Rejet d’un référé-suspension dans le cadre de deux arrêtés portant permis de construire et autorisation d’exploitation d’une unité de méthanisation de biodéchets

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

June 2021

Temps de lecture

3 minutes

CE 26 mai 2021, req. n° 436902 : mentionné dans les tables du recueil Lebon

Par deux arrêtés préfectoraux en date du 14 février 2019 et du 15 mai 2019, la préfète de Seine-et marne a, d’une part, accordé un permis de construire portant sur la construction d’une unité de méthanisation de déchets non dangereux, et, d’autre part, autorisé l’exploitation de ladite unité ainsi que d’une unité de déconditionnement de biodéchets et à procéder à l’épandage de digestats issus du procédé de méthanisation, ensemble à la société Centre de valorisation organique de Seine-et-Marne (CVO 77).

Trois particuliers, ainsi que l’association Ovide ont alors saisi le tribunal administratif de Melun en annulation de ces deux arrêtés. Ils ont, en outre, saisi le juge des référés en suspension desdits arrêtés dans l’attente que le juge administratif statue au fond sur la légalité des deux arrêtés litigieux.

  • La présomption d’urgence en matière d’autorisation d’urbanisme, une présomption simple

L’article L. 600-3 du code de l’urbanisme prévoit que, dans le cadre d’un recours contre une autorisation d’urbanisme, le caractère urgent qui conditionne la recevabilité d’un référé-suspension est présumée satisfaite.

Il s’agit cependant d’une présomption simple, de sorte qu’elle peut être renversée 1)A titre d’illustration : CE 29 juin Société Arcaro et société Au Cap de Bonne Espérance, req. n° 435356.. Le juge administratif réalise traditionnellement une mise en balance des intérêts en confrontant l’urgence du demandeur à obtenir la suspension de l’acte litigieux, et le préjudice que subirait l’Administration ou les tiers si celui-ci était suspendu 2)CE 28 février 2001 Préfet des Alpes-Maritimes et Société Sud-est assainissement, req. n° 229562., afin de déterminer si la présomption est acquise ou non.

Le Conseil d’Etat nous en donne une nouvelle illustration dans la présente décision.

En l’espèce, le juge des référés considère qu’il existe un intérêt public s’attachant à l’exécution de l’arrêté préfectoral. En effet, l’unité de méthanisation est vouée à remplacer une porcherie, qui causent de fortes nuisances olfactives. En outre, elle doit contribuer à la réduction des émisses de gaz à effet de serre et permettre le traitement et la valorisation de biodéchets.

A contrario, le juge relève que les requérants ne démontrent pas que les nuisances créées par le projet seraient supérieures à celles actuellement subies du fait de la porcherie.

Ces éléments sont donc bien de nature à renverser la présomption d’urgence prévue à l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme.

  • L’impossibilité pour le juge des référés de rendre son ordonnance en raison de la réouverture de l’instruction du fait de la communication de nouveaux mémoires

Le Conseil d’Etat vient préciser les conséquences de la communication d’un mémoire après la clôture de l’instruction.

A ce titre, il résulte des dispositions combinées des articles L. 5, L. 522-1 et R. 522-8 du code de justice administrative que, dans le cadre d’un référé, lorsque le juge décide de communiquer, postérieurement à la clôture de l’instruction, un mémoire, qu’il ait été produit avant ou après celle-ci, alors le juge doit être regardé comme ayant rouvert l’instruction. A cet égard, le juge précise en l’espèce qu’« il lui appartient, en pareil cas, sauf à fixer une nouvelle audience, d’informer les parties de la date et, le cas échéant, de l’heure à laquelle l’instruction sera close. Il ne saurait, en toute hypothèse, rendre son ordonnance tant que l’instruction est en cours sans entacher la procédure d’irrégularité ».

Or, postérieurement à l’audience en date du 11 octobre 2019, le juge des référés, qui avait informé les parties que l’instruction serait close conformément à l’article R. 522-8 du code de justice administrative 3)En vertu de ces dispositions, « l’instruction est close à l’issue de l’audience, à moins que le juge des référés ne décide de différer la clôture de l’instruction à une date postérieure dont il avise les parties par tous moyens »., a communiqué de nouveaux mémoires aux parties les 21 et 22 octobre, rouvrant ainsi l’instruction.

Ainsi, en rendant son ordonnance le 15 novembre 2019 alors que l’instruction n’était pas close, le juge des référés a entaché la procédure d’irrégularité.

 

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References   [ + ]

1. A titre d’illustration : CE 29 juin Société Arcaro et société Au Cap de Bonne Espérance, req. n° 435356.
2. CE 28 février 2001 Préfet des Alpes-Maritimes et Société Sud-est assainissement, req. n° 229562.
3. En vertu de ces dispositions, « l’instruction est close à l’issue de l’audience, à moins que le juge des référés ne décide de différer la clôture de l’instruction à une date postérieure dont il avise les parties par tous moyens ».

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