La suspension des délais concernant les QPC transmises aux hautes juridictions et au Conseil Constitutionnel

Catégorie

Droit administratif général

Date

April 2020

Temps de lecture

4 minutes

Loi organique n° 2020-365 du 30 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

La loi organique du 30 mars 2020 suspend les délais applicables à la procédure de question prioritaire de constitutionnalité jusqu’au 30 juin 2020.

Cette loi a ainsi pour article unique :

« Afin de faire face aux conséquences de l’épidémie du virus covid-19, les délais mentionnés aux articles 23-4, 23-5 et 23-10 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel sont suspendus jusqu’au 30 juin 2020.

La présente loi entrera en vigueur immédiatement et sera exécutée comme loi de l’Etat ».

Cette loi complète l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période 1)voir notre article sur le blog..

Les modifications apportées par cette loi organique d’urgence portent sur le fonctionnement de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) et plus précisément sur les dispositions applicables devant le Conseil d’Etat, la Cour de Cassation (article 23-4 et 23-5) et le Conseil Constitutionnel (article 23-10) 2)Créé par la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution.

En principe, la Cour de Cassation, ou le Conseil d’Etat, se prononce sur le renvoi d’une QPC au Conseil constitutionnel dans un délai de trois mois à compter de la réception de la transmission de cette QPC par une juridiction du fond 3)Art. 23-4 Ordonnance n° 58-1067 : « Dans un délai de trois mois à compter de la réception de la transmission prévue à l’article 23-2 ou au dernier alinéa de l’article 23-1, le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation se prononce sur le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. Il est procédé à ce renvoi dès lors que les conditions prévues aux 1° et 2° de l’article 23-2 sont remplies et que la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux »..

Lorsqu’une QPC est soulevée pour la première fois devant le Conseil d’Etat ou la Cour de Cassation, ils disposent également d’un délai de trois mois pour se prononcer sur le renvoi de cette question au Conseil Constitutionnel. Une fois le Conseil Constitutionnel saisi, le Conseil d’Etat ou la Cour de Cassation, sursoit à statuer jusqu’à ce qu’il se soit prononcé 4)Art. 23-5 ordonnance n° 58-1067 : « Le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l’occasion d’une instance devant le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation. Le moyen est présenté, à peine d’irrecevabilité, dans un mémoire distinct et motivé. Il ne peut être relevé d’office. / En tout état de cause, le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation doit, lorsqu’il est saisi de moyens contestant la conformité d’une disposition législative, d’une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d’autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur le renvoi de la question de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. /Le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation dispose d’un délai de trois mois à compter de la présentation du moyen pour rendre sa décision. Le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité dès lors que les conditions prévues aux 1° et 2° de l’article 23-2 sont remplies et que la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux. / Lorsque le Conseil constitutionnel a été saisi, le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation sursoit à statuer jusqu’à ce qu’il se soit prononcé. Il en va autrement quand l’intéressé est privé de liberté à raison de l’instance et que la loi prévoit que la Cour de cassation statue dans un délai déterminé. Si le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation est tenu de se prononcer en urgence, il peut n’être pas sursis à statuer »..

Enfin, le Conseil Constitutionnel doit statuer dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. Pendant ce délai, les parties sont invitées à échanger des mémoires écrits puis, seront convoquées à une audience de plaidoirie 5)Art. 23-10 ordonnance n° 58-1067 : « Le Conseil constitutionnel statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. Les parties sont mises à même de présenter contradictoirement leurs observations. L’audience est publique, sauf dans les cas exceptionnels définis par le règlement intérieur du Conseil constitutionnel »..

Par cette loi organique d’urgence, ces délais sont suspendus du 31 mars jusqu’au 30 juin 2020.

Ainsi, tous les délais qui avaient commencé à courir par la saisine des hautes juridictions ou du Conseil Constitutionnel, sont arrêtés. Ils ne recommenceront à courir qu’à compter du 1er juillet 2020 pour la durée restante lors de l’entrée en vigueur de la loi au 31 mars 2020 6)La loi est entrée en vigueur dès sa publication au JORF n° 0078 du 31 mars 2020..

