L’entrée en vigueur du CG3P n’a pas eu pour effet de déclasser les biens qui appartenaient antérieurement au domaine public

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

June 2025

Temps de lecture

3 minutes

CE 20 mai 2025 Société La Panacée des plantes, req. n° 493452 : mentionné aux T. du Rec. CE

Par une décision du 20 mai 2025, le Conseil d’État a jugé que des locaux appartenant à un département, affectés au service public du développement économique et spécialement aménagés à cette fin, relèvent du domaine public. Il en résulte que les conventions portant sur leur occupation ne peuvent être regardées comme des baux commerciaux et relèvent de la juridiction administrative.

Il considère ainsi que des locaux appartenant à un département qui ont vocation non seulement à accueillir temporairement des entreprises et à être régulièrement remis par le délégataire à la disposition de nouveaux porteurs de projets et créateurs d’entreprises dans un secteur d’activité particulier, mais aussi à permettre, par le biais de prestations matérielles et immatérielles, l’accompagnement de ces entreprises nouvelles de façon à favoriser leur création et leur essor, et qui s’inscrivent dans l’ensemble plus large des équipements et fonctions d’une technopole créée dans les années 1980, outil de développement économique départemental, sont affectées au service public du développement économique départemental.

Il faut noter que le Conseil d’Etat avait considéré le contraire concernant des ateliers-relais construits par une commune et ayant pour objet de favoriser son développement économique en complétant ses facultés d’accueil des entreprises qui certes relève d’une mission de service public, mais cette circonstance ne suffit pas à faire regarder ces ateliers, qui ont vocation à être loués ou cédés à leurs occupants, comme étant affectés, une fois construits, à un service public et, sous réserve qu’ils aient fait l’objet d’un aménagement spécial, à les incorporer de ce seul fait dans le domaine public de la commune. Ainsi, le Conseil d’Etat avait considéré que le bail que la commune consent à une entreprise en vue de l’occupation d’un tel atelier-relais revêt, en l’absence de clause exorbitante du droit commun, le caractère d’un contrat de droit privé 1)CE 11 juin 2004 Commune de Mantes-la-Jolie, req. n° 261260, Rec. T. p. 249.

Dans notre affaire jugée le 20 mai 2025, un groupement d’associations était délégataire des missions de service public d’animation, gestion et développement d’une technopole départementale créée dans les années 1980. A ce titre, l’une des associations avait conclu en février 2017 avec la société requérante trois conventions d’occupation précaire portant sur des locaux à usage de bureaux, de stockage et de production situés au sein d’une pépinière d’entreprises agroalimentaires mise en place dans le cadre de la technopole.

Ces trois conventions arrivées à échéance le 31 décembre 2018, la société occupante s’était maintenue dans les lieux. En réaction, l’association avait obtenu du juge des référés son expulsion ; puis devant le juge du fond, le versement d’indemnités en réparation du préjudice né de son occupation irrégulière des locaux. Le jugement de première instance ayant été confirmé par les juges d’appel, la société s’était pourvue en cassation, soutenant que la cour administrative d’appel avait incompétemment statué et commis une erreur de droit en rejetant la qualification de baux commerciaux.

Alors qu’avant l’entrée en vigueur le 1er juillet 2006 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P), il était exigé une affectation à un service public assortie d’un aménagement spécial et non un aménagement indispensable comme prescrit par l’article L. 2111-1 du CG3P à l’exécution de la mission de service public. Mais, l’entrée en vigueur de ce code, au 1er juillet 2006, n’a pas eu pour effet de déclasser automatiquement les biens qui appartenaient antérieurement au domaine public. Les biens satisfaisant aux anciens critères conservent donc leur qualification domaniale.

Le Conseil d’Etat indique qu’en vertu de l’article L. 2331-1 du même code, relèvent de la compétence de la juridiction administrative non seulement les litiges relatifs à la passation, à l’exécution ou à la résiliation de contrats comportant occupation du domaine public, mais également, sauf disposition législative spéciale, ceux nés d’une occupation sans titre de ce domaine, qu’elle résulte de l’absence de tout titre ou de l’expiration d’un titre antérieurement détenu.

En l’espèce, les locaux de la pépinière d’entreprises agroalimentaires étaient temporairement attribués à des entreprises et régulièrement remis à la disposition de nouveaux porteurs de projets. Intégrés à la technopole, ils s’inscrivaient dans un dispositif global consacré au développement économique départemental, associant hébergement et accompagnement matériel et immatériel de ces entreprises nouvelles. Les locaux étaient donc affectés au service public du développement économique du département délégant. Egalement, spécialement aménagés à cette fin, ils relevaient, par leur consistance et leur vocation, du domaine public du département.

Les conventions litigieuses, conclues sur ces biens ainsi qualifiés, échappaient donc au régime des baux commerciaux.

Le pourvoi a donc été rejeté.

 

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1. CE 11 juin 2004 Commune de Mantes-la-Jolie, req. n° 261260, Rec. T. p. 249

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