Expropriation d’un bien soumis au droit de préemption et date de référence : la date de la dernière modification du PLU ne peut être prise en compte si elle a seulement pour objet de modifier le périmètre de la zone sans en affecter les caractéristiques

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

June 2019

Temps de lecture

4 minutes

Cass. Civ. 3ème 13 juin 2019 M. X, req. n° 18-18445

La décision commentée permet, une nouvelle fois, à la troisième chambre de la Cour de cassation de préciser la date de référence qu’il convient de prendre en compte en matière de fixation du prix d’un bien exproprié soumis au droit de préemption.

Rappelons que, lorsqu’un bien est soumis au droit de préemption, la date de référence prévue par l’article L. 322-2 du code de l’expropriation est, sauf dans l’hypothèse où le bien est inclus dans le périmètre d’une ZAD, celle « à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d’occupation des sols, ou approuvant, révisant ou modifiant le plan local d’urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien » 1)Art. L. 213-6 renvoyant à l’article L. 213-4 C. urb. : « A défaut d’accord amiable, le prix d’acquisition est fixé par la juridiction compétente en matière d’expropriation ; ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment de l’indemnité de réemploi.

Lorsqu’il est fait application de l’article L. 213-2-1, le prix d’acquisition fixé par la juridiction compétente en matière d’expropriation tient compte de l’éventuelle dépréciation subie, du fait de la préemption partielle, par la fraction restante de l’unité foncière.

Le prix est fixé, payé ou, le cas échéant, consigné selon les règles applicables en matière d’expropriation. Toutefois, dans ce cas :

a) La date de référence prévue à l’article L. 322-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est :

– pour les biens compris dans le périmètre d’une zone d’aménagement différé :

i) la date de publication de l’acte délimitant le périmètre provisoire de la zone d’aménagement différé lorsque le bien est situé dans un tel périmètre ou lorsque l’acte créant la zone est publié dans le délai de validité d’un périmètre provisoire ;

ii) la date de publication de l’acte créant la zone d’aménagement différé si un périmètre provisoire de zone d’aménagement différé n’a pas été délimité ;

iii) dans tous les cas, la date du dernier renouvellement de l’acte créant la zone d’aménagement différé ;

-pour les biens non compris dans une telle zone, la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d’occupation des sols, ou approuvant, révisant ou modifiant le plan local d’urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ;

b) Les améliorations, les transformations ou les changements d’affectation opérés par le propriétaire postérieurement à la date mentionnée au a) ci-dessus ne sont pas présumés revêtir un caractère spéculatif ;

c) A défaut de transactions amiables constituant des références suffisantes pour l’évaluation du bien dans la même zone, il pourra être tenu compte des mutations et accords amiables intervenus pour des biens de même qualification situés dans des zones comparables.

Lorsque la juridiction compétente en matière d’expropriation est appelée à fixer le prix d’un bien dont l’aliénation est envisagée sous forme de vente avec constitution de rente viagère, elle respecte les conditions de paiement proposées par le vendeur mais peut réviser le montant de cette rente et du capital éventuel. ».

En l’espèce, M. X, propriétaire d’un terrain nu soumis au droit de préemption, s’est fait exproprier pour cause d’utilité publique par la Société d’équipement de la région montpelliéraine (SERM). Faute d’accord amiable sur le prix, la SERM a saisi le juge judiciaire en vue de la fixation de l’indemnité correspondante.

La cour d’appel de Montpellier a, par un arrêt rendu le 6 avril 2018, retenu pour date de référence celle de la publication de la délibération approuvant le plan local d’urbanisme et non celle – plus tardive – de la délibération approuvant sa modification simplifiée, laquelle avait eu pour objet de modifier le périmètre de la zone dans laquelle était situé le bien.

La Cour de cassation a alors été saisie d’un pourvoi pour déterminer s’il convenait de retenir comme date de référence :

  • le 13 septembre 2012 correspondant à la date de publication de la délibération par laquelle conseil municipal a approuvé la révision de son plan d’occupation des sols valant plan local d’urbanisme ; ou
  • le 18 octobre 2016 correspondant à la date de publication de la délibération par laquelle le conseil municipal a approuvé la modification simplifiée du plan local d’urbanisme ayant pour objet de modifier les limites de la zone dans laquelle se situe le bien.

