Article R. 600-1 du code de l’urbanisme : application de l’obligation de notification aux recours introduits à l’encontre de décisions de refus de retrait de permis de construire

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

October 2022

Temps de lecture

4 minutes

CE 27 septembre 2022 François B. et autres, req. n° 456071 : Rec. CE Tables

Par arrêté du 27 juillet 2016, un permis de construire valant permis de démolir portant sur la réalisation de vingt logements répartis en deux bâtiments a été délivré par le maire de Toulouse à la société Sogeprom Sud Réalisation. Un permis de construire modificatif portant sur ce projet a ensuite été accordé le 16 avril 2018.

Des riverains, dont Monsieur François B., ont sollicité le retrait du permis initial auprès du maire de Toulouse. La légalité de la décision de refus du maire opposée à cette demande de retrait a ensuite été contestée devant le tribunal administratif de Toulouse.

Par jugement du 5 mars 2021, les juges du fond ont refusé d’accueillir ce recours. Les requérants ont alors interjeté appel devant la Cour administrative d’appel de Bordeaux. Celle-ci a toutefois décidé, par ordonnance du 27 août 2021, de renvoyer la requête au Conseil d’Etat, en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative.

A l’occasion de la décision commentée, le Conseil d’Etat rappelle que les jugements portant sur la légalité des décisions de refus de retrait de permis de construire des bâtiments à usage d’habitation, en zone tendue, sont rendus en premier et dernier ressort (1) et considère que les recours introduits à l’encontre de décisions de refus de retrait de permis de construire doivent être notifiés à l’auteur de l’acte ainsi qu’au bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme (2).

1.     Jugement en premier et dernier ressort de la légalité des décisions de refus de retrait de permis de construire des bâtiments à usage d’habitation en zone tendue

L’article L. 811-1-1 du code de justice administrative, dans sa version applicable au litige, prévoyait pour certains contentieux, une suppression temporaire de l’appel. Ainsi, les tribunaux administratifs statuent en premier et dernier ressort sur les recours contre les permis de construire ou de démolir un bâtiment à usage principal d’habitation ou contre les permis d’aménager un lotissement lorsque le bâtiment ou le lotissement est implanté en tout ou partie sur le territoire d’une des communes situées en zone tendue 1)Article 232 du code général des impôts.. La commune de Toulouse est identifiée au nombre de ces communes, au sein de l’annexe du décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l’article 232 du code général des impôts.

Dans la décision commentée, le Conseil d’Etat rappelle que les jugements portant sur la légalité des décisions de refus de retrait de permis de construire des bâtiments à usage d’habitation, en zone tendue, sont rendus en premier et dernier ressort.

Plus précisément, le considérant 3 reprend ainsi le principe dégagé dans une décision « Société immobilière Aire Saint-Michel », rendue le 26 avril dernier 2)CE 26 avril 2022 Société immobilière Aire Saint-Michel, req. n° 452695 : Rec. CE Tables, selon lequel : « [les dispositions de l’article L. 811-1-1 du code de l’urbanisme], qui ont pour objectif, dans les zones où la tension entre l’offre et la demande de logements est particulièrement vive, de réduire le délai de traitement des recours pouvant retarder la réalisation d’opérations de construction de logements ayant bénéficié d’un droit à construire, doivent être regardées comme concernant non seulement les recours dirigés contre des autorisations de construire, de démolir ou d’aménager, mais également, lorsque ces autorisations ont été accordées puis retirées, les recours dirigés contre ces retraits. Il en va de même des recours dirigés contre les refus de retraits ».

Le Conseil d’Etat se reconnaît donc compétent pour juger de l’affaire lui ayant été communiquée par la Cour administrative d’appel de Bordeaux, au motif qu’il s’agit d’un pourvoi en cassation introduit à l’encontre du jugement, rendu en premier et dernier ressort, ayant rejeté la demande d’annulation de la décision de refus de retrait du permis de construire des logements, en zone tendue.

A titre informatif, depuis le 1er septembre 2022, le champ des opérations visées par la suppression temporaire de l’appel – laquelle est étendue jusqu’au 31 décembre 2027 – a été réduit puisqu’il ne s’applique plus qu’aux projets portant sur plus de deux logements. Le champ des décisions concernées a en revanche été élargi puisqu’il englobe désormais les décisions de non oppositions à déclaration préalable et les décisions négatives que sont les refus de permis et oppositions à déclaration préalable 3)Articles 1 et 3 du décret n° 2022-929 du 24 juin 2022 portant modification du code de justice administrative et du code de l’urbanisme (parties réglementaires.

2.     Notification des recours introduits à l’encontre de décisions de refus de retrait de permis de construire à l’auteur de l’acte ainsi qu’au bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme

En application de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, en cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l’encontre d’un certificat d’urbanisme, ou d’une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cette obligation s’applique donc classiquement à l’encontre des permis de construire, mais pas uniquement.

Après plusieurs évolutions textuelles exposées par le Rapporteur public Philippe Ranquet dans ses conclusions sur l’affaire commentée, le Conseil d’Etat reconnaît finalement que l’obligation de notification des recours est applicable aux décisions de refus de retrait de permis de construire.

En effet, comme cela avait été jugé pour les décisions de refus de constater la caducité d’un permis de construire, ces décisions ont pour effet de confirmer la validité d’une décision valant autorisation d’occupation du sol 4)CE 27 mars 2000 Syndicat des copropriétaires de l’immeuble Le Lympia, req. n° 205430 : Rec. CE Tables.

A l’occasion de la décision analysée, le Conseil d’Etat rappelle aussi l’obligation du juge administratif, sous peine d’irrégularité du jugement, à inviter le requérant à fournir les preuves de la notification du recours introduit à l’auteur de la décision ainsi qu’au titulaire de l’autorisation.

Par conséquent, après avoir déclaré le jugement irrégulier, les juges ont déclaré les riverains irrecevables à agir du fait de la méconnaissance de l’obligation de notification du recours introduit à l’encontre de la décision de refus de retrait de permis de construire litigieuse, en application de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme.

 

Partager cet article

References   [ + ]

1. Article 232 du code général des impôts.
2. CE 26 avril 2022 Société immobilière Aire Saint-Michel, req. n° 452695 : Rec. CE Tables
3. Articles 1 et 3 du décret n° 2022-929 du 24 juin 2022 portant modification du code de justice administrative et du code de l’urbanisme (parties réglementaires
4. CE 27 mars 2000 Syndicat des copropriétaires de l’immeuble Le Lympia, req. n° 205430 : Rec. CE Tables

3 articles susceptibles de vous intéresser