Résiliation d’une délégation de service public : précisions sur les conditions de reprise par la personne publique des engagements du délégataire

Catégorie

Contrats publics

Date

January 2015

Temps de lecture

3 minutes

CE Sect. 19 décembre 2014 commune de Propriano, req. n° 368294

Par une convention de délégation de service public en date du 5 mars 2003, la commune de Propriano avait confié à la société Yacht Club International du Valinco la construction et l’exploitation de son port de plaisance.

En raison de fautes commises par le délégataire, la commune a décidé de résilier la convention par une délibération du 4 septembre 2007, la commune se substituant ainsi à la société délégataire.

M. A, usager du port, a introduit un recours devant le tribunal administratif de Bastia afin que la commune soit condamnée à l’indemniser du préjudice né de l’inexécution du contrat de garantie d’usage d’un poste d’amarrage de longue durée qu’il avait conclu avec la société Yacht Club International du Valinco.

Par un jugement du 24 mars 2011, le tribunal administratif de Bastia a rejeté ce recours.

Par un arrêt du 5 mars 2013, la cour administrative d’appel de Marseille a, néanmoins, annulé ce jugement et fait droit à la demande de M. A.

Saisi d’un pourvoi introduit par la commune de Propriano, le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la cour et, jugeant au fond, rejette la demande de M. A.

Dans un premier temps, la Haute juridiction rappelle que :

« sans préjudice des dispositions législatives applicables notamment en matière de transfert de contrat de travail, qu’en cas de résiliation d’un contrat portant exécution d’un service public, quel qu’en soit le motif, la personne publique, à laquelle il appartient de garantir la continuité du service public et son bon fonctionnement, se substitue de plein droit à son ancien cocontractant pour l’exécution des contrats conclus avec les usagers ou avec d’autres tiers pour l’exécution même du service ; qu’il n’en va toutefois ainsi que si les contrats en cause ne comportent pas d’engagements anormalement pris, c’est-à-dire des engagements qu’une interprétation raisonnable du contrat relatif à l’exécution d’un service public ne permettait pas de prendre au regard notamment de leur objet, de leurs conditions d’exécution ou de leur durée, à moins que, dans ce cas, la personne publique n’ait donné, dans le respect de la réglementation applicable, son accord à leur conclusion ».

Dans un second temps, le Conseil d’Etat précise que « pour l’application de ces règles, la substitution de la personne publique n’emporte pas le transfert des dettes et créances nées de l’exécution antérieure des contrats conclus par l’ancien cocontractant de la personne publique, qu’il s’agisse des contrats conclus avec les usagers du service public ou de ceux conclus avec les autres tiers ».

Ainsi, en cas de résiliation d’une délégation de service public, la personne publique se substitue au délégataire pour l’exécution des contrats conclus avec les usagers et les tiers, sous réserve que les engagements pris par l’ancien cocontractant ne comportent pas d’engagement anormalement pris au regard de leur objet, des conditions de leur exécution ou de leur durée.

Le Conseil d’Etat juge donc que la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit en retenant :

► d’une part, que la commune devait venir aux droits de la société Yacht Club International du Valinco dans l’ensemble de ses rapports avec les usagers du port dès lors que la DSP avait été résiliée; et

► d’autre part, la commune ne pouvait se prévaloir de ce que le contrat conclu entre la société délégataire et M. A, le requérant, ne pouvait être regardé comme un engagement normalement pris pour l’exploitation du service public.

Au regard des dispositions contractuelles de la convention de délégation de service public en cause, le Conseil d’Etat estime que les engagements pris par la société Yacht Club International du Valinco envers M. A ne sont pas des engagements qu’une interprétation raisonnable permettait de prendre pour l’exploitation du service, que ce soit concernant le montant des redevances fixées par l’ancienne société délégataire que pour la garantie d’usage de postes d’amarrage.

Par conséquent, le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la cour administrative d’appel et conclut au rejet des demandes de M. A.

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