Enfin le décret relatif à l’aménagement cinématographique ! Décret n° 2015-268 du 10 mars 2015 modifiant la partie réglementaire du code du cinéma et de l’image animée et relatif à l’aménagement cinématographique

Catégorie

Aménagement commercial

Date

March 2015

Temps de lecture

6 minutes

Un mois à peine après la publication du décret n° 2015-165 du 12 février 2015 relatif à l’aménagement commercial paraît le décret attendu 1)D’après l’article 57 § IV de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises modifiant la partie législative du CCIA, l’entrée en vigueur du décret d’application modifiant la partie réglementaire du même code était prévue « au plus tard le 1er janvier 2015 ». modifiant la partie réglementaire du code du cinéma et de l’image animée (ci-après CCIA) pour y transférer les dispositions issues du code de commerce relatives à l’autorisation d’aménagement cinématographique.

Ce décret, publié au journal officiel le 12 mars 2015 et entré en vigueur le 13, a pour objet l’autonomisation de l’aménagement cinématographique par rapport à l’aménagement commercial.

Il fait suite à la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (dite ACTPE) qui avait, dans son article 57, transféré les dispositions législatives du code de commerce dans le CCIA et dont l’entrée en vigueur dépendait de l’adoption du « décret pris pour son application modifiant la partie réglementaire ».

Ce texte complète également l’œuvre de codification entamée par le décret n° 2014-794 du 9 juillet 2014 relatif à la partie réglementaire du code du cinéma et de l’image animée, lequel avait notamment retranscrit, aux articles A. 212-7 et A. 212-8 du CCIA, l’arrêté du 5 décembre 2008 relatif à la demande portant sur les projets d’aménagement cinématographique.

A la différence du décret relatif à l’aménagement commercial, le décret du 10 mars 2015 ne remanie pas en profondeur le régime de l’aménagement cinématographique : la procédure d’autorisation demeure distincte et autonome de celle du permis de construire et elle n’est pas transformée.

En effet, le décret commenté ici se borne à transférer de la partie réglementaire du code de commerce – dont les dispositions correspondantes seront abrogées – à celle du CCIA les règles applicables en matière d’aménagement cinématographique (1), en y apportant, toutefois, quelques précisions (2).

1 L’architecture de la partie réglementaire du CCIA relative à la procédure d’autorisation d’aménagement cinématographique

L’article R. 212-6, créé par le décret du 9 juillet 2014 précité, lequel renvoyait aux dispositions contenues dans le code de commerce s’agissant des règles relatives aux commissions d’aménagement commercial statuant en matière cinématographique – renommées commissions d’aménagement cinématographique – et aux modalités de délivrance de l’autorisation est complètement modifié.

Il est désormais suivi de plusieurs articles reprenant globalement l’architecture qui figurait dans le code de commerce.

Ainsi :

► les articles R. 212-6 à R. 212-6-13 du CCIA fixent les modalités de désignation, de composition et de fonctionnement des commissions départementale, puis nationale, d’aménagement cinématographique (CDACi et CNACi) ; ils reprennent les dispositions qui figuraient aux articles R. 751-1 à R. 751-11 du code de commerce ;

► l’article R. 212-7-1 du CCIA définit la zone d’influence cinématographique sans modifier les termes de l’ancien II de l’article R. 752-8 du code de commerce ;

► les articles R. 212-7-2 à R. 212-7-31 du CCIA sont relatifs à la procédure d’autorisation :
– art. R. 212-7-2 à R. 212-7-7 du CCIA : dépôt de la demande d’autorisation auprès de la CDACi (anciens art. R. R. 752-6 à R. 752-15 du code de commerce) et A. 212-7-3-1 et A. 212-7-3-2 du CCIA (anciens A. 212-7 et A. 212-8) : composition du dossier de demande ;
– art. R. 212-7-8 à R. 212-7-19 du CCIA : déroulement de la procédure d’instruction et d’autorisation par la CDACi (anciens art. R. 752-16 à R. 752-26 du code de commerce) ;
– art. R. 212-7-20 du CCIA : durée de validité de l’autorisation d’exploitation cinématographique (AECi) – ancien art. R. 752-27 du code de commerce ;
– art. R. 212-7-21 à R. 212-7-24 du CCIA : modalités d’exercice du recours contre l’autorisation délivrée par la CDACi (anciens R. 752-45 à R. 752-48 du code de commerce) ;
– art. R. 212-7-25 à R. 212-7-31 du CCIA : examen du recours par la CNACi (anciens R. 752-49 à 752-52 du code de commerce) ;

► l’article R. 212-8 du CCIA renvoie, comme l’ancien article R. 212-9 du même code, aux dispositions du code de l’urbanisme s’agissant des règles relatives au délai d’instruction de la demande de permis de construire, à celles concernant la notification d’une prolongation de l’instruction ou d’un refus d’une demande d’autorisation d’exploitation cinématographique ou encore à celles concernant la naissance d’une décision tacite ;

► l’article R. 434-1 du CCIA prévoit les sanctions pénales en cas de méconnaissance de la procédure d’autorisation (ancien art. R. 752-53 du code de commerce).

2 Les précisions et modifications apportées par le décret

Le décret commenté apporte quelques précisions par rapport aux anciennes dispositions du code de commerce et il introduit dans le CCIA certaines nouveautés :

► les articles R. 212-6-3 et R. 212-6-6 précisent les modalités de désignation les personnalités qualifiées siégeant à la CDACi : elles sont nommées, comme tous les membres de la commission, par un arrêté préfectoral, au sein de collèges de représentants pour les personnalités qualifiées en matière de développement durable et d’aménagement du territoire et sur proposition du président du CNC pour la personnalité qualifiée en matière de distribution et d’exploitation cinématographique ; elles exercent toutes un mandat de 3 ans renouvelable une seule fois.

