Affichage publicitaire : Rappel et précisions du régime procédural et contentieux de l’amende administrative prononcée en cas de publicité irrégulière

Catégorie

Environnement, Urbanisme et aménagement

Date

April 2018

Temps de lecture

4 minutes

CAA Nancy 29 mars 2018 Société Vest, req. n° 17NC01119

La société Vest a implanté sur le sol, le long d’une route, une coque de piscine dressée verticalement 1)Un tel dispositif est compris comme étant une publicité au sens de l’article L. 581-3 C. env. : CAA Marseille 21 février 2008, req. n° 06MA01530. et entourée d’une clôture supportant deux panneaux, mentionnant le nom, l’adresse et le numéro de téléphone de la société. Des gardes champêtres ont constaté par procès-verbal l’implantation de ces trois dispositifs publicitaires en infraction avec les dispositions du code de l’environnement relatives à la publicité (RNP).

Se fondant sur ce procès-verbal, le préfet du Haut-Rhin a pris un arrêté en date du 12 décembre 2014 prononçant un total de 9 amendes de 1 500 euros chacune à l’encontre de la société sur le fondement de l’article L. 581-26 du code de l’environnement. Le 13 février suivant, le maire de la commune dans laquelle se trouvaient ces dispositifs, a émis un titre exécutoire pour recouvrer le produit de ces amendes.

La société a demandé l’annulation de l’arrêté préfectoral et du titre exécutoire devant le tribunal administratif de Strasbourg qui a rejeté sa demande. Elle a alors interjeté appel.

La cour administrative d’appel de Nancy est venue rappeler et préciser le régime procédural et contentieux de l’amende administrative prononcée en cas de violation du RNP. Par cette décision, elle a jugé que la recevabilité d’un recours juridictionnel contre un titre exécutoire n’était pas conditionné à une réclamation préalable du redevable (1), qu’il était possible d’exciper de l’illégalité de l’arrêté préfectoral à l’appui d’un recours dirigé contre son titre exécutoire (2), que la déclaration préalable de travaux au titre du code de l’urbanisme ne peut pas constituer une déclaration préalable de dispositifs publicitaires au titre du code de l’environnement (3) et que l’amende ne pouvait être prononcée qu’au titre des violations visées à l’art. L. 581-26 dûment constatées dans le procès-verbal (4).

1 La recevabilité d’un recours juridictionnel contre un titre exécutoire non soumise à une réclamation préalable

En premier lieu, la cour administrative d’appel de Nancy écarte la fin de non-recevoir tirée du défaut de réclamation préalable à l’introduction de la demande contentieuse dirigée contre le titre exécutoire émis par la commune. En effet, l’obligation d’effectuer une réclamation préalable au comptable chargé du recouvrement afin de pouvoir contester les titres exécutoires devant la juridiction 2)Procédure prévue par les articles 117 à 119 du décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012. ne s’applique pas aux collectivités territoriales 3)Comme le prévoit l’article 4 du décret du 7 novembre 2012.

2 La possibilité d’exciper de l’illégalité de l’arrêté préfectoral à l’appui d’un recours dirigé contre son titre exécutoire

La société requérante contestait non seulement le titre exécutoire, mais également l’arrêté préfectoral sur la base duquel ce titre avait été émis. Or, le délai de recours contentieux contre l’arrêté préfectoral était expiré au moment de l’introduction du recours contentieux de sorte que les moyens dirigés contre cet arrêté n’étaient pas recevables. Néanmoins, la cour admet la possibilité d’exciper de l’illégalité de l’arrêté préfectoral à l’appui du recours dirigé contre le titre exécutoire au motif qu’il s’agit d’une opération complexe 4) CE Sect. 30 décembre 2013, Mme O… req. n°367615. Tout d’abord, elle rappelle que l’illégalité d’un acte administratif ne peut être utilement invoquée par voie d’exception à l’appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l’application du premier acte ou s’il en constitue la base légale. Ensuite, elle rappelle que lorsqu’il est question d’un acte non réglementaire, l’exception n’est recevable que si l’acte n’est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf si l’acte et la décision ultérieure constituent les éléments d’une même opération complexe.

Elle considère alors que « la décision individuelle par laquelle le préfet prononce l’amende et l’acte par lequel cette amende est recouvrée forment une opération administrative unique comportant un lien tel qu’un requérant est encore recevable à invoquer par la voie de l’exception les illégalités affectant la décision préfectorale, alors qu’elle aurait acquis un caractère définitif » et que c’est à tort que les premiers juge ont déclaré ce moyen irrecevable.

3 Indépendance des législations : la déclaration préalable de travaux au titre du code de l’urbanisme ne peut valoir déclaration de dispositifs publicitaires au titre du code de l’environnement

Dans un troisième temps, la cour rappelle le principe selon lequel lorsque la commune n’est pas dotée de règlement local de publicité, l’autorité compétente en matière de police de la publicité est le préfet et non le maire. En l’espèce, la commune n’était pas dotée de règlement local de publicité et la déclaration de dispositifs publicitaires en application de l’article L. 581-5 du code de l’environnement, la demande de déclaration de dispositions publicitaires devait donc être effectuée auprès du préfet, et non de la commune.

La cour souligne à cette occasion que le formulaire de déclaration préalable à la réalisation de constructions et de travaux non soumis à permis de construire, déposé en mairie au titre du droit de l’urbanisme, ne saurait constituer la déclaration de dispositions publicitaires prévue par le code de l’environnement 5)Art. L. 581-6 C. env..

4 La possibilité d’infliger une amende limitée aux seules infractions visées à l’article L. 581-26 du code de l’environnement dûment constatées par procès-verbal

Enfin, en quatrième lieu, la cour relève que le préfet ne peut légalement prononcer une amende prévue par l’article L. 581-26 du code de l’environnement qu’à raison d’un manquement constaté et relevé par procès-verbal. Or, en l’espèce, si le procès-verbal d’infraction relevait trois infractions pour chacun des dispositifs publicitaires, seule l’une d’entre elle (absence de déclaration de dispositif publicitaire) ouvrait droit au prononcé d’une amende sur le fondement de l’article L. 581-26 précité, les autres infractions constatées ne pouvant faire l’objet d’une telle sanction (mise ne place d’une publicité au sol dans une agglomération de moins de 10 000 habitants et installation d’une publicité sur une clôture non aveugle).

La cour a donc annulé le titre exécutoire litigieux en tant qu’il mettait à la charge de la société requérante une somme supérieure à 4 500 euros.

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1. Un tel dispositif est compris comme étant une publicité au sens de l’article L. 581-3 C. env. : CAA Marseille 21 février 2008, req. n° 06MA01530.
2. Procédure prévue par les articles 117 à 119 du décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012.
3. Comme le prévoit l’article 4 du décret du 7 novembre 2012
4. CE Sect. 30 décembre 2013, Mme O… req. n°367615
5. Art. L. 581-6 C. env.

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