Les décisions de constat de la péremption d’une autorisation d’urbanisme doivent être motivées et précédées d’une procédure contradictoire lorsque ce constat implique une appréciation des faits en cause

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

July 2025

Temps de lecture

3 minutes

CE, avis, 1er juillet 2025, n° 502802, JO 9 juillet 2025

Dans le cadre d’un avis rendu sur le fondement de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat a eu l’occasion de se prononcer sur la procédure de constat de la péremption d’une autorisation d’urbanisme au regard des critères de l’article R. 424-17 du code de l’urbanisme lequel prévoit que « le permis de construire, d’aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de trois ans à compter de la notification mentionnée à l’article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année ».

Par un jugement n° 2105334 du 25 mars 2025, le tribunal administratif de Grenoble a décidé, avant de statuer sur la requête d’une société civile immobilière (SCI) tendant à l’annulation de la décision par laquelle le maire de la commune des Houches a constaté la péremption du permis de construire qui lui a été accordé, de soumettre à l’examen du Conseil d’Etat la question suivante :

La SCI requérante estime en effet que la décision par laquelle le maire de la commune des Houches a constaté la péremption du permis de construire qui lui avait été délivré, est illégale au motif notamment que cette décision était insuffisamment motivée et non précédée d’une procédure contradictoire.

Si le Conseil d’Etat rappelle que la péremption instituée par l’article R. 424-17 du code de l’urbanisme est acquise par le laps du temps que les dispositions de ce texte prévoient lorsque les travaux autorisés n’ont pas été entrepris ou ont été interrompus, sans que soit nécessaire l’intervention d’une décision de l’autorité qui a délivré 1)CE 16 avril 1975 Ville de Louveciennes, req. n° 94329, Rec. CE 240, il considère cependant que la décision de constater la caducité d’une autorisation d’urbanisme « manifeste l’opposition de l’autorité administrative à la réalisation du projet du pétitionnaire, motif pris de ce qu’elle considère qu’il est déchu du droit de construire attaché à l’autorisation d’urbanisme qui lui a été accordée ».

Dès lors, et en l’absence de dispositions spéciales applicables, celle-ci doit être :

  • motivée en vertu de l’obligation de motivation des décisions administratives individuelles défavorables, qui comprennent les décisions qui « opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance» 2)Article L. 211-2 5° du code des relations entre le public et l’administration, comme le serait une décision de refus fondée sur la péremption de cette autorisation
  • par conséquent, précédée d’une procédure contradictoire préalable 3)article L. 121-1 du même code.

Cependant, la Haute juridiction procède à une distinction suivant que, (1) pour constater la caducité de l’autorisation d’urbanisme, l’autorité administrative est conduite à porter une appréciation sur les faits, notamment sur la nature et l’importance de travaux entrepris, ou que (2) cette décision procède du seul constat de l’expiration d’un délai, l’autorité administrative se trouve en situation de compétence liée.

C’est ainsi que dans son avis du 1er juillet 2025, le Conseil d’Etat conclut que :

  • lorsque, pour constater la caducité de l’autorisation d’urbanisme, l’autorité administrative est conduite à porter une appréciation sur les faits, notamment sur la nature et l’importance de travaux entrepris, les moyens tirés du défaut de motivation de sa décision et de ce qu’elle n’a pas été précédée du recueil des observations du pétitionnaire sont opérants dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir contre la décision. Le juge administratif devra donc s’assurer que la décision de constat de la caducité de l’autorisation d’urbanisme est bien motivée en application du 5° de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration, et, en application de l’ l’article L. 121-1 du même code, précédée d’une procédure contradictoire.
  • en revanche, lorsque cette décision procède du seul constat de l’expiration d’un délai, l’autorité administrative se trouve en situation de compétence liée et les moyens tirés de ce que sa décision serait insuffisamment motivée ou procéderait d’une procédure irrégulière sont, dès lors, inopérants.

Le Conseil d’Etat met ainsi fin aux divergences des juridictions du fond 4)CAA Marseille 2 novembre 2015 SCI Marceau, req. n° 13MA00532 ; TA Versailles 14 novembre 2023 M. C. et Mme D. B., req. n° 2105360 ; TA Marseille 3 juin 2025 SCICV Beauchamps Promotion Immobilière, req. n° 2108499 ; TA Montreuil 6 avril 2023 Société Braxton Promotion 1, req. n° 2204353. sur le régime contentieux des décisions de constat de péremption de permis de construire.

 

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References   [ + ]

1. CE 16 avril 1975 Ville de Louveciennes, req. n° 94329, Rec. CE 240
2. Article L. 211-2 5° du code des relations entre le public et l’administration
3. article L. 121-1 du même code
4. CAA Marseille 2 novembre 2015 SCI Marceau, req. n° 13MA00532 ; TA Versailles 14 novembre 2023 M. C. et Mme D. B., req. n° 2105360 ; TA Marseille 3 juin 2025 SCICV Beauchamps Promotion Immobilière, req. n° 2108499 ; TA Montreuil 6 avril 2023 Société Braxton Promotion 1, req. n° 2204353.

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