► L’article R. 212-6-10 du CCIA étoffe, en s’inspirant de la pratique, la description des fonctions du président de la CNACi : ce dernier représente la commission, en signe les décisions et signe également les mémoires produits dans le cadre de recours juridictionnels contre les décisions de la commission (ce qui était déjà prévu par l’article R. 751-8 du code de commerce) et l’article R. 212-6-12 précise le fonctionnement de la CNACi en ajoutant que le président du CNC désigne, parmi les agents de l’établissement, le secrétaire et le secrétaire suppléant de la commission.

► Les informations devant figurer dans le dossier de demande d’autorisation comportent de nouveaux éléments (cf. A. 212-7-3-1 du CCIA) : les dispositifs envisagés pour faciliter l’accessibilité aux personnes handicapées (9°), et, s’agissant de l’étude des effets prévisibles du projet (12°) :
– le dossier doit désormais indiquer « une estimation du pourcentage de séances consacrées respectivement aux œuvres cinématographiques d’art et d’essai en général, aux œuvres cinématographiques sur plus de 150 copies, aux œuvres cinématographiques d’art et d’essai dites ‘’jeune public’’, aux œuvres cinématographiques d’art et d’essai dites ‘’de patrimoine’’ et aux œuvres cinématographiques d’art et d’essai en version originale », ce qui permettra aux commissions de mieux apprécier le projet de programmation des projets et d’évaluer avec davantage de précision la proportion de films art et essai diffusée par le cinéma ;
– il doit également mentionner la « pertinence de la localisation du projet au regard du schéma de cohérence territoriale et du plan local d’urbanisme », harmonisant ainsi les dispositions relatives à la composition du dossier avec les sous-critères destinés à évaluer les effets du projet en matière d’aménagement culturel du territoire, de protection de l’environnement et de qualité de l’urbanisme, fixés par l’article L. 212-9 du CCIA dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014.

► L’article R. 212-7-8 du CCIA dispose que le secrétariat de la CDACi « s’assure du caractère complet des demandes » et non plus, comme le prévoyait l’ancien article R. 752-16 du code de commerce, « examine la recevabilité » de celles-ci. Cette distinction est en accord avec la répartition des rôles en matière d’aménagement cinématographique. En effet, si comme en matière d’aménagement commercial, ce sont les services de la préfecture qui exercent les fonctions de secrétariat (cf. art. R. 212-6-8 CCIA), l’instruction des dossiers est en revanche effectuée par la direction régionale des affaires culturelles (DRAC).

► L’article R. 212-7-9 du CCIA inverse le principe des formalités d’envoi du dossier de demande aux membres de la CDACi : les documents sont désormais envoyés par voie électronique, à moins que les membres n’aient manifesté le souhait de les recevoir par lettre recommandée avec accusé de réception. En outre, ce sont aujourd’hui tous les membres de la commission qui reçoivent communication de l’ordre du jour de la réunion de la CDACi et des rapports d’instruction et non plus seulement les membres titulaires (art. R. 212-7-10).

► L’article R. 212-7-20 allonge à 5 ans (au lieu de 3) la durée de validité des AECi lorsque le projet de cinéma a vocation à s’intégrer dans un ensemble commercial de plus de 6 000 mètres carrés situé sur le même terrain. Cet ajout par rapport à l’ancien article R. 752-27 du code de commerce, permet d’accorder le régime des autorisations d’exploitation cinématographique sur celui des autorisations d’exploitation commerciale (cf. article R. 752-20 du code de commerce dans sa rédaction issue du décret du 12 février 2015), dans le cas de projets de grande ampleur dont la réalisation est nécessairement plus longue. Ces dispositions s’appliquent aux autorisations en cours de validité à la date d’entrée en vigueur du décret d’après l’article 7 de celui-ci.

► L’article R. 212-7-22 du CCIA modifie la rédaction des dispositions relatives à la motivation du recours exercé contre la décision de la CDACi et indique que : « Sous peine d’irrecevabilité, le recours est motivé et fait état de l’intérêt à agir de chaque requérant » (au lieu de : « Sous peine d’irrecevabilité, chaque recours est accompagné de motivations et de la justification de l’intérêt à agir de chaque requérant » ; cf. ancien art. R. 752-46 du code de commerce).

► L’article R. 212-7-25 du CCIA précise que le secrétariat de la CNACi instruit les recours sous l’autorité du président de la commission.

► L’article R. 212-7-29 du CCIA mentionne que c’est le ministre chargé de la culture dont l’avis doit être recueilli et présenté par le commissaire du gouvernement aux membres de la CNACi. Cette précision reprend partiellement les solutions dégagées par la jurisprudence qui estimaient que les ministres intéressés en matière d’aménagement cinématographique étaient les ministres chargés de la culture et de l’écologie 2) Voir par exemple CE 5 mars 2014 Association Meru Cinéma Le Domino, req. n° 358303..

► Les dispositions relatives aux sanctions précisent que l’infraction est constituée par jour d’exploitation, par places de spectateurs et aussi par salles exploitées irrégulièrement.

► Enfin, l’article 6 du décret rappelle que les recours contentieux exercés contre les décisions de la CNACi sont portés devant la cour administrative d’appel du ressort de la commission départementale ayant pris la décision (cf. art. 311-3 du code de justice administrative).

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References   [ + ]

1. D’après l’article 57 § IV de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises modifiant la partie législative du CCIA, l’entrée en vigueur du décret d’application modifiant la partie réglementaire du même code était prévue « au plus tard le 1er janvier 2015 ».
2. Voir par exemple CE 5 mars 2014 Association Meru Cinéma Le Domino, req. n° 358303.

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