Pas d’exonération possible fondée sur la qualité du maître d’ouvrage s’agissant de la participation pour raccordement à l’égout

Catégorie

Droit administratif général, Urbanisme et aménagement

Date

June 2018

Temps de lecture

3 minutes

CE 6 juin 2018 SCI Lasserre Promotions et SCI Dolphaf, req. n° 399932

Par un arrêté du 30 avril 2008, le maire de la commune de Saint-Louis-de-Montferrand a accordé à la SCI Lasserre Promotions un permis de construire dans le cadre d’un programme de construction de logements sociaux en vertu duquel cette dernière était soumise au versement de la participation pour le raccordement à l’égout (raccordement au réseau d’assainissement existant).

Le permis de construire a ensuite été transféré à la SCI Dolphaf 1) Cette dernière étant une filiale de la SCI Lasserre Promotions. avant que la communauté urbaine de Bordeaux (CUB) – devenue Bordeaux Métropole – n’émette un titre exécutoire le 9 août 2011 afin de mettre à la charge de cette dernière une somme de 133 896,57 EUR au titre de la participation pour raccordement à l’égout.

C’est ce titre exécutoire que les SCI Dolphaf et Lasserre Promotions ont soumis à la censure du juge administratif.

1          Par un jugement en date du 26 mars 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé partiellement le titre exécutoire en déchargeant la SCI Dolphaf de l’obligation de payer la somme de 6 531,54 EUR et rejeté le surplus de ses demandes.

Par un arrêt du 24 mars 2016, la cour administrative d’appel de Bordeaux a confirmé le jugement en rejetant l’appel formé par les SCI Dolphaf et la SCI Lasserre Promotion.

Les deux sociétés se sont pourvues en cassation contre cet arrêt, car elles estimaient notamment que l’exonération de 25 % prévue par la CUB s’agissant des organismes d’HLM ou des sociétés d’économie mixte communautaires, départementales ou communes serait constitutive d’une rupture d’égalité.

Cet abattement de 25 % sur la valeur du taux de participation à l’égout avait été instauré pour les « opérations d’habitat à caractère social et strictement locatifs réalisés par les organismes d’HLM ou sociétés d’économie mixte communautaires, départementales ou communes ».

2          Après avoir rappelé les dispositions de l’article L. 1331-7 du code de la santé publique 2) « 2. Aux termes de l’article L. 1331-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : « Les propriétaires des immeubles édifiés postérieurement à la mise en service du réseau public de collecte auquel ces immeubles doivent être raccordés peuvent être astreints par la commune, pour tenir compte de l’économie par eux réalisée en évitant une installation d’évacuation ou d’épuration individuelle réglementaire, à verser une participation s’élevant au maximum à 80 % du coût de fourniture et de pose d’une telle installation. / Une délibération du conseil municipal détermine les conditions de perception de cette participation », le Conseil d’Etat juge :

« 3. Ces dispositions font de la participation pour raccordement à l’égout une redevance justifiée par l’économie réalisée par le propriétaire grâce au raccordement de son immeuble au réseau d’assainissement existant. Elles ne font pas obstacle à ce que la participation exigée soit établie selon une méthode forfaitaire, dès lors qu’il n’est pas demandé au propriétaire de verser plus de 80 % du coût de la fourniture et de la pose de l’installation du dispositif individuel d’assainissement qui aurait été nécessaire en l’absence de raccordement. En revanche, elles ne sauraient être regardées comme autorisant l’instauration d’exonérations en fonction de la qualité du maître de l’ouvrage, celle-ci étant sans incidence sur la capacité du système d’évacuation et sur l’économie réalisée en ne l’installant pas ».

Autrement dit, la seule qualité du maître d’ouvrage réalisant une opération portant sur la construction de logements sociaux ne peut légalement justifier l’exonération, d’autant que cette exonération est dépourvue de tout lien avec « la capacité du système d’évacuation » et avec « l’économie réalisée en ne l’installant pas ».

La Haute Juridiction en infère dès lors que la CUB ne pouvait pas prévoir un abattement de 25 % au seul bénéfice des organismes d’HLM et des sociétés d’économie mixte communautaires, départementales ou communes :

« Il en résulte que la communauté urbaine de Bordeaux ne pouvait légalement, par sa délibération n° 2006/0575 du 21 juillet 2006, prévoir qu'” un abattement de 25 % est appliqué sur la valeur des taux en zones AU, A et N, en ce qui concerne les opérations d’habitat à caractère social et strictement locatifs réalisés par les organismes d’HLM ou sociétés d’économie mixte communautaires, départementales ou communales ” et qu’elle était donc en situation de compétence liée pour refuser d’étendre le bénéfice de cet abattement à des SCI comme les sociétés requérantes. Les moyens que ces dernières soulevaient en appel, qui étaient tirés de ce que la délibération précitée était contraire au principe d’égalité et à l’article 63 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne relatif à la libre circulation des capitaux étaient, dès lors, inopérants. Ce motif de pur droit doit être substitué aux motifs retenus par l’arrêt attaqué. Par ailleurs, l’argumentation tirée de ce que la délibération en cause serait contraire aux articles 107 et 108 du même traité est nouvelle en cassation et, n’étant pas d’ordre public, est inopérante ».

Par une substitution de motifs, le Conseil d’Etat confirme l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux et rejette, en conséquence, les demandes de la SCI Dolphaf et de la SCI Lasserre.

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References   [ + ]

1. Cette dernière étant une filiale de la SCI Lasserre Promotions.
2. « 2. Aux termes de l’article L. 1331-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : « Les propriétaires des immeubles édifiés postérieurement à la mise en service du réseau public de collecte auquel ces immeubles doivent être raccordés peuvent être astreints par la commune, pour tenir compte de l’économie par eux réalisée en évitant une installation d’évacuation ou d’épuration individuelle réglementaire, à verser une participation s’élevant au maximum à 80 % du coût de fourniture et de pose d’une telle installation. / Une délibération du conseil municipal détermine les conditions de perception de cette participation »

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