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CE 30 avril 2024, req. n° 465124 : mentionné aux Tab. Rec. CE.
Quelles sont les limites du principe du contradictoire en matière de contentieux administratif ?
L’article L. 5 du décalogue du code de justice administrative érige cette exigence en principe innervant la procédure administrative contentieuse :
« L’instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l’urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes ».
Ce principe essentiel de la procédure contentieuse s’impose même sans texte, et « le juge administratif est tenu de ne statuer, conformément aux principes généraux de la procédure, qu’au vu des seules pièces du dossier qui ont été communiquées aux parties » (CE 4 juin 2008, req. n° 301776 : mentionné aux Tab. Rec. CE).
Le juge peut-il cependant fonder sa décision – en plus des pièces produites par les parties – sur le site Internet Géoportail sans mettre à même les parties de discuter les données sur lesquels il s’appuie ?
Se fondant sur le principe du contradictoire qui ne connaît que de très rares exceptions, le rapporteur public Maxime Boutron s’opposait à une telle possibilité dans l’affaire réunissant les 5e et 6e chambres de la section du contentieux du Conseil d’Etat (cf. les conclusions en ligne).
En sens contraire, le Conseil d’Etat l’admet dans sa décision du 30 avril 2024 dans laquelle il confirme la régularité de la consultation par la cour administrative d’appel de Marseille du site Géoportail (qu’elle vise explicitement dans son arrêt : CAA Marseille 19 avril 2022, req. n° 18MA03975) afin d’apprécier notamment si un terrain était ou non situé dans une partie urbanisée d’une commune et ce « pour conforter son appréciation des pièces du dossier ».
Pour le Conseil d’Etat, cela n’entache pas la décision juridictionnelle d’une irrégularité tenant à la méconnaissance du principe du contradictoire en se fondant sur ces « données publiques de référence produites par l’Institut géographique national et librement accessibles au public sur le site internet geoportail.gouv.fr ».
Il n’appartenait donc pas au juge de les communiquer aux parties.