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La Direction de l’Habitat, de l’Urbanisme et des Paysages (ci-après « DHUP ») a publié fin juin une foire aux questions (ci-après « FAQ ») ayant pour vocation de répondre de manière « pragmatique » aux nombreuses interrogations soulevées par la loi « Le Meur » adoptée le 19 novembre 2024.
Cette FAQ a été réalisée en concertation avec différents acteurs, notamment des professionnels du droit et des collectivités afin de faciliter l’appropriation des « nouveaux outils » mis à leur disposition depuis novembre dernier.
La FAQ est divisée en cinq thématiques principales :
- les objectifs et le champ géographique ;
- la définition de l’usage ;
- l’usage de droit / l’usage de fait ;
- l’articulation avec les autorisations d’urbanisme ;
- l’application dans le temps.
Elle est composée de 27 questions et est présentée comme un « éclairage opérationnel » par le Directeur de l’Habitat, de l’Urbanisme et des Paysages, Damien Botteghi,
(i) Au titre des objectifs et du champ géographique de la procédure de changement d’usage, la FAQ rappelle les enjeux historiques de la création de cette procédure à la suite de la Seconde guerre mondiale et son objectif pérenne : « dans les communes connaissant des pénuries de logement, un local à usage d’habitation conserve cet usage, sauf autorisation expresse».
Il est rappelé ici que la réglementation relative au changement d’usage peut s’appliquer dans toute commune, sur délibération du conseil municipal ou, le cas échéant, de l’EPCI s’il est compétent en matière de PLU.
Cependant, une telle délibération devra être motivée par un déséquilibre de l’offre et de la demande de logements dans les communes où ne s’applique pas la taxe sur les logements vacants, autrement dit, dans les communes n’étant pas située en « zones tendues ».
(ii) La FAQ précise la définition de l’usage et notamment de l’usage d’habitation tel qu’il en ressort de la loi « Le Meur». En effet l’usage d’habitation s’entend de tout local habité ou ayant vocation à l’être même s’il n’est pas occupé effectivement. A ce titre, il est précisé que :
- Les résidences secondaires relèvent de l’usage d’habitation (sauf à ce que, du fait de locations de courte durée répétée, elles perdent cet usage) ;
- Les meublés de tourisme relèvent de l’usage « autre qu’habitation» sauf lorsque le meublé de tourisme en question est une résidence principale louée moins de quatre mois par année civile.
- La durée maximale de location des résidences principales comme meublés de tourisme (de 90 à 120 jours par année civile) pouvant être fixée par les communes au titre du code de tourisme est indépendante de la réglementation relative à l’usage. Ainsi, le dépassement de cette durée maximale n’entraîne pas nécessairement de sanctions au regard de l’usage.
- L’usage d’habitation ne peut résulter d’une occupation illégale et notamment d’un squat. L’accord du propriétaire est indispensable, les effractions, les menaces ou encore la contrainte font obstacle au changement d’usage du local occupé.
- L’usage d’habitation est déterminé, en cas de doute, par le recours à la technique du « faisceau d’indices». A ce titre, la réponse à la question n° 8 indique qu’« un bureau dans lequel sont aménagées des toilettes et qui comprend un canapé-lit, n’a pas pour autant un usage d’habitation, même si son occupant y dort occasionnellement ».
- La vacance d’un logement, même de longue durée, ne lui fait pas perdre son usage d’habitation. Il en va de même d’un logement qui ne serait pas (ou plus) considéré comme habitable ou décent.
(iii) Sont également distingués et précisés dans le document l’usage de droit et l’usage de fait :
- L’usage de droit est défini comme celui pouvant être démontré par une autorisation administrative (par exemple, un permis de construire ou une autorisation de changement d’usage). L’usage de fait correspond, quant à lui, à l’usage constaté par tout mode de preuve même en l’absence d’autorisation administrative le mentionnant explicitement (par exemple, un bureau qui a été aménagé et/ou est utilisé en tant que logement sans avoir nécessité ou s’être vu délivrer les autorisations d’urbanisme nécessaires).
- L’usage d’habitation peut être un usage de fait ou un usage de droit. Le seul recours à l’usage de droit ne suffit pas en ce que certaines transformations de locaux ne font pas l’objet d’une autorisation administrative. L’usage de droit n’exclut ainsi pas l’usage de fait.
- Un local sera réputé à usage d’habitation, sauf à ce qu’une autorisation de changement d’usage postérieure eut été accordée contre compensation, s’il est affecté à cet usage:
- soit, à une date comprise entre le 1er janvier 1970 et le 31 décembre 1976 ;
- soit, à n’importe quel moment au cours des trente dernières années.
(iv) La DHUP livre son interprétation sur l’articulation de la réglementation sur l’usage avec les autorisations d’urbanisme:
- En principe, une demande d’autorisation d’urbanisme qui entre dans le champ du changement d’usage doit être considéré par l’administration comme valant changement d’usage, et instruite en ce sens.
- Pour autant, il ne faut pas considérer que l’autorisation d’urbanisme délivrée vaut automatiquement autorisation de changement d’usage puisque la loi Le Meur est venue préciser qu’une autorisation d’urbanisme qui non accompagnée d’une autorisation de changement d’usage ne constituera pas un mode de preuve valable. Le principe de l’indépendance des législations est donc ici rappelé par la loi « Le Meur», qui sur, ce point, n’a pas créé une règle nouvelle.
(v) Enfin, la doctrine de l’Etat reprend la position de la Cour de cassation et précise les modalités d’application dans le temps de la loi « Le Meur» :
- En principe, la loi n’est pas rétroactive. Un usage illicite antérieur à son entrée en vigueur devra être prouvé et sera sanctionné selon les critères en vigueur au moment où il a été constaté 1)Conformément à l’avis de la Cour de cassation du 10 avril 2025 (Cass. 10 avril 2025, req. n° 25-70.002). Cependant, le changement d’usage peut être une infraction répétée et, le fait de louer un local dont l’usage d’habitation ne pouvait auparavant pas être démontré « ne confère pas automatiquement le droit de continuer à le faire après l’entrée en vigueur». Chaque utilisation non conforme à l’usage du local (c’est-à-dire, chaque contrat ou chaque bail) constitue une nouvelle infraction.
- En cas d’usage illicite antérieur à la loi « Le Meur» mais dont le constat est postérieur à son entrée en vigueur, en l’absence de position jurisprudentielle, la DHUP considère que la loi « Le Meur » s’applique.
- Au regard des contrats en cours, la validité d’un contrat est appréciée selon l’état du droit au moment de sa signature. Dès lors, les contrats signés avant l’entrée en vigueur de la loi « Le Meur» relèvent du régime antérieur à celle-ci. Leur reconduction, même tacite, relèvera cependant des nouvelles dispositions de l’article 631-7 du CCH.
References
1. | ↑ | Conformément à l’avis de la Cour de cassation du 10 avril 2025 (Cass. 10 avril 2025, req. n° 25-70.002 |