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CE 18 novembre 2024 Sté L’immobilière Groupe Casino, req. n° 470716 : Rec. CE Tables.
Par une délibération du 18 octobre 2018, le conseil municipal de Lorient a approuvé la modification n° 3 du plan local d’urbanisme de la commune relative à la modification du zonage et à l’ouverture à l’urbanisation d’un terrain d’une superficie d’environ 10 hectares, classé antérieurement en zone 2 AUi, pour le développement du pôle commercial de Kérulvé. En la classant en zone 1 AUi, elle souhaitait y permettre le développement d’activités commerciales sur 3 000 m² de surface de plancher ainsi que 8 hectares d’activités artisanales ou industrielles.
La société L’Immobilière Groupe Casino, propriétaire de locaux commerciaux au sein du centre commercial Lorient Larmor, et la société Uranie, propriétaire de locaux commerciaux au sein du centre commercial Géant Casino, ont demandé au tribunal administratif de Rennes d’annuler cette délibération. Par un jugement du 4 juin 2021, le tribunal administratif a rejeté leur demande. La cour administrative d’appel a rejeté leur demande à son tour.
La société L’Immobilière Groupe Casino et la société Uranie se sont pourvues en cassation devant le Conseil d’Etat.
Les zones à urbaniser, dites zone « AU », sont définies à l’article R. 151-20 du code de l’urbanisme qui distingue deux situations, en fonction de l’existence ou non de voies ouvertes au public et de réseaux d’eau, d’électricité et d’assainissement d’une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans la zone en question. Les zones « 1 AU » correspondent ainsi à des zones comportant de tels réseaux. A l’inverse, quand ces réseaux n’existent pas encore, l’ouverture à l’urbanisation de la zone est subordonnée à une modification ou à une révision du PLU comportant notamment les orientations d’aménagement et de programmation, correspondant ainsi aux zones « 2 AU ». « L’ouverture à l’urbanisation » consiste alors à faire passer une zone préalablement identifiée dans le PLU, d’un classement en zone « 2 AU » à un classement en zone « 1 AU ».
C’est en ce sens que la commune de Lorient avait opté pour la mise en place d’une procédure de modification de son plan local d’urbanisme, pour classer le terrain en cause en zone « 1 AU ».
Or, l’article L. 153-31 4° du code de l’urbanisme prévoyait, dans sa rédaction alors en vigueur, que la décision de la commune ou de l’EPCI « d’ouvrir à l’urbanisation une zone à urbaniser qui, dans les neuf ans suivant sa création, n’a pas été ouverte à l’urbanisation ou n’a pas fait l’objet d’acquisitions foncières significatives de la part de la commune ou de l’EPCI compétent, directement ou par l’intermédiaire d’un opérateur foncier » était quant à elle soumise à la procédure de révision. Ce délai de neuf ans a depuis été ramené à six ans.
Il convenait donc de savoir si le délai de neuf ans précité était, ou non expiré, afin de déterminer la légalité de la délibération entreprise.
Le Conseil d’Etat considère que le législateur a entendu prévenir la constitution de réserves foncières dépourvues de projet d’aménagement et inciter les EPCI et les communes à définir et mettre en œuvre dans le délai de neuf ans les orientations d’aménagement et de programmation pour les zones identifiées par le PLU comme étant à urbaniser, ainsi que cela ressort des travaux parlementaires préalables à l’adoption de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 qui a introduit l’article L. 153-31 dans le code de l’urbanisme.
Il en résulte que le délai de neuf ans (aujourd’hui 6 ans) qu’il prévoit court, soit à compter du classement initial comme zone à urbaniser du secteur en cause, soit, le cas échéant, à compter d’une révision ultérieure du PLU portant, notamment par l’adoption d’un nouveau projet d’aménagement et de développement durables (PADD), sur un projet d’aménagement pour ce secteur.
Ainsi, n’a pas commis d’erreur de droit la cour administrative d’appel ayant relevé que, par une délibération du 19 décembre 2013, la commune de Lorient avait approuvé la révision générale de son PLU, emportant notamment l’élaboration d’un nouveau PADD et de nouveaux règlements écrit et graphique, pour en déduire que, eu égard à l’ampleur des modifications du parti d’aménagement induites par cette révision générale, qui a concerné l’ensemble du territoire communal, ainsi qu’à la refondation des différents documents composant le PLU qu’elle a emportée, c’était à la date de l’approbation de cette révision générale qu’il convenait de fixer le point de départ du délai de neuf années prévu par les dispositions précitées du 4° de l’article L. 153-31 du code de l’urbanisme.