Les autorisations ou conventions d’occupation du domaine public peuvent être transférées

Catégorie

Domanialité publique, Droit administratif général

Date

September 2015

Temps de lecture

3 minutes

CE 18 septembre 2015 Chambre de commerce et d’industrie de la Région Guyane, req. n° 387315.

Le Conseil d’Etat renonce à l’incessibilité des autorisations d’occupation domaniale et admet leur transfert avec l’accord écrit du gestionnaire du domaine public.

    1 L’état du droit antérieur

Traditionnellement, la jurisprudence excluait toute possibilité pour la personne gestionnaire du domaine public de permettre au titulaire d’une autorisation (unilatérale ou conventionnelle) d’occupation du domaine public de céder celle-ci, compte tenu du caractère strictement personnel de cette autorisation 1) CE 10 mai 1989 Claude Munoz, req. n° 73146 : Rec. CE p. 675 : « Considérant qu’il n’appartient pas à l’administration de donner au titulaire d’une autorisation d’occupation du domaine public maritime laquelle est, en raison de la nature même du domaine public, strictement personnelle et révocable, l’autorisation de transférer cette autorisation » – CE 6 décembre 1998 Association des bouquinistes des quais de Paris, req. n° 171317 : « Considérant que sauf dispositions législatives contraires, les autorisations d’occupation du domaine public ont un caractère personnel et ne sont pas cessibles »..

Il en allait ainsi même dans l’hypothèse d’une autorisation résultant d’un contrat 2) CE 14 octobre 1988 Hubert X, req. n° 53602, les contrats auxquels sont attachées des autorisations administratives étant par nature incessibles.

Cette jurisprudence n’interdisait cependant pas, dans le cadre d’une convention de délégation de service public emportant également droit d’occupation du domaine public, que le cocontractant se voie accorder le droit (ou la mission) de délivrer à son tour des autorisations d’occupation 3) CAA Marseille 15 mai 2003 Commune de Saint-Laurent-du-Var, req. n° 00MA00118 : « que s’il n’appartient pas à l’administration de donner au titulaire une autorisation d’occupation du domaine public maritime, laquelle est, en raison de la nature même du domaine public, strictement personnelle et révocable, l’autorisation de transférer cette autorisation, cette prohibition ne vise pas les hypothèses où, comme en l’espèce, la délégation de service public a pour accessoire la possibilité pour l’entrepreneur agréé de délivrer des autorisations d’occupation du domaine concédé »..

Et, surtout, la loi pouvait en décider autrement 4) CE 6 décembre 1998, précité., et le législateur a progressivement multiplié les possibilités de cession au travers des autorisations d’occupation du domaine public constitutives de droits réels 5) Bail emphytéotique administratif (article L. 1311-3 du code général des collectivités territoriales), autorisation d’occupation du domaine public constitutive de droits réels (articles L. 1311-6 du même code pour les collectivités territoriales et L. 2122-7 du code général de la propriété des personnes publiques pour l’Etat), bail emphytéotique administratif dit “de valorisation” (article L. 2341-1 du code général de la propriété des personnes publiques)..

    2 Le revirement : l’autorisation écrite de transfert

Dans son arrêt du 18 septembre 2015, le Conseil d’Etat juge expressément « qu’il ne peut y avoir transfert d’une autorisation ou d’une convention d’occupation du domaine public à un nouveau bénéficiaire que si le gestionnaire de ce domaine a donné son accord écrit ».

L’exigence du caractère écrit de l’autorisation de transfert de l’autorisation est à cet égard une conséquence de la récente affirmation de la nécessité du caractère écrit d’une telle autorisation, la simple tolérance de la présence l’occupant par le gestionnaire ne pouvant valoir autorisation 6) CE Sect. 19 juin 2015 Société immobilière du port de Boulogne (SIPB), n°369558 : « Considérant que nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public ; qu’eu égard aux exigences qui découlent tant de l’affectation normale du domaine public que des impératifs de protection et de bonne gestion de ce domaine, l’existence de relations contractuelles en autorisant l’occupation privative ne peut se déduire de sa seule occupation effective, même si celle-ci a été tolérée par l’autorité gestionnaire et a donné lieu au versement de redevances domaniales ; qu’en conséquence, une convention d’occupation du domaine public ne peut être tacite et doit revêtir un caractère écrit »..

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References   [ + ]

1. CE 10 mai 1989 Claude Munoz, req. n° 73146 : Rec. CE p. 675 : « Considérant qu’il n’appartient pas à l’administration de donner au titulaire d’une autorisation d’occupation du domaine public maritime laquelle est, en raison de la nature même du domaine public, strictement personnelle et révocable, l’autorisation de transférer cette autorisation » – CE 6 décembre 1998 Association des bouquinistes des quais de Paris, req. n° 171317 : « Considérant que sauf dispositions législatives contraires, les autorisations d’occupation du domaine public ont un caractère personnel et ne sont pas cessibles ».
2. CE 14 octobre 1988 Hubert X, req. n° 53602
3. CAA Marseille 15 mai 2003 Commune de Saint-Laurent-du-Var, req. n° 00MA00118 : « que s’il n’appartient pas à l’administration de donner au titulaire une autorisation d’occupation du domaine public maritime, laquelle est, en raison de la nature même du domaine public, strictement personnelle et révocable, l’autorisation de transférer cette autorisation, cette prohibition ne vise pas les hypothèses où, comme en l’espèce, la délégation de service public a pour accessoire la possibilité pour l’entrepreneur agréé de délivrer des autorisations d’occupation du domaine concédé ».
4. CE 6 décembre 1998, précité.
5. Bail emphytéotique administratif (article L. 1311-3 du code général des collectivités territoriales), autorisation d’occupation du domaine public constitutive de droits réels (articles L. 1311-6 du même code pour les collectivités territoriales et L. 2122-7 du code général de la propriété des personnes publiques pour l’Etat), bail emphytéotique administratif dit “de valorisation” (article L. 2341-1 du code général de la propriété des personnes publiques).
6. CE Sect. 19 juin 2015 Société immobilière du port de Boulogne (SIPB), n°369558 : « Considérant que nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public ; qu’eu égard aux exigences qui découlent tant de l’affectation normale du domaine public que des impératifs de protection et de bonne gestion de ce domaine, l’existence de relations contractuelles en autorisant l’occupation privative ne peut se déduire de sa seule occupation effective, même si celle-ci a été tolérée par l’autorité gestionnaire et a donné lieu au versement de redevances domaniales ; qu’en conséquence, une convention d’occupation du domaine public ne peut être tacite et doit revêtir un caractère écrit ».

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