Déclenchement du délai de recours contentieux contre la décision de transfert de propriété de voies privées dans le domaine public communal prise sur le fondement de l’article L. 318-3 du code de l’urbanisme

Catégorie

Domanialité publique, Droit administratif général

Date

September 2016

Temps de lecture

3 minutes

CE 13 octobre 2016 Commune de la Colle-sur-Loup, req. n° 381574 : Mentionné aux tables du recueil Lebon La commune de la Colle-sur-Loup avait cherché à incorporer dans son domaine public plusieurs voies privées en application de l’article L. 318-3 du code de l’urbanisme qui permet le transfert d’office, sans indemnités et après enquête publique, de certaines voies privées dans le domaine public communal. Ces voies doivent être situées dans des ensembles d’habitation et être ouvertes à la circulation publique ce qui suppose selon la jurisprudence le consentement, a minima tacite, des propriétaires de renoncer à l’usage purement privé de leur bien 1) Si la jurisprudence admet que l’ouverture de la voie à la circulation publique puisse résulter du consentement tacite des propriétaires (CE 3 juin 2015 Commune de Saint Selve, req. n° 369534), le juge administratif sanctionne systématiquement le transfert effectué en dépit du refus des propriétaires concernés (Voir pour un exemple récent : CE 17 juin 2015 Commune de Noisy-le-Grand, req. n° 373187 : Mentionné aux Tables du Rec. CE).. Sur le plan procédural, la décision de transfert est prise, en application de l’article précité, par délibération du conseil municipal ou par arrêté du représentant de l’Etat dans le département, à la demande de la commune, si un propriétaire intéressé a fait connaître son opposition. C’est la raison pour laquelle en l’espèce, le conseil municipal de la commune de La Colle-sur-Loup avait autorisé, 14 avril 2008, le maire à solliciter du préfet du département le transfert dans le domaine public du chemin privé des Bas Campons et de l’impasse du Roure et par un arrêté du 18 septembre 2008, le préfet des Alpes-Maritimes avait procédé au transfert d’office du chemin des Bas Campons et la procédure de transfert avait été clôturée par une délibération du 17 octobre 2008. Des propriétaires ont alors demandé au tribunal administratif de Nice, le 13 décembre 2010, d’annuler ces décisions. Par un jugement n° 0804017 du 10 avril 2012, le tribunal administratif de Nice a annulé l’arrêté du 18 septembre 2008 du préfet des Alpes-Maritimes et rejeté le surplus de leurs conclusions. Par un arrêt n° 12MA02254 du 22 avril 2014, la cour administrative d’appel de Marseille a, sur appel de la commune de La Colle-sur-Loup, annulé partiellement le jugement (uniquement en ce qu’il annule l’arrêté du préfet des Alpes-Maritimes portant transfert dans le domaine public communal de la partie demeurée privée de l’impasse du Roure) et rejeté le surplus de ses conclusions. Dans la décision commentée, le Conseil d’Etat, saisi par la commune de la Colle-sur-Loup, confirme la décision de la cour administrative d’appel et précise pour la première fois le point de départ du délai de recours contentieux des propriétaires intéressés à l’encontre d’une décision de transfert d’office dans le domaine public des voies leur appartenant. Ainsi, la Haute Juridiction relève qu’une décision de transfert prise sur le fondement de l’article L. 313-8 du code de l’urbanisme ne peut courir, pour les propriétaires intéressés, « qu’à compter de la date à laquelle celle-ci leur a été notifiée, peu important que cette décision ait été par ailleurs publiée ou affichée » et sous réserve que la notification respecte les formalités visées à l’article R. 421-5 du code de justice administrative concernant les voies et délais de recours 2) Art. R. 421-5 CJA : « Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ».. Dès lors, au cas présent, bien que l’arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 18 septembre 2008 ait été publié au recueil des actes administratifs de la préfecture des Alpes-Maritimes et affiché en mairie pendant trois mois, le délai de recours contentieux des propriétaires concernés à l’encontre de cet arrêté n’avait pas commencé à courir en l’absence de notification. En outre, la simple production de la décision de transfert d’office sans indemnité de voies privées dans le domaine public de la commune à l’appui d’un mémoire contentieux n’a pu faire courir le délai de recours, faute de mentionner les voies et délais de recours. En conséquence, les conclusions des propriétaires intéressées enregistrées le 13 décembre 2010 tendant à l’annulation de l’arrêté du 18 septembre 2008 n’étaient pas tardives. Au fond, le Conseil d’Etat précise que le transfert des voies privées dans le domaine public communal est subordonné à l’ouverture de ces voies à la circulation publique laquelle et précise que celle-ci « traduit la volonté de leurs propriétaires d’accepter l’usage public de leur bien et de renoncer à son usage purement privé ». Or, tel n’était pas le cas en l’espèce. En effet, les propriétaires avaient manifesté leur opposition en signant une pétition et avaient obtenu des juridictions judiciaires que les habitants non titulaires d’un droit de passage ne puissent emprunter le chemin avec leurs véhicules, et ce, alors même que cette opposition n’avait été formalisée que par certains propriétaires, n’avait pas été matérialisée par une barrière et que le chemin soit raccordé à plusieurs réseaux de service public et soit desservi par les services postaux. Le Conseil d’Etat confirme donc que le chemin litigieux n’était pas ouvert à la circulation publique et que le préfet des Alpes-Maritimes n’avait pu légalement décider son transfert d’office dans le domaine public de la commune.

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1. Si la jurisprudence admet que l’ouverture de la voie à la circulation publique puisse résulter du consentement tacite des propriétaires (CE 3 juin 2015 Commune de Saint Selve, req. n° 369534), le juge administratif sanctionne systématiquement le transfert effectué en dépit du refus des propriétaires concernés (Voir pour un exemple récent : CE 17 juin 2015 Commune de Noisy-le-Grand, req. n° 373187 : Mentionné aux Tables du Rec. CE).
2. Art. R. 421-5 CJA : « Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ».

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