Des précisions sur les modalités d’application de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 et du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatifs aux marchés publics

Catégorie

Contrats publics

Date

July 2016

Temps de lecture

4 minutes

Question écrite Sénat n° 21405 du 16 juin 2016
Question écrite Sénat n° 21409 du 16 juin 2016
Question écrite Sénat n° 21408 du 16 juin 2016
Question écrite Sénat n° 21406 du 16 juin 2016
Question écrite Sénat n° 20218 du 16 juin 2016

Cinq réponses ministérielles ont apporté plusieurs précisions sur les modalités d’application de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 (l’ordonnance) et du décret 2016-360 du 25 mars 2016 (le décret) relatifs aux marchés publics.

1 La signature des candidatures et des offres n’est plus requise, celle du marché l’est toujours

Le code des marchés publics (CMP) prévoyait auparavant que l’acte d’engagement par lequel le candidat présentait son offre ou sa proposition devait être signé par ce dernier 1) L’article 48 du CMP prévoyait en effet que : « les offres sont présentées sous la forme de l’acte d’engagement défini à l’article 11 ». Et l’article 11 du même code disposait que « L’acte d’engagement est la pièce signée par un candidat à un accord-cadre ou à un marché public dans laquelle le candidat présente son offre ou sa proposition dans le respect des clauses du cahier des charges qui déterminent les conditions dans lesquelles le marché est exécuté. Cet acte d’engagement est ensuite signé par le pouvoir adjudicateur ». .

Le CMP disposait en outre que les candidatures et les offres transmises par voie électronique dans le cadre d’un marché ou un accord cadre passé selon une procédure formalisée devaient être signée électroniquement 2) Article 44 CMP pour les candidatures et 48 pour les offres. .

Désormais, les nouveaux textes marchés publics ne font plus référence à la signature des candidatures et des offres pour l’ensemble des procédures de passation.

Toutefois, si les candidatures et les offres n’ont plus à être signés, le marché « en tant que contrat formalisant l’engagement des parties » doit toujours l’être. A cet égard, et ainsi que le souligne la réponse ministérielle commentée, les articles 101, 102 et 104 du décret font référence à la signature du marché.

Cette réponse ministérielle reste néanmoins partielle puisqu’elle ne précise pas les conséquences du défaut de signature de l’offre sur sa valeur à l’égard de l’acheteur. On peut en effet se demander si l’offre non signée engage réellement le candidat.

2 Distinguer les offres irrégulières et les offres anormalement basses

Le ministère précise tout d’abord que les procédures prévues aux articles 59 et 60 du décret n° 2016-360 sont distinctes et exclusives l’une de l’autre : la première correspond notamment aux offres irrégulières tandis que la deuxième correspond aux offres anormalement basses.

Dès lors, un candidat ayant présenté une offre anormalement basse ne saurait en principe bénéficier du dispositif de régularisation prévu à l’article 59 du décret n° 2016-360. Notons d’ailleurs à cet égard que l’article 59 du décret précise bien que les offres irrégulières sont régularisables « à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses ».

Néanmoins, s’il s’avère que le caractère anormalement bas de l’offre résulte d’une irrégularité, alors elle peut être considérée comme irrégulière et bénéficier du mécanisme de l’article 59 du décret.

Ainsi, par exemple, une offre pourra faire l’objet d’une régularisation si son faible prix résulte d’une erreur matérielle dans la rédaction du bordereau des prix unitaires. Cette analyse s’inscrit dans la lignée jurisprudentielle du Conseil d’Etat qui admet qu’un candidat puisse rectifier son offre lorsqu’elle a été entachée d’une simple erreur matérielle dont le pouvoir adjudicateur ne peut se prévaloir de bonne foi 3) CE 21 septembre 2011 Département Haut de Seine, req. n° 349149 : publié au Rec. CE .

3 Précisions sur les modalités d’application des seuils des modifications de marché autorisées d’office

Pour mémoire, l’article 139-6° du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 prévoit qu’un marché public peut être modifié sans nouvelle procédure de publicité lorsque le montant de la modification est inférieur aux seuils européens et à 10% du montant du marché initial pour les marchés publics de services et de fournitures ou à 15% du montant du marché initial pour les marchés publics de travaux.

Le ministère rappelle que le montant du marché initial se comprend après application des clauses de variation de prix. En d’autres termes, si un marché public de service a été conclu pour un montant de 1 000 000 EUR HT et qu’une clause de variation des prix de 4 % porte ce montant à 1 040 000 EUR HT, une modification de 104 000 EUR peut intervenir sans qu’une nouvelle procédure de publicité soit nécessaire.

4 Précisions sur le calcul de la valeur estimée du besoin

Le ministère apporte également des précisions sur le champ d’application de l’article 21-II du décret n° 2016-360.

Pour mémoire, cet article prévoit les modalités de calcul de la valeur estimée du besoin des marchés publics de fournitures ou de services « qui répondent à un besoin régulier ». Le ministère vient préciser que cet article n’est applicable que pour les marchés qui n’excèdent pas une durée totale de douze mois.

5 Interdiction du critère relatif à la « souplesse dans les modalités de facturation »

Enfin, le ministère a eu à répondre d’une question relative à la légalité du critère lié à « la souplesse dans les modalités de facturation » qui se rencontre parfois dans certains marchés.

Le ministère indique que l’application d’un tel critère est interdite à plusieurs titres :

    ► elle contreviendrait à l’article 2 du décret du 29 mars 2014 selon lequel « la date de réception de la demande de paiement ne peut faire l’objet d’un accord contractuel entre le pouvoir adjudicateur et son créancier » ;
    ► elle serait un moyen de contourner l’interdiction de paiement différé prévu à l’article 60 de l’ordonnance n° 2015-899 ;
    ► elle conduirait à discriminer les entreprises ne disposant pas de fonds propres suffisants ou de disponibilités de crédit leur permettant de différer l’envoi des factures à leur client.

Ainsi les marchés publics attribués sur un tel critère sont susceptibles d’une annulation contentieuse. Les pouvoirs adjudicateurs ayant recours à un tel critère peuvent également faire l’objet d’une condamnation pénale sur le fondement de l’article 432-14 du code pénal relatif au délit de favoritisme ou encore d’une poursuite devant la Cour de discipline budgétaire et financière. Les fonctionnaires et agents publics à l’origine de l’application de ce critère peuvent également se voir appliquer des sanctions disciplinaires.

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References   [ + ]

1. L’article 48 du CMP prévoyait en effet que : « les offres sont présentées sous la forme de l’acte d’engagement défini à l’article 11 ». Et l’article 11 du même code disposait que « L’acte d’engagement est la pièce signée par un candidat à un accord-cadre ou à un marché public dans laquelle le candidat présente son offre ou sa proposition dans le respect des clauses du cahier des charges qui déterminent les conditions dans lesquelles le marché est exécuté. Cet acte d’engagement est ensuite signé par le pouvoir adjudicateur ».
2. Article 44 CMP pour les candidatures et 48 pour les offres.
3. CE 21 septembre 2011 Département Haut de Seine, req. n° 349149 : publié au Rec. CE

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