Garantie décennale : la certitude que la solidité de l’ouvrage sera compromise par les désordres constatés engage la responsabilité des constructeurs, même si cette situation ne se réalise qu’après l’expiration du délai de garantie de 10 ans

Catégorie

Contrats publics

Date

July 2018

Temps de lecture

2 minutes

CE 15 juin 2018 Communauté de communes du Cher à La Loire, req. n° 417595

La communauté de commune du Cher à la Loire a entrepris en 2005 une opération de réhabilitation et d’extension de la piscine intercommunale. Après avoir réceptionné les travaux en 2009, la communauté de commune a constaté l’apparition de coulures de rouille le long des parois verticales intérieures de la piscine. A la suite d’une expertise judiciaires, la communauté de commune a saisi le juge des référés aux fins de condamnations des concepteurs mais aussi de la société en charge de la réalisation du lot « étanchéité » à lui verser une provision de 244 681,44 EUR TTC en réparation de ces désordres affectant la piscine.

Le tribunal a d’abord rejeté sa demande, mais la cour administrative d’appel de Nantes a annulé cette ordonnance et a au contraire condamné les sociétés au versement de la somme demandée par la communauté de commune. C’est l’arrêt à l’encontre duquel l’une des sociétés s’est pourvue en cassation. Elle soutenait qu’il n’était pas possible de déterminer à quelle échéance le phénomène d’oxydation constaté finirait par compromettre la solidité de l’ouvrage, que la compromission de la solidité de l’ouvrage pourrait ne devenir réalité qu’après l’expiration du délai de garantie de 10 ans, et que dès lors la responsabilité décennale ne pouvait pas être engagée.

Dans sa décision, le Conseil d’Etat rappelle que les principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs impliquent la réparation des désordres, apparus dans le délai d’épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l’ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, « même s’ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l’expiration du délai de dix ans. »  1) CE 15 avril 2015 Commune de Saint-Michel-sur-Orge, req. n°376229.

Certes, l’espèce posait la question de manière légèrement différente, puisque ce n’était pas exactement l’étendue des désordres qui n’avait pas été entièrement révélée dans ce délai de 10 ans, mais le fait même que ces désordres compromettent la solidité de l’ouvrage. Mais la Haute Juridiction confirme le raisonnement de la cour : dès lors que le processus d’aggravation de ce phénomène d’oxydation était inévitable, il engage bien la responsabilité des constructeurs, et ce même s’il n’aboutit à compromettre la solidité de l’ouvrage qu’après l’expiration du délai.

Cette solution consacre une approche efficace de la responsabilité décennale, qu’elle semble réserver aux situations dans lesquelles il est inéluctable que les désordres finissent par compromettre la solidité de l’ouvrage.

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