Une demande de pièces complémentaires exigibles même inutiles empêche l’obtention d’un permis tacite

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

February 2025

Temps de lecture

3 minutes

CE 4 février 2025, req. n°494180 : mentionné aux tables du recueil Lebon

Par cette décision, le Conseil d’Etat prend une position surprenante concernant les demandes de complétude des services instructeurs saisis de demandes d’autorisation d’urbanisme. S’il considère classiquement que la demande relative à l’une des pièces qui peuvent être exigées en application du livre IV du code de l’urbanisme fait obstacle à la naissance d’un permis tacite à l’expiration du délai d’instruction, il ajoute que la circonstance que la pièce ait pu être inutile étant sans incidence à cet égard.

1.- Au cas présent, les propriétaires d’une maison située dans la commune de Contes avaient demandé un permis de construire dans le but de régulariser une extension de 57 m² réalisée sans autorisation.

Cette demande a toutefois été rejetée, tout comme le recours gracieux qui en a suivi.

Les propriétaires ont alors saisi le juge des référés d’une requête en référé suspension laquelle a abouti puisque le tribunal a suspendu l’arrêté de refus et enjoint le maire de réexaminer la demande de permis de construire dans un délai de six semaines.

2.- Pour rappel, le point de départ du délai d’instruction d’une demande d’autorisation de construire correspond à la réception du dossier complet en mairie 1)Article R.423-19 du code de l’urbanisme.

Le dossier est réputé complet si l’autorité compétente n’a pas, dans un délai d’un mois à compter du dépôt du dossier, notifié au demandeur une liste des pièces manquantes 2)Article R.423-22 du code de l’urbanisme.

A cet égard :

  • l’article R.423-41 du code de l’urbanisme précise qu’une demande de pièce manquante notifiée après la fin du délai d’un mois ou ne portant pas sur l’une des pièces énumérées par le code de l’urbanisme n’a pas pour effet de modifier le délai d’instruction ;
  • le Conseil d’Etat a précisé dans une décision Commune de Saint‑Herblain 3)Conseil d’Etat 9 décembre 2022 Commune de Saint‑Herblain, req. n°454541 que le délai d’instruction n’est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n’est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l’urbanisme de sorte qu’une décision tacite naît à l’expiration du délai d’instruction sans qu’une telle demande puisse y faire obstacle.

Cela étant, lorsque la demande de pièce complémentaire est formulée dans le délai d’un mois et porte sur des pièces exigibles, une décision tacite de rejet de la demande de permis de construire naît à l’expiration d’un délai de trois mois en l’absence de production par le pétitionnaire des pièces complémentaires sollicitées par la commune 4)Voir l’article R.423-39 du code de l’urbanisme et CE 30 avril 2024 M.B. req. n°461958.

3.- En l’espèce, après avoir rappelé ces principes, le Conseil d’Etat constate que la demande de pièces complémentaires formulée par la ville de Contes sur le permis de construire litigieux portait :

  • d’une part sur la superficie exacte de la parcelle située en zone « UD » ne correspondant pas à une pièce mentionnée au livre IV de la partie réglementaire du code de l’urbanisme,
  • et d’autre part, sur la lettre du préfet relative au défrichement des parcelles laquelle fait partie des pièces qui peuvent être exigée dans le cadre de l’instruction du permis de construire.

Il en conclut que la demande de cette dernière pièce a fait obstacle à la naissance d’un permis de construire tacite. La Haute juridiction a ainsi censuré l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice.

Le fichage du Recueil retient le terme d’inutilité de la pièce demandée.

Il faut retenir de cette décision que la circonstance qu’une pièce mentionnée au livre IV du code de l’urbanisme peut donc être légalement demandée quand bien même elle est inutile dans le cadre du permis sollicité.

 

 

 

 

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References   [ + ]

1. Article R.423-19 du code de l’urbanisme
2. Article R.423-22 du code de l’urbanisme
3. Conseil d’Etat 9 décembre 2022 Commune de Saint‑Herblain, req. n°454541
4. Voir l’article R.423-39 du code de l’urbanisme et CE 30 avril 2024 M.B. req. n°461958

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