Dépénalisation du stationnement payant. Création d’une nouvelle juridiction administrative

Catégorie

Droit administratif général

Date

January 2015

Temps de lecture

5 minutes

Au Journal officiel du 24 janvier 2015 est parue l’ordonnance n° 2015-45 du 23 janvier 2015 relative à la commission du contentieux du stationnement payant, accompagnée d’un Rapport au Président de la République.

Ainsi que le rappelle ce dernier :

« L’article 63 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles prévoit la dépénalisation et la décentralisation du stationnement payant à compter du 1er janvier 2016. A cette date, l’amende pénale sanctionnant le non-paiement ou l’insuffisance de paiement de la redevance de stationnement sur la voirie publique instituée par l’autorité municipale est remplacée par une redevance de stationnement, appelée « forfait de post-stationnement ». Le montant de ce forfait, déduction faite, le cas échéant, du montant de la redevance de stationnement réglée dès le début du stationnement, sera perçu au profit des collectivités territoriales ou des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et sera destiné à améliorer les transports en commun ou respectueux de l’environnement.
Cet article 63 prévoit en outre que le contentieux du forfait de post-stationnement, désormais dépénalisé, relèvera d’une juridiction administrative spécialisée. A ce titre, le législateur a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions de nature législative définissant les règles constitutives de cette nouvelle juridiction
[…] ».

1 L’institution du forfait de post-stationnement

Actuellement, parallèlement à l’article L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoyant le paiement des permis de stationnement délivrés par le maire sur le fondement de ses pouvoirs de police 1) « Le maire peut, moyennant le paiement de droits fixés par un tarif dûment établi, donner des permis de stationnement ou de dépôt temporaire sur la voie publique et autres lieux publics, sous réserve que cette autorisation n’entraîne aucune gêne pour la circulation et la liberté du commerce »., l’article L. 2333-87 du même code, issu de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, prévoit la possibilité pour la collectivité compétente d’instituer une redevance de stationnement 2) « Sans préjudice de l’application de l’article L. 2512-14, le conseil municipal ou l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte compétents pour l’organisation des transports urbains, lorsqu’il y est autorisé par ses statuts, peut établir sur des voies qu’il détermine une redevance de stationnement, compatible avec les dispositions du plan de déplacements urbains s’il existe. Dans le cas où le domaine public concerné relève d’une autre collectivité, l’avis conforme de cette dernière est requis hors agglomération.
La délibération établit les tarifs applicables à chaque zone de stationnement payant.
Le tarif peut être modulé en fonction de la durée du stationnement. Il peut prévoir également une tranche gratuite pour une durée déterminée. L’acte instituant la redevance peut prévoir une tarification spécifique pour certaines catégories d’usagers et notamment les résidents
».
.

C’est ce mécanisme que réforme l’article 63 de la loi du 27 janvier 2014, en procédant à la modification de différents textes.

L’article 63 de la loi vient d’abord modifier l’article L. 2213-6 du CGCT (pour prévoir que : « Les modalités de la tarification et la gestion matérielle du stationnement des véhicules sur la voie publique sont régies par l’article L. 2333-87 ») et rétablir un 2° (évoquant « Le produit de la redevance de stationnement prévu à l’article L. 2333-87 ») à l’article L. 2331-4 du CGCT (relatif aux recettes non fiscales de la section de fonctionnement du budget de la commune).

Il vient ensuite et surtout réécrire l’article L. 2333-87 (dont la nouvelle rédaction entrera en vigueur le 1er janvier 2016) pour prévoir l’institution d’une redevance de stationnement, comprenant un barème tarifaire de paiement immédiat et un forfait de post-stationnement, toutefois défini dans la limite du montant du premier augmenté des coûts de collecte.

Est par ailleurs prévue la possibilité d’intervention d’un tiers contractant de la collectivité publique, pour notifier l’avis de paiement par apposition sur le véhicule et statuer sur les recours administratifs préalables.

L’article 63 crée en outre une nouvelle section intitulée « Dispositions particulières au stationnement de véhicules sur voirie » dans le code général de la propriété des personnes publiques, dont l’article L. 2125-9 dispose que : « Les règles de paiement des redevances dues pour l’occupation du domaine public dans le cadre d’un stationnement de véhicule sur voirie sont fixées à l’article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales ».

