Publication du rapport de la commission sénatoriale sur l’efficacité de la commande publique

Catégorie

Contrats publics

Date

September 2025

Temps de lecture

4 minutes

Commission d’enquête sur les coûts et les modalités effectifs de la commande publique et la mesure de leur effet d’entraînement sur l’économie française

💡 Efficacité de la commande publique

Le 8 juillet 2025, la commission d’enquête du Sénat a remis son rapport sur « les coûts et les modalités effectifs de la commande publique et la mesure de leur effet d’entraînement sur l’économie française ». Présidée par Simon Uzenat, avec Dany Wattelbled comme rapporteur, ce document de plus de 400 pages dresse un état des lieux critique de la commande publique et formule 67 propositions pour en améliorer l’efficacité.

Cette initiative intervient dans un contexte où la révision des directives européennes en matière de marchés publics est attendue et alors que la commande publique représente 14 % du PIB français – soit environ 400 milliards d’euros selon l’Union européenne.

  • Une gouvernance à refonder

Première alerte du rapport : l’absence de pilotage clair au niveau national. Ni la direction des achats de l’État (DAE), ni la direction de l’offre de soins (DGOS), ou encore la direction des affaires juridiques (DAJ) des ministères économiques et financiers et le commissariat général au développement durable (CGDD) ne jouent ce rôle stratégie.

    • Proposition phare : confier le pilotage de la commande publique au Premier ministre, tout en y associant davantage le Parlement à l’occasion d’un débat annuel consacré à la politique d’achat de l’État.
  • Un levier sous-utilisé pour la transition écologique et sociale

La commande publique est souvent présentée comme un outil puissant pour accompagner les transitions écologiques et sociales. Toutefois, le rapport souligne le manque d’exemplarité de l’Etat et les difficultés d’application des mesures environnementales par les acheteurs publics, notamment à l’approche de l’entrée en vigueur pour tous les pouvoirs adjudicateurs de la loi « Climat et résilience » à partir du 22 août 2026.

    • Parmi les recommandations qu’il formule, le rapport d’enquête suggère à l’Etat de fournir aux acheteurs des outils d’analyse du coût du cycle de vie des biens achetés.
  • La professionnalisation de la fonction « d’acheteur »

De manière générale, la commission relève que le secteur de la commande publique regorge de bonnes pratiques.

Toutefois, elle constate et regrette une forte disparité dans la professionnalisation de la fonction achat, principalement au détriment des plus petites collectivités qui peinent à faire face à cette montée en compétences : moins de 10 % des maires interrogés disent disposer d’un acheteur professionnel.

    • Pour remédier à cette situation, la commission appelle de ses vœux une meilleure formation des acheteurs publics, par exemple via des programmes universitaires dédiés, la simplification des procédures de mutualisation des achats – notamment au niveau intercommunal – ou encore, la revalorisation du rôle des commissions d’appel d’offres (CAO).

Par ailleurs, 84 % des élus locaux interrogés disent redouter le risque pénal, ce qui freine les initiatives. La commission appelle donc à une stabilisation et à une simplification de la réglementation.

  • Souveraineté numérique : le décalage entre le discours et les actes

Le rapport dénonce le manque de cohérence de l’Etat dans la protection des données sensibles, en particulier lorsqu’il s’agit de soutenir les acteurs européens du cloud. Dans un contexte géopolitique tendu, la commission d’enquête appelle le gouvernement français à garantir les souverainetés numériques française et européenne.

    • Les recommandations sont claires, parmi elles : recourir à des solutions d’hébergement souveraines comme le « SecNumCloud », reconnaître le caractère sensible des données produites et détenues par les personnes publiques, introduire une clause de non-soumission aux législations extraterritoriales étrangères dans tous les marchés publics comportant des prestations d’hébergement de données publiques ou encore, insister sur l’impérativité d’appliquer la doctrine du « cloud au centre ».
  • L’instauration d’un principe de préférence européenne

Face à des pays qui assument leur protectionnisme économique, comme les Etats-Unis à travers le Buy American Act, la commission appelle les décideurs politiques à une préférence européenne.

    • La commission propose que cette préférence se traduise par l’adoption d’un Small Business Act européen réservant aux PME une part d’au moins 30 % en valeur des marchés publics passés par l’ensemble des pouvoirs adjudicateurs.
  • Soutenir nos entreprises

La commission d’enquête souligne « l’inadéquation » qui existe entre la structure de la procédure d’appel d’offres et les particularités des start-ups. Elle regrette que seuls 1,5 milliards d’EUR de la commande publique en 2022 aient été versés à des start-ups.

    • Parmi les propositions : élever les seuils de publicité et de mise en concurrence pour les marchés innovants, alléger les contraintes administratives, rappeler le rôle crucial que doivent jouer les centrales d’achat comme l’UGAP dans l’appui des filières économiques françaises et européennes
  • Simplifier et booster la commande publique

Du côté des acheteurs

La commission relève que l’enchevêtrement et la complexité des règles de la commande publique pèsent sur les acheteurs. Le rapport suggère alors de supprimer les procédures adaptées, de supprimer l’obligation de publication au Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) au profit du seul Journal officiel de l’Union européenne (JOUE) et d’ouvrir à tous les pouvoirs adjudicateurs le recours à la procédure formalisée avec négociation, sans condition.

Du côté des entreprises

Le rapport alerte sur la crainte qu’ont les acheteurs de recourir aux variantes et l’impact délétère des retards de paiement, notamment pour les TPE et PME.

    • Pour y remédier, plusieurs propositions sont envisagées : faire de l’autorisation des variantes le principe, automatiser le versement d’intérêts moratoires en cas de retards de paiement relevant de la responsabilité de l’ordonnateur, communiquer auprès des acheteurs publics sur les conséquences économiques des retards de paiement pour les entreprises ou encore, rendre obligatoire la publication de la méthode de notation des offres.
  • Une commande publique plus transparente

Enfin, la commission appelle à un accès exhaustif, centralisé et exploitable des données de l’achat public. Pour l’heure, la commission estime en effet que la remontée d’informations sur les marchés publics de l’Etat est lacunaire.

    • Elle propose de recenser tous les marchés publics dans une base statistique nationale, de rendre plus accessibles les données de l’Observatoire économique de la commande publique et de développer, chez les acheteurs publics, la programmation des achats et sa publicité.

 

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