Capacités d’entités liées au candidat : liberté de preuve

Catégorie

Contrats publics

Date

February 2016

Temps de lecture

3 minutes

CJUE 14 janvier 2016 Ostas celtnieks SIA, Aff. n° C‑234/14

Par cet arrêt, la cour de justice s’est prononcée sur les modalités de preuve des capacités d’entités liées au soumissionnaire d’un marché public telles que prévues par les articles 47 et 48 de la directive 2004/18/CE du 31 mars 2004.

Une autorité locale lettonne a lancé, au mois de novembre 2011, la procédure de passation d’un marché public de travaux d’amélioration des infrastructures routières. Son cahier des charges imposait, dans le cas où un soumissionnaire faisait valoir les capacités d’autres entités, de conclure avec celles-ci un accord de partenariat ou de créer avec elles une société en nom collectif avant la passation du marché.

Saisie de l’affaire après un recours devant les juridictions du fond, la cour suprême lettonne a sursis à statuer afin de poser à la cour de justice de l’union européenne une question préjudicielle relative à la légalité de ces exigences au regard des articles 47 et 48 de la directive précitée.

Pour mémoire, il ressort des articles 47 et 48 de la directive 2004/18/CE 1) « Un opérateur économique peut, le cas échéant et pour un marché déterminé, faire valoir les capacités d’autres entités, quelle que soit la nature juridique des liens existant entre lui-même et ces entités. Il doit, dans ce cas, prouver au pouvoir adjudicateur que, pour l’exécution du marché, il disposera des moyens nécessaires, par exemple, par la production de l’engagement de ces entités de mettre à la disposition de l’opérateur économique les moyens nécessaires. » (article 47 §2)
« Un opérateur économique peut, le cas échéant et pour un marché déterminé, faire valoir les capacités d’autres entités, quelle que soit la nature juridique des liens existant entre lui-même et ces entités. Il doit, dans ce cas, prouver au pouvoir adjudicateur qu’il disposera des moyens nécessaires, par exemple, par la production de l’engagement de ces entités à cet effet » (article 48 §3
), ainsi que de la jurisprudence constante de la cour de justice 2) CJUE 10 octobre 2013 Swm Costruzioni 2 et Mannocchi Luigino, aff. n° C‑94/12, (points 29 et 33) que, pour candidater à l’attribution d’un marché, tout opérateur économique a le droit de faire valoir les capacités d’autres entités, quelle que soit la nature des liens existant entre lui et ces entités, pour autant qu’il prouve au pouvoir adjudicateur qu’il disposera des capacités de ces entités dans le cadre de l’exécution du marché.

Ainsi, il appartient au candidat d’apporter la preuve qu’il disposera effectivement des moyens dont il se prévaut et qui ne lui appartiennent pas en propre.

Cependant, la cour de justice rappelle que les articles précités ne permettent ni de présumer que certains types de soumissionnaires disposent ou non des moyens nécessaires à l’exécution du marché, ni d’exclure a priori certains modes de preuves qu’il en disposera.

Par conséquent, la Cour affirme que :

    « […] le soumissionnaire est libre de choisir, d’une part, la nature juridique des liens qu’il entend établir avec les autres entités dont il fait valoir les capacités aux fins de l’exécution d’un marché déterminé et, d’autre part, le mode de preuve de l’existence de ces liens. […] ».

En imposant au soumissionnaire, comme seul moyen de preuve des capacités d’autres entités, la conclusion d’un accord de partenariat ou la création d’une société en nom collectif, le pouvoir adjudicateur a donc privé d’effet utile les dispositions des articles 47 et 48 de la directive 2004/18/CE.

Les dispositions de la nouvelle directive « marchés » 3) Directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics ne devraient pas remettre en cause une telle approche, puisqu’elles sont tout à fait similaires à celles de la directive 2004/18/CE sur ce sujet : l’article 63 dispose que « si un opérateur économique souhaite recourir aux capacités d’autres entités, il apporte au pouvoir adjudicateur la preuve qu’il disposera des moyens nécessaires, par exemple, en produisant l’engagement de ces entités à cet effet », tandis que l’article 60 de cette même directive précise qu’« en ce qui concerne l’article 63, les opérateurs économiques peuvent avoir recours à tout moyen approprié pour prouver au pouvoir adjudicateur qu’ils disposeront des moyens nécessaires ».

Le principe de liberté de la preuve de la capacité et de la disposition effective des capacités d’autres entités semble donc préservé.

Cependant, on peut noter que l’article 63 de la directive 2014/24/UE prévoit également que le pouvoir adjudicateur pourra exiger une responsabilité solidaire entre le soumissionnaire et les autres entités, afin de garantir le risque d’inexécution du marché – sans que la forme de cet engagement solidaire ne soit cependant imposée.

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1. « Un opérateur économique peut, le cas échéant et pour un marché déterminé, faire valoir les capacités d’autres entités, quelle que soit la nature juridique des liens existant entre lui-même et ces entités. Il doit, dans ce cas, prouver au pouvoir adjudicateur que, pour l’exécution du marché, il disposera des moyens nécessaires, par exemple, par la production de l’engagement de ces entités de mettre à la disposition de l’opérateur économique les moyens nécessaires. » (article 47 §2)
« Un opérateur économique peut, le cas échéant et pour un marché déterminé, faire valoir les capacités d’autres entités, quelle que soit la nature juridique des liens existant entre lui-même et ces entités. Il doit, dans ce cas, prouver au pouvoir adjudicateur qu’il disposera des moyens nécessaires, par exemple, par la production de l’engagement de ces entités à cet effet » (article 48 §3
2. CJUE 10 octobre 2013 Swm Costruzioni 2 et Mannocchi Luigino, aff. n° C‑94/12, (points 29 et 33
3. Directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics

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