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Par cette décision du 5 février 2025, le Conseil d’État :
- définit la procédure applicable à la délivrance d’un titre d’occupation du domaine public à objet économique, sollicité par un établissement public de gestion et d’aménagement d’un parc national en vue de la création d’une zone de mouillage et d’équipements légers (ZMEL) ; et
- précise les prescriptions que doit respecter ce titre.
Dans cette affaire, l’établissement public du parc national de Port-Cros a été autorisé, par arrêté préfectoral, à occuper temporairement le domaine public maritime naturel du parc national en vue de créer une ZMEL.
Le Conseil d’Etat devait, dans ce cadre, se prononcer sur les deux points suivants :
- un établissement public national assurant la gestion d’un parc national souhaitant occuper temporairement le domaine public maritime naturel dudit parc national en vue de créer une ZMEL est-il soumis à la procédure de publicité et de mise en concurrence prévue par les texte ? (1)
- les autorisations d’occupation temporaire du domaine public maritime accordées pour l’aménagement, l’organisation et la gestion d’une ZMEL sont-elles soumises – en sus des dispositions du CG3P 1) Code général de la propriété des personnes publiques – aux dispositions relatives à l’occupation et l’utilisation du sol prévues dans le code de l’urbanisme ?
1 En premier lieu, sur le premier point, le Conseil d’Etat rappelle que la délivrance d’un titre d’occupation, en vue d’une exploitation économique sur le domaine public, est soumise à une procédure de sélection préalable (L. 2122-1-1 du CG3P). Et lorsque le futur occupant manifeste spontanément son intérêt à occuper les dépendances domaniales, l’autorité gestionnaire met en place une simple publicité afin de s’assurer, préalablement à l’octroi du titre, « de l’absence de toute autre manifestation d’intérêt concurrente » (L. 2122-1-4 du CGPPP). Par exception, le titre peut être délivré à l’amiable « à une personne publique dont la gestion est soumise à la surveillance directe de l’autorité compétente ou à une personne privée sur les activités de laquelle l’autorité compétente est en mesure d’exercer un contrôle étroit » (L. 2122-1-3 du CGPPP).
Il en résulte, pour les juges du Palais-Royal, que dans ce cas « ni la procédure prévue à l’article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques, ni l’exigence de publicité prévue à l’article L. 2122-1-4 du même code ne sont applicables »
En l’espèce, aux termes des dispositions du code de l’environnement qui régissent le statut des établissements publics nationaux de gestion et d’aménagement de parcs nationaux, le Conseil d’Etat a considéré que l’établissement public du parc national de Port-Cros était placé sous la tutelle de l’Etat, en l’occurrence le ministre chargé de la protection de la nature ; et devait être regardé, au sens et pour l’application des dispositions précitées de l’article L. 2122-1-3 du CGPPP, comme soumis à la surveillance directe de l’Etat.
Ainsi, l’arrêté attaqué, indépendamment du fait qu’il ait été sollicité par l’établissement public du parc national de Port-Cros, pouvait être délivré à l’amiable sans procédure de publicité / mise en concurrence.
2 En second lieu, sur le deuxième point, le Conseil d’Etat rappelle que toute autorisation d’occupation temporaire du domaine public maritime accordée pour l’aménagement, l’organisation et la gestion d’une ZEML doit respecter les prescriptions domaniales suivantes :
- les règles et conditions fixées par les articles L. 2124-5, R. 2124-40 et R. 2124-52 du CGPPP, dont il ressort que l’occupation ne doit pas être de nature à entrainer « l’affectation irréversible du site »
- les impératifs prévus à l’article L. 2124-1 du CGPPP, comprenant, entre autres, la prise en compte de la vocation des zones, la préservation des sites et paysages littoraux, la compatibilité avec les objectifs environnementaux du plan d’action pour le milieu marin
En sus de ces prescriptions, les juge du palais Royal considèrent que ces autorisations sont également soumises aux dispositions du code de l’urbanisme relatives à l’occupation du sol (et ce même si on est sur l’eau donc) !
Le Conseil d’Etat fonde son raisonnement en rappelant que dans les communes littorales – définies à l’article L. 321-2 du code de l’environnement – , l’article L. 121-23 du code de l’urbanisme impose que les décisions relatives à l’occupation et à l’utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, les sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques desquels, il dénombre les parties naturelles des parcs nationaux (cf. R. 121-4 du code de l’urbanisme).
Par suite, le Conseil d’Etat considère qu’une autorisation d’occupation du domaine public maritime en vue de la création, l’aménagement et la gestion d’une ZMEL est une décision relative à l’occupation et à l’utilisation des sols, de sorte que lorsque la ZMEL est implantée dans un des espaces et milieux à préserver au sens de l’article L. 121-23 du code de l’urbanisme, l’autorisation doit respecter les prescriptions du code de l’urbanisme applicables à ces décisions.
En jugeant que ces prescriptions du code de l’urbanisme n’étaient pas applicables, la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit, de sorte que le Conseil d’État a annulé son arrêt et renvoyé l’affaire devant elle.
En conclusion :
- une autorisation du domaine public peut être délivrée à l’amiable à un établissement public de gestion et d’aménagement d’un parc national qui a préalablement sollicité l’octroi de ce titre ;
- l’autorisation d’occupation du domaine public maritime en vue de la création d’une ZMEL située dans un espace à préserver, au sens de l’article L. 121-23 du code de l’urbanisme, d’une commune littorale doit respecter les prescriptions fixées par le CGPPP et, en sus, les prescriptions prévues par le code de l’urbanisme en matière de préservation de cet espace
References
1. | ↑ | Code général de la propriété des personnes publiques |