Nature des intérêts moratoires dus en cas de retard de paiement d’un marché public et transaction fixant le solde de ce marché : application des intérêts moratoires au taux légal ou contractuel ?

Catégorie

Contrats publics

Date

August 2025

Temps de lecture

2 minutes

CE 22 juillet 2025 NGE Génie civil, req. n° 494323 aux T.

A la suite d’un litige au sujet de l’établissement du décompte, un protocole d’accord transactionnel a été conclu entre le maître d’ouvrage et le titulaire, fixant le montant du décompte général définitif du marché, le solde restant à verser au titulaire et une échéance de règlement au 31 août 2019. Toutefois, le paiement n’est intervenu que 4 mois plus tard, après homologation judiciaire de l’accord. Le mandataire du groupement conjoint d’entreprises a alors sollicité le versement des intérêts moratoires prévus par le marché pour la période de retard et la mainlevée de sa garantie bancaire. Ces demandes ont été rejetées par un jugement du 7 décembre 2022 du tribunal administratif de Rouen 1)TA Rouen 7 décembre 2022 NGE Génie Civil et autres, req. n°2004108, confirmé par un arrêt du 19 mars 2024 de la cour administrative d’appel de Douai 2)CAA Douai 19 mars 2024 NGE Génie Civil et autres, req. n°23DA00221 contre lequel les sociétés requérantes se pourvoient en cassation. Celles-ci font valoir que la cour a commis une erreur de droit en jugeant que la transaction constituait un contrat autonome, distinct du marché public initial et que cette autonomie faisait obstacle au paiement des intérêts moratoires prévus par ledit marché.

Le Conseil d’Etat y répond et il rappelle que les dispositions des articles 67 de la loi n° 94-679 du 8 août 1994 et L. 2192-14 du code de la commande publique interdisent de façon absolue toute renonciation aux intérêts moratoires dus du fait de retards dans le règlement des marchés publics, que cette renonciation intervienne lors de la passation du marché ou postérieurement. Il précise ainsi dans son analyse que :

« lorsqu’un accord transactionnel fixe, forfaitairement et définitivement pour solde de tous comptes en principal et en intérêts, le montant global d’un marché à un nouveau montant incluant les reprises de réserves, les révisions de prix et les intérêts moratoires, pour un règlement prévu au plus tard à une date prévue par cet accord, la somme due au terme de ce dernier ne procède pas d’un contrat distinct du contrat du marché public mais intervient en règlement du marché public, même au terme d’une transaction ».

Par conséquent, en cas de retard de paiement, s’appliquent à cette somme et jusqu’à son paiement effectif, les intérêts moratoires dus en raison de retards dans le règlement des marchés publics, sans que la signature de la transaction puisse y faire obstacle, et non les intérêts moratoires au taux légal prévus par le code civil.

Le Conseil d’Etat annule donc l’arrêt attaqué sur ce point. La portée de cette décision est d’importance dès lors que le taux des intérêts moratoires contractuels en matière de marchés publics est souvent bien supérieur à celui des intérêts moratoires au taux légal (pour rappel, le taux des intérêts moratoires contractuels en marché correspond au taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 8 points 3)R. 2192-31 du code de la commande publique.

 

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References   [ + ]

1. TA Rouen 7 décembre 2022 NGE Génie Civil et autres, req. n°2004108
2. CAA Douai 19 mars 2024 NGE Génie Civil et autres, req. n°23DA00221
3. R. 2192-31 du code de la commande publique

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