La tierce opposition fermée au propriétaire d’une parcelle devenue inconstructible du fait de l’annulation d’un PLU

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

October 2022

Temps de lecture

3 minutes

CE 27 septembre 2022 Mme Noëlle T.., req. 451013 : mentionné dans les tables du recueil Lebon

Dans cette affaire, la requérante avait vu sa parcelle, inconstructible sous le plan d’occupation des sols (POS) anciennement applicable, devenir pour partie constructible suite au classement de cette dernière en zone Uc par le plan local d’urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Paul-en-Chablais adopté en 2016.

Elle avait alors déposé et obtenu un certificat d’urbanisme en 2017 aux terme duquel son terrain pouvait être utilisé pour accueillir la construction d’une maison d’habitation sur le fondement des dispositions de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme.

Toutefois, la délibération approuvant le PLU a été annulée partiellement par le Tribunal administratif de Grenoble en 2018, notamment au vu du classement dont faisait l’objet la parcelle de la requérante.

Cette dernière, n’étant pas partie à l’instance précitée, a alors formé tierce opposition contre le jugement. Cette demande a été rejetée pour irrecevabilité par le Tribunal administratif de Grenoble et confirmée en appel par la Cour administrative d’appel de Lyon.

Il appartenait donc aux juges du Palais Royal de déterminer si l’obtention d’un certificat d’urbanisme confère un droit suffisant à son titulaire, en sa qualité de propriétaire d’une parcelle devenue inconstructible du fait d’une décision juridictionnelle, pour former tierce opposition à l’encontre de ce jugement annulant une disposition d’urbanisme applicable à la date du certificat.

Pour rappel, aux termes de l’’article R. 832-1 du code de justice administrative « Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu’elle représente n’ont été présents ou régulièrement appelés dans l’instance ayant abouti à cette décision ».

Par principe, toute personne est fondée à former tierce opposition à une décision juridictionnelle annulant une réglementation, lorsqu’elle a été personnellement privée, par la décision juridictionnelle, d’un droit qu’elle tenait de cette dernière 1)CE 29 novembre 1912 Boussuge, req. n° 45893 : Rec. CE..

Il a été jugé que les propriétaires de parcelles situées dans les zones concernées par l’annulation d’un PLU ou d’un POS ne justifient pas en cette seule qualité d’un droit les rendant recevables à former tierce opposition 2)CE 16 novembre 2009 Sté les résidences de Cavalière, req. n° 308624 : Rec. T. CE..

En 2017, le Conseil d’Etat a précisé qu’un « requérant n’est, en règle générale et sauf circonstances particulières dont il se prévaudrait, pas recevable à former tierce-opposition à une décision ayant fait droit, totalement ou partiellement, à une demande d’annulation d’un document d’urbanisme au seul motif qu’il est partie à un litige portant sur la légalité d’une autorisation de construire qui lui a été délivrée sur le fondement de dispositions annulées de ce document. » 3)CE 21 juin 2017 Sté centrale photovoltaïque de Font le Leu, req. n° 396427 : Rec. T. CE..

Ainsi, dans la lignée de sa jurisprudence le Conseil d’Etat considère que l’obtention d’un certificat d’urbanisme ne confère pas au propriétaire d’une parcelle, devenue inconstructible par l’annulation juridictionnelle d’un PLU, un droit suffisamment avéré et direct, en l’occurrence un véritable droit à construire, de nature à lui ouvrir tierce opposition  à l’encontre du jugement annulant une réglementation sur laquelle se fonde le certificat.

Il considère en effet que :

« Le propriétaire de parcelles que l’annulation pour excès de pouvoir des dispositions d’un plan local de l’urbanisme aurait pour effet de rendre inconstructibles ne justifie pas, en cette seule qualité, d’un droit auquel cette décision juridictionnelle aurait préjudicié, le rendant recevable à former tierce opposition à cette décision. Il en va ainsi alors même qu’il serait titulaire d’un certificat d’urbanisme délivré en vertu des dispositions citées ci-dessus de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme, lequel, s’il lui confère le droit de voir sa demande de permis de construire, déposée durant les dix-huit mois qui suivent, examinée au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique, ne lui donne pas un droit à construire suffisamment caractérisé pour le rendre recevable à former tierce opposition à une telle décision d’annulation. ».

 

 

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References   [ + ]

1. CE 29 novembre 1912 Boussuge, req. n° 45893 : Rec. CE.
2. CE 16 novembre 2009 Sté les résidences de Cavalière, req. n° 308624 : Rec. T. CE.
3. CE 21 juin 2017 Sté centrale photovoltaïque de Font le Leu, req. n° 396427 : Rec. T. CE.

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