Limite au contrôle du juge en matière d’expropriation pour cause d’utilité publique

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

July 2016

Temps de lecture

2 minutes

CE 6 juillet 2016 Commune d’Achères et SARRY 78, req. n° 371034

Par un arrêté en date du 5 mai 2008, le préfet des Yvelines a déclaré d’utilité publique le projet de réalisation et d’aménagement de la zone d’aménagement concerté (ZAC) Cœur de ville et a autorisé la Société d’aménagement de la région de Rambouillet et du département des Yvelines (SARRY 78) à acquérir les immeubles compris dans ce périmètre.

Cet arrêté a été contesté par des propriétaires qui estimaient que l’utilité publique de l’inclusion de leur parcelle dans le périmètre d’expropriation n’était pas démontrée.

Le Tribunal administratif de Versailles a rejeté le recours tendant à l’annulation de cet arrêté. Saisie en appel, la Cour administrative d’appel de Versailles a infirmé le jugement en considérant que les propriétaires étaient « fondés à soutenir que cette décision est, s’agissant de leur parcelle, dépourvue de fondement légal en raison de l’absence de nécessité de l’acquisition par la voie de l’expropriation de ladite parcelle pour la réalisation des objectifs de l’opération déclarée d’utilité publique » 1) CAA Versailles 25 avril 2013 M et Mme C…, req. n° 11VE02562..

Saisi en cassation, le Conseil d’Etat, annulant l’arrêt de la Cour, rappelle les trois étapes du contrôle exercé par le juge sur l’utilité publique d’une expropriation :

    ► Le juge examine la finalité d’intérêt général de l’opération nécessitant l’expropriation d’immeubles ou de droit réels immobiliers ;

    ► Il s’assure que l’expropriant ne peut réaliser le projet dans des conditions équivalentes, sans recourir à l’expropriation (contrôle de la nécessité) ;

    ► Il procède au bilan général en vérifiant « que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d’ordre social ou économique que comporte l’opération ne sont pas excessifs » au regard de l’intérêt de l’opération.

Ainsi, tout en reprenant le considérant posé dans l’arrêt Commune de Levallois-Perret 2) CE 19 octobre 2012 Commune de Levallois-Perret, req. n° 343070 : mentionné aux T. Rec. CE. en 2012, l’arrêt commenté permet surtout de mettre en lumière les modalités du contrôle effectué par le juge sur la nécessité de l’expropriation (deuxième temps du raisonnement).

En effet, le Conseil d’Etat ajoute que le juge administratif est tenu « s’il est saisi d’un moyen en ce sens, de s’assurer, au titre du contrôle sur la nécessité de l’expropriation, que l’inclusion d’une parcelle déterminée dans le périmètre d’expropriation n’est pas sans rapport avec l’opération déclarée d’utilité publique ».

Dans ce cadre, le Conseil d’Etat a annulé pour erreur de droit l’arrêt de la Cour considérant :

    « qu’en recherchant ainsi si les objectifs de la zone d’aménagement concerté pouvaient être atteints dans le cadre d’un projet ne comprenant pas cette parcelle, au lieu de se borner à s’assurer que l’inclusion de cette parcelle dans le périmètre d’expropriation n’était pas sans rapport avec l’opération d’aménagement déclarée d’utilité publique, la cour a commis une erreur de droit ; »

En conséquence, quand il s’agit de contrôler le périmètre de l’expropriation à sa nécessité, le juge doit se contenter de vérifier que l’inclusion de la parcelle n’est pas sans rapport avec l’opération, et non de vérifier que l’opération d’aménagement aurait pu être réalisée de façon équivalente sans expropriation de la parcelle. Le Conseil d’Etat définit ainsi une limite dans le contrôle maximum que connait le juge en matière de déclaration d’utilité publique.

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References   [ + ]

1. CAA Versailles 25 avril 2013 M et Mme C…, req. n° 11VE02562.
2. CE 19 octobre 2012 Commune de Levallois-Perret, req. n° 343070 : mentionné aux T. Rec. CE.

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