L’attribution des marchés publics et la préservation des emplois français

Catégorie

Contrats publics

Date

August 2012

Temps de lecture

2 minutes

Le Stif et la plateforme délocalisée : le Code des marchés publics en question (source : localtis.info du 27/07/2012)

Le STIF, autorité organisatrice des transports en Ile-de-France, vient d’attribuer un marché de traitement des appels téléphoniques à une entreprise disposant d’une plate-forme téléphonique au Maroc – et ce en faisant seulement application des critères de choix de l’offre économiquement la plus avantageuse qu’il avait fixés.

Cette affaire relance le débat sur une refonte des règles de la commande publique qui a été évoquée à plusieurs reprises lors de la campagne présidentielle et depuis l’entrée en fonction du nouveau gouvernement : faut-il aller à l’encontre des principes posés par les textes communautaires, et notamment ceux de la libre circulation des marchandises et de la non-discrimination des opérateurs en fonction de leur nationalité ou de leur lieu d’implantation, pour permettre aux acheteurs publics français de choisir d’attribuer leurs marchés en priorité aux opérateurs dont l’activité s’exerce en France ?

Alors que les pouvoirs publics ne cessent d’enregistrer de nouvelles suppressions d’emplois sur le territoire français, la question est loin de paraître illégitime – et nombreuses sont les voix qui s’élèvent pour appeler de leurs vœux une modification du droit dans l’intérêt national, de Michel Sapin à Frédéric Cuvillier, en passant évidemment par le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, premier intéressé. Mais la réponse à y apporter entraîne une confrontation directe avec les principes européens auxquels la France a choisi d’adhérer.

Ce débat souligne encore une fois toute l’ambigüité de l’achat public. D’une part il est un achat, soit une intervention directe sur le marché : les personnes publiques sont autant de consommatrices susceptibles d’acquérir des biens et des services auprès d’opérateurs économiques, et le droit communautaire s’attache à protéger la libre concurrence qui s’exerce entre ces derniers. D’autre part, il est public : en cela, il constitue un des leviers de l’action de l’Etat, au service de l’intérêt général, et qui sert d’exemple. C’est ce qui amène à imposer aux acheteurs de tenir compte de critères liés aux efforts des entreprises en matière d’insertion professionnelle des publics en difficulté, au développement durable [1] ou à l’économie d’énergie[2] ; c’est encore ce qui justifie l’instauration d’un droit de préférence, à offres égales, au bénéfice de certaines structures coopératives ou artisanales[3].

Toute modification du CMP pour permettre aux acheteurs publics de privilégier l’achat qui préserve l’emploi en France n’est pas inenvisageable, mais tout dépendra du mécanisme retenu et de la rédaction des textes, qui devront s’avérer suffisamment subtils et limités pour ne pas encourir la censure de l’Union Européenne.


[1]                  Article 53 CMP.

[2]                  En leur permettant pour ce motif d’avoir recours à des marchés globaux (notamment pour les contrats de performance énergétique prévus par l’article 73 du CMP).

[3]                  Article 53 CMP : il s’agit des sociétés coopérative ouvrière de production, des groupements de producteurs agricoles, des artisans, des sociétés coopératives d’artisans ou par une société coopérative d’artistes ou par des entreprises adaptées.

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