L’attestation par le pétitionnaire qu’il est autorisé à exécuter les travaux suffit à lui donner la qualité requise pour déposer une déclaration préalable de travaux sur un immeuble en copropriété.

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

March 2012

Temps de lecture

3 minutes

Un arrêt du Conseil d’Etat du 15 février 2012 publié au Recueil Lebon vient clarifier l’étendue du contrôle de l’administration sur la qualité du demandeur depuis la réforme des autorisations d’urbanisme entrée en vigueur le 1er octobre 2007. 

En effet, depuis cette date, l’article R. 423-1 du code de l’urbanisme prévoit que les demandes de permis de construire, d’aménager ou de démolir et les déclarations préalables peuvent être déposées :

« a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ;

b) Soit, en cas d’indivision, par un ou plusieurs coindivisaires ou leur mandataire ;

c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l’expropriation du bâtiment pour cause d’utilité publique ».

C’est ainsi qu’il n’est désormais plus obligatoire de justifier pour un pétitionnaire de justifier, lorsqu’il n’est pas le propriétaire du terrain, d’un titre l’habilitant à construire (ex : promesse de vente). Ce dernier doit désormais uniquement attester, sous sa seule responsabilité, qu’il est autorisé par le ou les propriétaires à exécuter les travaux.

Ces dispositions ont donné lieu à des interprétations divergentes tant en doctrine qu’en jurisprudence.

Selon certains auteurs, il résulterait de cette règlementation que ni l’administration, ni le juge administratif, n’exerceraient plus aucun contrôle de la qualité du demandeur, le juge judiciaire étant seul compétent pour trancher une contestation sérieuse de cette qualité tandis. Pour d’autres, l’administration conserverait un contrôle sur la qualité du demandeur dès lors que cette qualité et/ou l’attestation produite feraient l’objet d’une contestation sérieuse. Celle-ci pourrait naître notamment du propriétaire lorsque le demandeur est locataire ou des copropriétaires qui n’auraient pas donné leur autorisation aux travaux.

La jurisprudence reflétait cette hésitation. En effet, alors que la cour administrative d’appel de Marseille opérait, encore récemment, un contrôle approfondi de l’existence et de la validité du « titre » en vertu duquel le permis de construire attaqué avait été obtenu (CAA Marseille, 5 mai 2011, Sté des Eaux d’Alet, req. n°09MA01426), la cour administrative d’appel de Lyon jugeait que dès lors que le pétitionnaire avait attesté présenter l’une des qualités visées par l’article R.423-1 du Code de l’urbanisme le moyen tiré de la violation de cet article est, en toute hypothèse, inopérant (CAA Lyon, 31 mai 2011, Geneviève A., req. n°09LY01215).

C’est en ce sens que la Haute Juridiction vient de trancher, dans un arrêt publié au recueil Lebon, en précisant, de surcroît, que la simple circonstance que le pétitionnaire ait attesté être autorisé à réaliser les travaux, alors que ce dernier n’avait semble-t-il pas obtenu d’autorisation de sa copropriété, n’était pas constitutif d’une manœuvre de nature à induire l’administration en erreur, en d’autres termes d’une manœuvre frauduleuse (CE 15 février 2012 Mme Yvette B., req. n° 333631).

En effet, s’agissant d’une déclaration préalable déposée pour des travaux affectant la façade d’un immeuble en copropriété, le Conseil d’Etat a considéré que :

« Considérant que, quand bien même le bien sur lequel portaient les travaux déclarés par M. C aurait fait partie d’une copropriété régie par la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le maire était fondé à estimer que ce dernier avait qualité pour présenter une déclaration préalable de travaux, dès lors qu’il attestait remplir les conditions définies à l’article R. 423-1 pour déposer cette déclaration, sans exiger la production des autorisations auxquelles la loi subordonne le droit, pour chacun des copropriétaires, de réaliser certains travaux et, en particulier, sans vérifier si les travaux faisant l’objet de la déclaration affectaient des parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble et nécessitaient ainsi l’assentiment de l’assemblée générale des copropriétaires ; Considérant, en second lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C, en attestant remplir les conditions définies à l’article R. 423-1 du code de l’urbanisme, ait procédé à une manœuvre de nature à induire l’administration en erreur et que la décision de non-opposition ait ainsi été obtenue par fraude ; que cette décision ayant été prise sous réserve des droits des tiers, elle ne dispense pas M. C d’obtenir une autorisation en application de la loi du 10 juillet 1965 si cette autorisation est requise pour effectuer les travaux mentionnés dans sa déclaration ».

Le Conseil d’Etat confirme ainsi la volonté du législateur de retirer aux services instructeurs, mais également au juge administratif, la tâche délicate de contrôler le respect du droit de propriété des tiers à l’occasion d’une demande de permis de construire ou de déclaration préalable en laissant à ces derniers le soin de saisir le juge judiciaire en cas de difficulté.

On peut d’ailleurs penser que la solution sera la même dans d’autres situations, en particulier, en cas d’absence d’autorisation du propriétaire voisin en cas d’adossement de la construction à un mur mitoyen, le juge administratif jugeant jusque-là qu’il appartenait à l’autorité administrative, saisie d’une demande d’autorisation de construire prévoyant des travaux de la nature de ceux mentionnés à l’article 662 du code civil, d’exiger la production par le pétitionnaire soit d’un document établissant qu’il est le seul propriétaire de ce mur soit du consentement de l’autre copropriétaire » (CE 10 octobre 2007 Ville de Toulouse, req. 248908).

voir la décision CE 15 février 2012 Mme Yvette B., req. n° 333631.

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