Commune carencée en logement social : Le Conseil d’Etat précise la portée de l’obligation de construire plus de 30 % de logements locatifs sociaux en application de l’article L. 111-24 du code de l’urbanisme

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

February 2025

Temps de lecture

3 minutes

CE 11 février 2025 Ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires, req. n° 491009 : mentionné aux tables du recueil Lebon

Par une décision rendue le 11 février 2025, le Conseil d’Etat est venu préciser les règles d’application du seuil imposant la réalisation de logements sociaux dans les opérations de constructions d’immeubles collectifs au sein d’une commune faisant l’objet d’un arrêté de carence au titre de l’article L. 302-9-1 du code de la construction et de l’habitation.

Pour rappel, la loi n° 2000-1218 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU) a créé l’obligation pour les communes de plus de 3 500 habitants, ou plus de 1 500 en Ile-de-France, et comprises dans une agglomération de plus de 50 000 habitants comportant au moins une commune de plus de 50 000 habitants, de disposer d’au moins 20% de logements sociaux.

Aux termes d’une période triennale échue, une commune peut faire l’objet d’un arrêté de carence pris par le préfet si elle n’a pas atteint pas les objectifs susvisés.

En cas d’arrêté de carence pris par le préfet, et conformément à l’article L. 111-24 du code de l’urbanisme, dans toute opération de construction d’immeubles collectifs de plus de douze logements ou de plus de 800 m² de surface de plancher (SDP), au moins 30 % des logements familiaux sont des logements locatifs sociaux définis à l’article L. 302-5, hors logements financés avec un prêt locatif social.

Les logements familiaux sont constitués de l’ensemble des logements à l’exclusion des logements-foyer définis à l’article L. 633-1 du code de la construction et de l’habitation 1)Rép. min. no 54158: JOAN 5 août 2014, p. 6773; RDI 2014. 491..

En l’espèce, par un arrêté du 30 décembre 2020, le préfet du Val-de-Marne a constaté la carence de la commune de Saint-Maur-des-Fossés dans la production de logements sociaux et a décidé, comme le permet les dispositions de l’article L. 302-9-1du CCH, que la délivrance des permis de construire relèverait désormais de sa compétence, à l’exception des opérations créant 3 logements ou moins.

C’est dans ce contexte, que par un arrêté du 14 décembre 2024, le préfet du Val-de-Marne a refusé de délivrer un permis de construire portant sur la construction d’un immeuble comportant 10 logements (759 m² de SDP), trois commerces et onze parkings (175 m² de SDP) pour une SDP totale de 934 m². Le préfet a considéré que le projet méconnaissait les dispositions de l’article L. 111-24 du code de l’urbanisme puisqu’il ne prévoyait pas la réalisation de logements locatifs sociaux.

La société pétitionnaire a donc introduit un recours pour excès de pouvoir à l’encontre de cet arrêté, lequel a été annulé par le Tribunal administratif de Melun dans un jugement du 3 octobre 2023 2) TA Melun 3 octobre 2023, req. n° 2300765. En effet, le juge a considéré que le seuil de 800 m² mentionné à l’article L. 111-24 du code de l’urbanisme s’appréciait, quelle que soit la destination principale de l’immeuble, au regard de la seule surface de plancher du projet dédié aux logements.

Le Conseil d’Etat, dans la décision commentée, considère que le tribunal administratif de Melun n’a pas commis d’erreur de droit et, par la même occasion, vient préciser le champ d’application relativement strict de l’article L. 111-24 du code de l’urbanisme :

  • Premièrement, une opération de construction d’immeubles collectifs dans les communes faisant l’objet d’un arrêté de carence doit affecter au moins 30 % des logements familiaux à du logement locatif social :
    • Soit lorsqu’il comporte plus de 12 logements ;
    • Soit lorsqu’il consacre plus de 800 m² à l’habitation ; à ce titre, le Conseil d’Etat précise que le seuil de 800 m² s’apprécie au regard « de la seule surface de plancher du projet dédié aux logement » et non au regard de la SDP totale de l’opération.
  • Deuxièmement, la part de 30% de logements locatifs sociaux s’applique au nombre de logements familiaux dans le projet et ce, « sans considération de la part que présente leur surface au sein de la surface totale dédiée à l’habitation dans l’immeuble ». En d’autres termes, la proportion de 30 % de logements locatifs sociaux s’applique au nombre de logements familiaux figurant dans le projet, sans considération de la part que représente leur surface au sein de la surface totale dédiée à l’habitation dans l’immeuble.

Au cas présent, les mètres carrés consacrés aux commerces et aux parkings ne devaient pas entrer dans le calcul du seuil de 800 m² de sorte qu’avec une surface de plancher affectée au logement inférieure à 800 m² (à savoir 759 m²), le programme en question n’était donc pas soumis à l’obligation de mixité sociale.

 

 

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References   [ + ]

1. Rép. min. no 54158: JOAN 5 août 2014, p. 6773; RDI 2014. 491.
2. TA Melun 3 octobre 2023, req. n° 2300765

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