L’indemnisation de la valeur non amortie des biens de retour d’une délégation de service public : rappel d’un droit

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

May 2015

Temps de lecture

3 minutes

CE 4 mai 2015 société Domaine Porte des neiges, req. n° 383208

Dans le cadre d’une zone d’aménagement concerté, la commune de Porta avait conclu une convention avec les sociétés Domaine Porte des neiges, Porte des neiges et Les Résidences Porte des neiges, « une convention, modifiée le 17 décembre 2004, établissant le cadre juridique dans lequel s’inscriraient les conventions particulières relatives à l’aménagement foncier et la réalisation des équipements collectifs, la gestion des équipements publics et de déneigement, la construction et l’exploitation des remontées mécaniques, enfin l’animation et la promotion de la station ».

Par une convention particulière du 12 janvier 2006, la commune avait confié l’aménagement et l’exploitation des remontées mécaniques de la future station à la société Domaine Porte des neiges. En application de cette convention, la société avait alors réalisé un télésiège et les pistes qui en étaient le complément.

La commune de Porta avait, le 20 octobre 2009, demandé à son cocontractant de justifier d’une caution bancaire « d’un montant équivalent au coût des équipements et des frais de fonctionnement de ceux-ci » et avait suspendu l’exécution de la convention. Puis, le 15 janvier 2010, ladite commune mettait en demeure la société de lui communiquer cette caution bancaire dans un délai de deux mois, justification à défaut de laquelle elle considérerait la convention particulière comme « caduque ».

C’est dans ces circonstances que la société Domaine Porte des neiges a saisi le tribunal administratif de Montpellier d’une demande indemnitaire tendant à la réparation du préjudice résultant à la fois de manquements de la commune à ses obligations contractuelles et de la résiliation anticipée de la convention particulière.

Confirmant le tribunal administratif, la cour administrative d’appel de Marseille a, d’une part, considéré que la commune n’avait pas prononcé la résiliation en retenant le seul constat de la « caducité » de la convention de 2006 et, d’autre part, rejeté les conclusions indemnitaires de la société (CAA Marseille 26 mai 2014 société Domaine Porte des neiges, req. n° 12MA02744).

Le Conseil d’Etat va annuler cet arrêt « en tant qu’il a rejeté les conclusions indemnitaires de la société Domaine Porte des neiges au titre des conséquences dommageables de la résiliation anticipée de la convention ».

En effet, la Haute juridiction relève, tout d’abord, que la cour a dénaturé les clauses du contrat en jugeant que la commune « n’avait pas procédé à la résiliation » du contrat, alors que la décision de la commune consistait à « [mettre] fin à l’exécution du contrat pour un motif tiré du non respect de stipulations contractuelles par la société ».

Ensuite, le Conseil d’Etat va censurer la cour pour avoir jugé que « la société n’établissait pas qu’eu égard au caractère structurellement et lourdement déficitaire de l’exploitation de la remontée mécanique en l’absence de réalisation des autres équipements de la station, l’indemnisation de la valeur non amortie des biens qu’elle demandait excèderait la valeur actualisée des pertes d’exploitation qu’elle aurait dû subir de manière prévisible pendant toute la durée de la convention ».

Concrètement et de manière classique, le juge de cassation rappelle qu’en cas de résiliation d’une DSP avant son terme et quel qu’en soit le motif (donc même en cas de faute), le délégataire est en droit d’obtenir, au titre de son indemnisation, la valeur non amortie des biens de retour 1)CE, ass. 22 décembre 2012 commune de Douai, req. n° 342788 – et encore récemment : CE 13 février 2015 communauté d’agglomération d’Epinal, req. n° 373645 : rappelant que l’indemnisation de la valeur non amortie peut même intervenir en début de contrat lorsque la durée de celui-ci est inférieure à la durée normale d’amortissement de l’ouvrage., la circonstance que l’exploitation de la DSP aurait été déficitaire pendant la durée restant à courir étant sans incidence sur ce droit.

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References   [ + ]

1. CE, ass. 22 décembre 2012 commune de Douai, req. n° 342788 – et encore récemment : CE 13 février 2015 communauté d’agglomération d’Epinal, req. n° 373645 : rappelant que l’indemnisation de la valeur non amortie peut même intervenir en début de contrat lorsque la durée de celui-ci est inférieure à la durée normale d’amortissement de l’ouvrage.

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