Par exemple, si le Conseil d’Etat a été saisi le 31 janvier 2020 d’une demande de transmission d’une QPC, le Conseil d’Etat devra statuer le 31 juillet 2020 au plus tard. En effet, au 31 mars, 2 mois se seront écoulés et il restera un mois à compter de la levée de la suspension.

Cette suspension des délais est importante notamment parce que l’article 23-7 de l’ordonnance du 7 novembre 1958, modifiée par la loi organique du 10 décembre 2009, prévoit que ce délai de trois mois pour statuer sur le renvoi au Conseil Constitutionnel est impératif et son non-respect entraîne la transmission automatique de la QPC au Conseil Constitutionnel 7)Art. 23-7 ordonnance n° 58-1067 : « La décision motivée du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation de saisir le Conseil constitutionnel lui est transmise avec les mémoires ou les conclusions des parties. Le Conseil constitutionnel reçoit une copie de la décision motivée par laquelle le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation décide de ne pas le saisir d’une question prioritaire de constitutionnalité. Si le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation ne s’est pas prononcé dans les délais prévus aux articles 23-4 et 23-5, la question est transmise au Conseil constitutionnel. / La décision du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation est communiquée à la juridiction qui a transmis la question prioritaire de constitutionnalité et notifiée aux parties dans les huit jours de son prononcé »..

 

 

 

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References   [ + ]

1. voir notre article sur le blog.
2. Créé par la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution
3. Art. 23-4 Ordonnance n° 58-1067 : « Dans un délai de trois mois à compter de la réception de la transmission prévue à l’article 23-2 ou au dernier alinéa de l’article 23-1, le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation se prononce sur le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. Il est procédé à ce renvoi dès lors que les conditions prévues aux 1° et 2° de l’article 23-2 sont remplies et que la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux ».
4. Art. 23-5 ordonnance n° 58-1067 : « Le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l’occasion d’une instance devant le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation. Le moyen est présenté, à peine d’irrecevabilité, dans un mémoire distinct et motivé. Il ne peut être relevé d’office. / En tout état de cause, le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation doit, lorsqu’il est saisi de moyens contestant la conformité d’une disposition législative, d’une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d’autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur le renvoi de la question de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. /Le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation dispose d’un délai de trois mois à compter de la présentation du moyen pour rendre sa décision. Le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité dès lors que les conditions prévues aux 1° et 2° de l’article 23-2 sont remplies et que la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux. / Lorsque le Conseil constitutionnel a été saisi, le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation sursoit à statuer jusqu’à ce qu’il se soit prononcé. Il en va autrement quand l’intéressé est privé de liberté à raison de l’instance et que la loi prévoit que la Cour de cassation statue dans un délai déterminé. Si le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation est tenu de se prononcer en urgence, il peut n’être pas sursis à statuer ».
5. Art. 23-10 ordonnance n° 58-1067 : « Le Conseil constitutionnel statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. Les parties sont mises à même de présenter contradictoirement leurs observations. L’audience est publique, sauf dans les cas exceptionnels définis par le règlement intérieur du Conseil constitutionnel ».
6. La loi est entrée en vigueur dès sa publication au JORF n° 0078 du 31 mars 2020.
7. Art. 23-7 ordonnance n° 58-1067 : « La décision motivée du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation de saisir le Conseil constitutionnel lui est transmise avec les mémoires ou les conclusions des parties. Le Conseil constitutionnel reçoit une copie de la décision motivée par laquelle le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation décide de ne pas le saisir d’une question prioritaire de constitutionnalité. Si le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation ne s’est pas prononcé dans les délais prévus aux articles 23-4 et 23-5, la question est transmise au Conseil constitutionnel. / La décision du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation est communiquée à la juridiction qui a transmis la question prioritaire de constitutionnalité et notifiée aux parties dans les huit jours de son prononcé ».

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