551.

La communauté d’agglomération du pays ajaccien (CAPA) a confié le conditionnement des déchets ménagers et assimilés collectés sur son territoire à la société « Environnement Services » par un marché à bons de commande d’une durée de 12 mois notifié le 5 novembre 2007.

Par une délibération du 10 avril 2008, le conseil d’agglomération a décidé de résilier ce contrat aux torts exclusifs de la société « Environnement services » en l’absence d’exécution des prestations dans les délais prévus.

Estimant cette résiliation non fondée, le tribunal administratif de Bastia a condamné, par un jugement du 10 décembre 2009, la CAPA à verser une indemnité à la société « Environnement Services » et a ordonné une expertise afin de déterminer son préjudice commercial. Dans un second jugement du 1er juin 2011, ce même tribunal a fixé le montant de l’indemnisation au titre de ce préjudice et a mis les frais d’expertise à la charge de la CAPA.

Par un arrêt du 26 novembre 2012, la cour administrative d’appel de Marseille a, quant à elle, confirmé le montant de l’indemnisation du 1er jugement et annulé le 2nd jugement du 1er juin 2011 en tant qu’il avait condamné la CAPA à indemniser la société de son préjudice commercial.

La Cour avait constaté une faute de la société « Environnement services » dans l’exécution du marché. Néanmoins, elle avait estimé qu’en raison de l’absence d’émission de bon de commande par la CAPA, de l’irrégularité de la mise en demeure et de l’absence de fixation d’un délai permettant à la société de réaliser les installations dont elle était chargée, cette faute n’était pas d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation du marché aux torts exclusifs de la société « Environnement services ».

La CAPA et la société « Environnement Services » ont donc déposé un pourvoi.

Tout d’abord, le Conseil d’Etat rappelle que « seule une faute d’une gravité suffisante est de nature à justifier, en l’absence de clause prévue à cet effet, la résiliation d’un marché public aux torts exclusifs de son titulaire ».

Ensuite, il se prononce sur l’étendue de son contrôle. En effet, le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la cour en opérant un contrôle de qualification juridique sur l’appréciation par les juges du fond de la faute à l’origine de la résiliation :

« Considérant, d’une part que, pour juger que la résiliation prononcée par la CAPA ne pouvait être prononcée aux torts exclusifs de la société « Environnement Services », la cour administrative d’appel de Marseille a d’abord relevé que la société avait manqué à ses obligations contractuelles faute qu’aient été réalisés, dans les conditions prévues au contrat, les travaux indispensables à la mise en œuvre des prestations de conditionnement et de stockage des déchets ; que, toutefois, elle a ensuite estimé qu’en raison de l’absence d’émission, par la CAPA, d’un bon de commande des prestations du marché, de l’irrégularité de la mise en demeure adressée à la société titulaire du marché ainsi que de la circonstance qu’il n’était pas établi que celle-ci n’aurait pas été en mesure, dans un délai raisonnable et, en tout état de cause, avant l’été 2008, d’assurer les prestations dont elle était chargée, le retard constaté dans l’exécution de ces prestations par la société « Environnement services » ne constituait pas une faute suffisamment grave pour justifier, dans le silence du contrat, la résiliation du marché à ses torts exclusifs ; qu’en jugeant ainsi, alors qu’il ressortait des pièces du dossier soumis au juge du fond que plus de quatre mois après la notification du marché, la société n’était pas en mesure, contrairement à ses engagements et sans que l’émission d’un bon de commande soit nécessaire à ce constat, de réaliser les prestations dont elle était chargée, la cour administrative d’appel de Marseille a, ainsi que le soutient la CAPA dans son pourvoi, entaché son arrêt d’une erreur de qualification juridique ».

Enfin, jugeant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat estime que « n’étant pas en mesure d’exécuter les prestations objet du marché à compter du délai stipulé pour la réalisation des installations indispensables, la société « Environnement Services » a commis une faute de nature à justifier la résiliation à ses torts exclusifs sans qu’y fasse obstacle l’absence de bons de commande, ni l’omission, dans la mise en demeure qui lui a été adressée, d’un délai de réalisation de ces installations ».

Autrement dit, la Haute juridiction considère que le titulaire n’était pas en mesure, quels que soient les cas de figure, d’assurer ses obligations contractuelles principales, ce qui est par essence une des fautes les plus graves. La résiliation aux torts exclusifs de la Société « Environnement services » est donc confirmée.

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