La délibération arrêtant le dossier définitif d’un projet d’aménagement préalablement à l’adoption de la déclaration d’utilité publique est un acte préparatoire insusceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

April 2016

Temps de lecture

3 minutes

CE 30 mars 2016 M. B., req. n° 383037, Mentionné dans les tables du recueil Lebon.

Le contentieux des procédures d’aménagement doit une part non-négligeable de ses développements récents à l’agglomération bordelaise, les opérations urbanistiques d’envergure qui s’y sont déroulées ayant à peu près toutes fait l’objet de recours devant le juge administratif ces dernières années.

Ce fut notamment le cas de la procédure d’adoption d’un schéma directeur de la desserte en transports en commun lancée en 2008 qui aboutit le 6 novembre 2009 à l’adoption de deux délibérations, l’une portant sur l’arrêt du projet définitif de développement du réseau de transports en commun, lequel actait la création d’une nouvelle ligne de tramway, l’extension de trois autres et la création d’une ligne tram-train, et l’autre, approuvant le principe de mesures d’aménagement en compensation des premiers effets du projet de développement du réseau.

M. B., un habitué des prétoires bordelais dans le cadre de la contestation des opérations d’aménagement susmentionnées, a saisi le juge administratif aux fins d’annulation de ces deux délibérations.

Ses requêtes ont été rejetées par voie d’ordonnance le 2 octobre 2012 par le président de la 1ère chambre du tribunal administratif, décision qui a été confirmée par la cour administrative de Bordeaux dans un arrêt du 3 juin 2014.

Saisie de l’affaire, la section du contentieux du Conseil d’Etat se devait de résoudre une question s’inscrivant dans le droit fil de la problématique qui l’avait conduite vingt ans auparavant à considérer que « la concertation prévue par les dispositions [de l’article L. 300-2 du code de l’urbanisme] (…) doit se dérouler avant que le projet ne soit arrêté dans sa nature et ses options essentielles et que ne soient pris les actes conduisant à la réalisation effective de l’opération, au nombre desquels figurent notamment les marchés de maîtrise d’œuvre de travaux, les déclarations d’utilité publique et les décisions arrêtant le dossier définitif du projet» (CE 6 mai 1996 association Aquitaine alternatives, req. n°121915, publié au recueil Lebon).

Plus précisément, il s’agissait pour la haute juridiction de déterminer si la délibération par laquelle un conseil municipal ou l’organe délibérant d’un établissement public de coopération intercommunale arrête le dossier définitif d’un projet d’aménagement en application de l’article L. 300-2 du code de l’urbanisme peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, étant précisé que la question valait essentiellement pour le principe dès lors que l’ordonnance n°2012-11 du 5 janvier 2012 portant clarification et simplification des procédures d’élaboration de modification et de révision des documents d’urbanisme a fait disparaître de l’article L. 300-2 l’exigence qu’une délibération arrête le dossier définitif du projet, le nouveau texte (aujourd’hui transposé à l’article L. 103-6) exigeant que « lorsque le projet fait l’objet d’une enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement, le bilan de la concertation est joint au dossier de l’enquête ».

On sait que, s’appuyant sur la décision d’assemblée Syndicat C.G.T. des hospitaliers de Bédarieux (CE 15 avril 1996, req. n°120273, publié au recueil Lebon), le juge administratif écarte traditionnellement les recours dirigés contre les délibérations s’analysant en des mesures préparatoires et ce nonobstant les vices propres dont celles-ci pourraient être entachées.

C’est cette position que va adopter le Conseil d’Etat dans la présente affaire en jugeant que la délibération qui arrête « le dossier définitif d’un projet d’aménagement, ne permet pas, par elle-même, la réalisation des opérations d’aménagement, lesquelles ne pourront être engagées qu’à la suite de leur déclaration d’utilité publique ou d’une autre décision de la réaliser ».

Si la décision n’explicite pas le motif intrinsèque de l’irrecevabilité des recours engagés à ce stade du projet d’aménagement, elle s’inscrit dans une logique où seuls les actes qui autorisent la réalisation effective du projet d’aménagement considérée sont susceptibles d’être attaqués devant le juge.

Dans le cadre d’une opération destinée à être déclarée d’utilité publique afin de permettre à son maître d’ouvrage de procéder aux acquisitions foncières nécessaires et, le cas échéant, à la mise en compatibilité du document d’urbanisme, la délibération litigieuse ne revêtait ainsi qu’un élément de la procédure d’élaboration de la DUP dont les vices ne pouvaient être contestés qu’à l’occasion des décisions mettant en œuvre cette dernière.

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