Le paradoxe estival du gouvernement : entre l’accélération des projets de constructions et le ralentissement du traitement contentieux des autorisations d’exploitation commerciale, son cœur balance

Catégorie

Aménagement commercial, Droit administratif général, Urbanisme et aménagement

Date

September 2013

Temps de lecture

3 minutes

Décret n° 2013-730 du 13 août 2013 portant modification du code de justice administrative (partie réglementaire) – JORF n°0189 du 15 août 2013 page 13960 (NOR: JUSC1316801D)

En dépit d’une volonté forte et affirmée d’accélérer la réalisation des projets de constructions 1) loi n° 2013-569 du 1er juillet 2013 habilitant le Gouvernement à adopter des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=57844972C31AA6150A9A89FA2E77617F.tpdjo14v_1&dateTexte=?cidTexte=JORFTEXT000027646242&categorieLien=cid
Projet de loi Accès au logement et urbanisme rénové dite « ALUR » consultable sur http://www.assemblee-nationale.fr/14/dossiers/acces_logement_urbanisme_renove.asp
,notamment par l’encadrement des règles de procédure contentieuse applicables en droit de l’urbanisme et la prévention des contestations dilatoires ou abusives, le Gouvernement vient d’adopter au milieu de l’été un décret qui risque de freiner la réalisation de projets d’aménagement commercial en rallongeant le délai de traitement contentieux des autorisations d’exploitation commerciale.

Revenant sur les objectifs déclarés de raccourcissement des délais contentieux et de sécurisation juridique par l’homogénéité d’application du droit sur l’ensemble du territoire national 2) Rép. Min, Question n° 75545 de Mme Catherine Vautrin, JORF du 12 avril 2011, p. 3634. qui avaient motivé, en 2011, la modification du code de justice administrative pour confier au Conseil d’Etat la compétence pour connaître en premier et dernier ressort des recours dirigés contre les décisions de la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) 3) Décret n° 2011-921 du 1er août 2011 modifiant le code de justice administrative (Entré en vigueur le 1er octobre 2011)., le nouveau décret attribue désormais cette compétence aux cours administratives d’appel.

Ainsi, à compter du 1er janvier 2014, les nouvelles requêtes dirigées contre les décisions de la CNAC devront être présentées devant la cour administrative d’appel dans le ressort de laquelle a son siège la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) qui a pris la décision initialement contestée 4) Futur article R. 311-3 du code de justice administrative : « Les cours administratives d’appel sont compétentes pour connaître en premier et dernier ressort des litiges relatifs aux décisions prises par la Commission nationale d’aménagement commercial en application de l’article L. 752-17 du code de commerce.
La cour administrative d’appel territorialement compétente pour connaître de ces recours est celle dans le ressort de laquelle a son siège la commission départementale d’aménagement commercial qui a pris la décision
».
.

Les arrêts rendus par la cour pourront à leur tour être contesté devant le Conseil d’Etat dans le cadre d’un pourvoi en cassation 5) L. 821-1 du CJA : « Les arrêts rendus par les cours administratives d’appel et, de manière générale, toutes les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions administratives peuvent être déférés au Conseil d’Etat par la voie du recours en cassation » – Article L. 111-1 du CJA : « Le Conseil d’Etat est la juridiction administrative suprême. Il statue souverainement sur les recours en cassation dirigés contre les décisions rendues en dernier ressort par les diverses juridictions administratives (…) » – CE 7 févier 1947 D’Aillières : Rec. CE p. 50..

Sachant que la durée de traitement moyen des recours par les cours administratives d’appel oscille entre un an et deux ans et demi, il est clair que le décret du 13 août 2013 a donc un effet retardateur dommageable pour la réalisation effective des projets d’aménagement commercial qui sont régulièrement attaqués et que l’accélération de la résolution des litiges annoncée en matière d’urbanisme ne saurait compenser.

Le décret du 13 août 2013 modifie également d’autres dispositions du code de justice administrative en :

– révisant la liste des contentieux relevant du juge unique devant les tribunaux administratifs : ajout du contentieux social (prestation, allocation ou droit attribués au titre de l’aide ou de l’action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d’emploi) et retrait de l’essentiel du contentieux de la situation individuelle des agents publics et des déclarations préalables à la réalisation de travaux (art. L. 421-4 CU) (entrera en vigueur le 1er janvier 2014) ;

– ajoutant le contentieux social à la liste des contentieux pouvant être dispensés de conclusions du rapporteur public (entré en vigueur le 16 août 2013) ;

– modifiant la liste des litiges pour lesquels les tribunaux administratifs statuent en premier et dernier ressort 6) Seul un pourvoi devant le Conseil d’Etat est possible contre ces décisions en application des articles L. 111-1 et L 821-1 du CJA précités. (s’appliquera aux décisions des tribunaux administratifs rendues à compter du 1er janvier 2014) ;

– révisant les compétences de premier et dernier ressort dévolues aux cours administratives d’appel (CAA) : les CAA seront désormais compétentes en matière de recours contre les décisions de la CNAC (cf. supra) et la CAA de Paris deviendra, en lieu et place du Conseil d’Etat, compétente pour connaître des litiges relatifs à certaines décisions 7) Il s’agit des décisions prises en matière d’usage des fréquences pour la diffusion de services de radio et télévision par voie hertzienne terrestre. du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) (s’appliquera aux requêtes enregistrées à compter du 1er janvier 2014) ;

– créant des règles procédurales applicables aux contentieux sociaux (s’appliquera aux requêtes enregistrées à compter du 1er janvier 2014) ;

– refondant les dispositions relatives aux tableaux d’experts devant les juridictions administratives (entrera en vigueur le 1er janvier 2014).

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1. loi n° 2013-569 du 1er juillet 2013 habilitant le Gouvernement à adopter des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=57844972C31AA6150A9A89FA2E77617F.tpdjo14v_1&dateTexte=?cidTexte=JORFTEXT000027646242&categorieLien=cid
Projet de loi Accès au logement et urbanisme rénové dite « ALUR » consultable sur http://www.assemblee-nationale.fr/14/dossiers/acces_logement_urbanisme_renove.asp
2. Rép. Min, Question n° 75545 de Mme Catherine Vautrin, JORF du 12 avril 2011, p. 3634.
3. Décret n° 2011-921 du 1er août 2011 modifiant le code de justice administrative (Entré en vigueur le 1er octobre 2011).
4. Futur article R. 311-3 du code de justice administrative : « Les cours administratives d’appel sont compétentes pour connaître en premier et dernier ressort des litiges relatifs aux décisions prises par la Commission nationale d’aménagement commercial en application de l’article L. 752-17 du code de commerce.
La cour administrative d’appel territorialement compétente pour connaître de ces recours est celle dans le ressort de laquelle a son siège la commission départementale d’aménagement commercial qui a pris la décision
».
5. L. 821-1 du CJA : « Les arrêts rendus par les cours administratives d’appel et, de manière générale, toutes les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions administratives peuvent être déférés au Conseil d’Etat par la voie du recours en cassation » – Article L. 111-1 du CJA : « Le Conseil d’Etat est la juridiction administrative suprême. Il statue souverainement sur les recours en cassation dirigés contre les décisions rendues en dernier ressort par les diverses juridictions administratives (…) » – CE 7 févier 1947 D’Aillières : Rec. CE p. 50.
6. Seul un pourvoi devant le Conseil d’Etat est possible contre ces décisions en application des articles L. 111-1 et L 821-1 du CJA précités.
7. Il s’agit des décisions prises en matière d’usage des fréquences pour la diffusion de services de radio et télévision par voie hertzienne terrestre.

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