La troisième Chambre de la Cour de cassation confirme la solution de la cour d’appel de Montpellier en retenant que « si la modification du plan local d’urbanisme intervenue le 28 septembre 2016 avait modifié le périmètre de la zone dans laquelle était située la parcelle expropriée, elle n’avait pas affecté les caractéristiques de cette zone, [et que] la cour d’appel en a déduit à bon droit que cet acte modificatif ne pouvait pas être retenu pour fixer la date de référence au sens de l’article L. 213-4, a, du code de l’urbanisme ».

Cette solution s’inscrit dans le prolongement de ses décisions précédentes quant à la nature de la modification du document d’urbanisme à prendre en compte pour  déterminer la date de référence pour la fixation de l’indemnisation d’expropriation.

Elle avait en effet déjà considéré que la date de l’opposabilité aux tiers d’une modification du plan d’occupation des sols ne constitue pas la date de référence lorsque les changements apportés n’affectent pas les caractéristiques de la zone dans laquelle sont situés les biens expropriés 2)Cass. Civ. 3 28 janvier 2009 Mmes X, req. n° 08-10333 : Bulletin 2009, III, n° 26.. Tel est le cas, par exemple, de la modification tendant, dans une zone, en la suppression d’un emplacement réservé, la réduction de l’emprise de trois autres, l’extension à 72% de l’emprise au sol des constructions, la circonstance que les limites de la zone restent inchangées étant sans incidence 3)Cass. Civ. 3 17 septembre 2014 GFA Domaine Saint-Joseph, req. n° 13-20076 : Bulletin 2014, III, n° 109..

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1. Art. L. 213-6 renvoyant à l’article L. 213-4 C. urb. : « A défaut d’accord amiable, le prix d’acquisition est fixé par la juridiction compétente en matière d’expropriation ; ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment de l’indemnité de réemploi.

Lorsqu’il est fait application de l’article L. 213-2-1, le prix d’acquisition fixé par la juridiction compétente en matière d’expropriation tient compte de l’éventuelle dépréciation subie, du fait de la préemption partielle, par la fraction restante de l’unité foncière.

Le prix est fixé, payé ou, le cas échéant, consigné selon les règles applicables en matière d’expropriation. Toutefois, dans ce cas :

a) La date de référence prévue à l’article L. 322-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est :

– pour les biens compris dans le périmètre d’une zone d’aménagement différé :

i) la date de publication de l’acte délimitant le périmètre provisoire de la zone d’aménagement différé lorsque le bien est situé dans un tel périmètre ou lorsque l’acte créant la zone est publié dans le délai de validité d’un périmètre provisoire ;

ii) la date de publication de l’acte créant la zone d’aménagement différé si un périmètre provisoire de zone d’aménagement différé n’a pas été délimité ;

iii) dans tous les cas, la date du dernier renouvellement de l’acte créant la zone d’aménagement différé ;

-pour les biens non compris dans une telle zone, la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d’occupation des sols, ou approuvant, révisant ou modifiant le plan local d’urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ;

b) Les améliorations, les transformations ou les changements d’affectation opérés par le propriétaire postérieurement à la date mentionnée au a) ci-dessus ne sont pas présumés revêtir un caractère spéculatif ;

c) A défaut de transactions amiables constituant des références suffisantes pour l’évaluation du bien dans la même zone, il pourra être tenu compte des mutations et accords amiables intervenus pour des biens de même qualification situés dans des zones comparables.

Lorsque la juridiction compétente en matière d’expropriation est appelée à fixer le prix d’un bien dont l’aliénation est envisagée sous forme de vente avec constitution de rente viagère, elle respecte les conditions de paiement proposées par le vendeur mais peut réviser le montant de cette rente et du capital éventuel. »

2. Cass. Civ. 3 28 janvier 2009 Mmes X, req. n° 08-10333 : Bulletin 2009, III, n° 26.
3. Cass. Civ. 3 17 septembre 2014 GFA Domaine Saint-Joseph, req. n° 13-20076 : Bulletin 2014, III, n° 109.

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