Cet article 63 est issu d’un amendement présenté devant le Sénat (et discuté et adopté le 5 juin 2013), visant à remplacer la pénalisation du stationnement par un service public, l’analyse des débats parlementaires révélant que s’il était initialement envisagé un mécanisme de redevance pour service rendu, celui-ci a été abandonné au profit d’un mécanisme de redevance d’occupation du domaine public 3) Olivier Dussopt, Rapport n° 1216 au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale, 3 juillet 2013 – René Vandierendonck, Rapport n° 859 au nom de la commission des lois du Sénat, 19 septembre 2013..

2 La commission du contentieux du stationnement payant

L’article L. 2333-87, tel que modifié par la loi du 27 janvier 2014, s’intéresse également au contentieux du forfait de post-stationnement.

Il prévoit ainsi d’abord que : « Les recours contentieux visant à contester le bien-fondé de l’avis de paiement du montant du forfait de post-stationnement dû font l’objet d’un recours administratif préalable obligatoire auprès de la commune, de l’établissement public de coopération intercommunale, du syndicat mixte ou du tiers contractant dont relève l’agent assermenté ayant établi ledit avis ».

Le code général de la propriété des personnes publiques est à cet égard modifié par l’article 63 (en ses articles L. 2323-3 et L. 2321-3-1) pour prévoir que l’avis de paiement du forfait de post-stationnement vaut émission du titre de recettes à l’encontre du titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule concerné et que la contestation dudit titre devant une juridiction n’en suspend pas la force exécutoire ou les effets.

Il renvoie ensuite à l’article L. 2331-1 du même code pour attribuer à la juridiction administrative la connaissance des litiges y afférents et ajoute à cet égard que : « Les recours contentieux dirigés contre les avis de paiement du forfait de post-stationnement sont portés devant une juridiction administrative spécialisée ».

Le II de l’article 63 de la loi du 27 janvier 2014 avait sur ce point habilité le gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de douze mois, des dispositions de nature législative destinées à définir les règles constitutives de cette juridiction.

C’est donc l’objet de l’ordonnance du 23 janvier 2015, qui insère au CGCT de nouveaux articles L. 2333-87-1 à L. 2333-87-5, qui devront être précisés par décrets en Conseil d’Etat, et qui instituent une « commission du contentieux du stationnement payant », présidée par un magistrat des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel et composée en outre de magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel en activité ou honoraires et, le cas échéant, de magistrats de l’ordre judiciaire en activité ou honoraires.

Cette commission, qui devra statuer « sur les recours formés contre les décisions individuelles relatives aux forfaits de post-stationnement », verra ses décisions « rendues par le président de la commission ou par un magistrat désigné par lui qui statue seul », avec toutefois la possibilité d’un renvoi en formation collégiale « lorsque la question posée le justifie ».

Par ailleurs, l’article 2 de l’ordonnance prévoit, par renvoi au V de l’article 63 susmentionné, que ses dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2016.

Enfin, pour être complet, il convient de souligner qu’une autre ordonnance devrait intervenir puisque l’article 36 de la récente loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives a prévu que :

« Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi et ayant pour objet de fixer les règles de recouvrement, de gestion et de contestation devant la juridiction administrative spécialisée de la redevance de stationnement, y compris du forfait de post-stationnement, mentionnée à l’article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de l’article 63 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, ainsi que les règles de contestation des actes de poursuite pris par le comptable compétent ».

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1. « Le maire peut, moyennant le paiement de droits fixés par un tarif dûment établi, donner des permis de stationnement ou de dépôt temporaire sur la voie publique et autres lieux publics, sous réserve que cette autorisation n’entraîne aucune gêne pour la circulation et la liberté du commerce ».
2. « Sans préjudice de l’application de l’article L. 2512-14, le conseil municipal ou l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte compétents pour l’organisation des transports urbains, lorsqu’il y est autorisé par ses statuts, peut établir sur des voies qu’il détermine une redevance de stationnement, compatible avec les dispositions du plan de déplacements urbains s’il existe. Dans le cas où le domaine public concerné relève d’une autre collectivité, l’avis conforme de cette dernière est requis hors agglomération.
La délibération établit les tarifs applicables à chaque zone de stationnement payant.
Le tarif peut être modulé en fonction de la durée du stationnement. Il peut prévoir également une tranche gratuite pour une durée déterminée. L’acte instituant la redevance peut prévoir une tarification spécifique pour certaines catégories d’usagers et notamment les résidents
».
3. Olivier Dussopt, Rapport n° 1216 au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale, 3 juillet 2013 – René Vandierendonck, Rapport n° 859 au nom de la commission des lois du Sénat, 19 septembre 2013.

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