Précisions des conditions de maintien d’une autorisation d’installation nucléaire de base

Catégorie

Droit administratif général, Environnement

Date

May 2019

Temps de lecture

3 minutes

CE 11 avril 2019 Greenpeace France, req. n° 413548 : Publié au Rec. Lebon

L’installation nucléaire de base dénommée « Flamanville 3 » comportant un réacteur nucléaire de type à eau pressurisée (EPR) a été autorisée au profit de la société Electricité de France (EDF) par un décret du 10 avril 2007. Elle n’est toujours pas mise en service et les travaux de construction ne sont même pas terminés, le démarrage du réacteur étant prévu à la fin du quatrième trimestre 2019.

Les associations Greenpeace France et autres 1)Réseau Sortir du nucléaire, Notre affaire à tous, France nature environnement, Observatoire du nucléaire, Comité de réflexion d’information et de lutte anti-nucléaire (CRILAN), Stop EPR ni à Penly ni ailleurs, Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (CRIIRAD). ont demandé au Conseil d’État l’annulation du refus implicite opposé par le Premier ministre à leur demande tendant à l’abrogation de cette autorisation.

Pour juger cette affaire, le Conseil d’État présente tout d’abord le cadre légal :

  • il rappelle les dispositions des articles L. 241-2 et L. 242-2 du code des relations entre le public et l’administration selon lesquelles un acte administratif unilatéral obtenu par fraude peut être à tout moment abrogé ou retiré et une décision créatrice de droit, dont le maintien est subordonné à une condition qui n’est plus remplie, peut sans condition de délai être abrogée par l’administration ;
  • il vise ensuite celles applicables aux installations nucléaires de bases 2) 593-1 du code de l’environnement et suivants..

En se fondant sur ces dispositions, le Conseil d’État expose la méthode selon laquelle l’autorité administrative investie du pouvoir de police des installations nucléaires de base doit s’assurer des conditions de maintien d’une autorisation d’installation ayant déjà été délivrée :

  • l’autorité administrative doit vérifier si les conditions légales permettant le fonctionnement de l’installation sont toujours remplies;
  • si elles ne le sont plus, il lui incombe de modifier l’autorisation de l’installation nucléaire de base pour fixer les dispositions ou les obligations complémentaires que requiert la protection des intérêts visés à l’article 593-1 du code de l’environnement, soit la sécurité, la santé et la salubrité publiques, la protection de la nature et de l’environnement ;
  • dans l’hypothèse où les modifications ne sont pas de nature à prévenir ou à limiter de manière suffisante les risques graves qu’elle présente pour ces mêmes intérêts, l’autorité administrative doit abroger l’autorisation.

En l’espèce, le Conseil d’État procède à l’examen des conditions mises au maintien de l’autorisation.

Il considère que les diverses anomalies techniques, relevées par l’autorité de sûreté nucléaire au cours de la construction du réacteur, ont été corrigées par l’exploitant de manière satisfaisante selon l’appréciation de cette même autorité. Il a également relevé que les anomalies décelées dans la composition de l’acier utilisé dans certaines parties de la cuve du réacteur n’interdisaient pas la mise en service future de l’installation dans des conditions de sécurité satisfaisantes.

S’agissant de la situation d’endettement de la société EDF, il a jugé que celle-ci ne caractérise pas l’incapacité de l’exploitant à mener à bien son projet, y compris sur la prise en charge des futures dépenses de démantèlement de l’installation.

En définitive, le Conseil d’État estime que les requérants n’étaient donc pas fondés à soutenir que la société EDF ne disposerait plus des capacités techniques et financières nécessaires pour conduire le projet de création de l’installation de Flamanville 3 dans le respect des intérêts mentionnés à l’article L. 593-1 du Code de l’environnement et que les conditions mises au maintien de l’autorisation de création de cette installation ne seraient plus remplies.

Enfin, la haute juridiction prend le soin de relever que les anomalies constatées dans la fabrication d’équipements sous pression nucléaires n’ont pas été dissimulées à l’autorité administrative investie du pourvoir de police des installations nucléaires de base, dès lors que des échanges ont eu lieu entre EDF, le fabricant (Areva) et l’autorité de sûreté nucléaire, de sorte que le défaut de présentation de ces éléments au dossier de l’enquête publique constitué préalablement à l’obtention de l’autorisation n’est pas de nature à caractériser une fraude.

La requête des associations Greenpeace France et autres est par conséquent rejetée.

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1. Réseau Sortir du nucléaire, Notre affaire à tous, France nature environnement, Observatoire du nucléaire, Comité de réflexion d’information et de lutte anti-nucléaire (CRILAN), Stop EPR ni à Penly ni ailleurs, Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (CRIIRAD).
2. 593-1 du code de l’environnement et suivants.

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