Constitue un vice d’une particulière gravité relatif aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, l’erreur matérielle résultant du report, par le soumissionnaire, dans le devis descriptif estimatif détaillé d’une somme inférieure de moitié au montant réel de son offre

Catégorie

Contrats publics

Date

March 2015

Temps de lecture

3 minutes

CAA Marseille 2 février 2015 société Carats et société Carats Incendie, req. n° 13MA01294

La commune de Nice avait attribué, le 30 mars 2010, aux sociétés Carats et Carats Incendie un marché portant sur la mise à disposition de personnels de sécurité pour les spectacles et manifestations de la commune.

Le 8 avril 2010, la commune résiliait le marché. Les sociétés ont alors saisi le tribunal administratif de Nice d’une demande tendant à la condamnation de la commune de Nice au paiement d’une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation du contrat.

Par jugement en date du 8 janvier 2013, le tribunal administratif de Nice rejetait leur requête.

La cour administrative d’appel de Marseille, rappelle, conformément à la jurisprudence dite « Béziers I », l’office du juge lorsqu’il est saisi d’un « litige relatif à l’exécution d’un contrat » : il doit en priorité statuer dans le cadre du contrat, sauf dans l’hypothèse de l’irrégularité de ce dernier 1) CE 28 décembre 2009 Commune de Béziers, req. n° 304802 : « Considérant, en second lieu, que, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l’exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l’ exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d’office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d’une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel (…) »..

Au regard de cette jurisprudence, la cour va écarter l’application du contrat.

En l’espèce, l’attribution du marché litigieux avait pour critère unique de sélection des offres le critère du prix, lequel devait correspondre au montant résultant de l’application des prix du bordereau des prix unitaires aux quantités non contractuelles du devis descriptif estimatif détaillé (DDED). Ce document se présentait en deux colonnes, lesquelles concernaient respectivement le coût des prestations horaires de jour et le coût des prestations horaires de nuit, le montant total du DDED correspondant alors à la somme des deux colonnes.

L’offre des sociétés requérantes mentionnait un montant total de 131 460 euros, ce qui en faisait l’offre la « moins disante » pour la commune, au regard des offres des autres candidats, situées entre 150 000 et 170 000 euros.

La cour va toutefois relever que les sociétés appelantes ont commis une erreur en reportant la somme de 131 460 euros dans la case « montant total du devis » du formulaire DDED, alors que cette somme ne correspondait qu’au montant des prestations horaires de nuit. Le montant total du DDED était en réalité de 289 720 euros, soit plus du double de la somme reportée par les sociétés.

Pour la cour, compte tenu des effets d’une telle erreur, il s’agit d’un vice d’une particulière gravité :

    « L’erreur matérielle commise par les sociétés appelantes a ainsi eu une incidence sur le classement final des offres des candidats puisque le marché a été attribué aux candidats dont l’offre était la plus élevée ; que dans ces conditions, la conclusion du marché en litige résulte d’un vice d’une particulière gravité relatif aux conditions dans lesquelles la commune de Nice a donné son consentement qui est de nature à entraîner la nullité du contrat ».

Le contrat annulé, la responsabilité de la commune de Nice ne pouvait dès lors être engagée sur le fondement contractuel. La cour administrative d’appel de Marseille a ainsi confirmé le jugement rendu par le tribunal administratif de Nice.

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References   [ + ]

1. CE 28 décembre 2009 Commune de Béziers, req. n° 304802 : « Considérant, en second lieu, que, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l’exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l’ exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d’office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d’une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel (…) ».

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