Marchés publics et offres comportant un « prix approximatif »

Catégorie

Contrats publics

Date

January 2013

Temps de lecture

3 minutes

Rép. min. n° 1625, JO Sénat du 25 octobre 2012, p. 2404.

Le sénateur Jean-Louis Masson a interrogé le ministre de l’économie et des finances afin de savoir si, dans le cas où un pouvoir adjudicateur passe un marché public concernant une prestation dont le contenu est difficile à cerner au préalable[1], il était « possible d’agréer une offre comportant un prix approximatif et ajustable selon les circonstances ».

 La réponse ministérielle se penche, tout d’abord, sur le caractère essentiel du prix dans les marchés publics et, à ce titre, rappelle que :

  •  L’absence dans le contrat de toute indication sur le prix ou sur les conditions de paiement est une cause de nullité du contrat[2];
  • Le prix proposé dans une offre doit pouvoir être clairement déterminé ou déterminable par le pouvoir adjudicateur, de sorte que l’emploi par le candidat du symbole mathématique « approximativement égal à » entraîne l’irrégularité de l’offre[3] ;
  • Le pouvoir adjudicateur qui accepte une offre approximative méconnait le principe d’égalité entre candidats[4].

 En résumé, le ministre souligne que « l’approximation » n’a en principe pas sa place en la matière.

 Faisant preuve de pédagogie, la réponse ministérielle va toutefois rappeler que le CMP offre les moyens de faire face à certaines situations « d’indétermination ».

 La réponse ministérielle indique toutefois que certains marchés peuvent être conclus sur la base d’un « prix provisoire » qui ne deviendra définitif qu’au cours de l’exécution du marché.

 Ils doivent pour cela correspondre à l’une des hypothèses prévues à l’article 19 du code des marchés publics (CMP), lequel prévoit qu’ « il est possible de conclure des marchés à prix provisoires dans les cas exceptionnels suivants :

 1° Lorsque, pour des prestations complexes ou faisant appel à une technique nouvelle et présentant soit un caractère d’urgence impérieuse, soit des aléas techniques importants, l’exécution du marché doit commencer alors que la détermination d’un prix initial définitif n’est pas encore possible ;

2° Lorsque les résultats d’une enquête de coût de revient portant sur des prestations comparables commandées au titulaire d’un marché antérieur ne sont pas encore connus ;

3° Lorsque les prix des dernières tranches d’un marché à tranches, tel que défini à l’article 72, sont fixés au vu des résultats, non encore connus, d’une enquête de coût de revient portant sur les premières tranches, conclues à prix définitifs ;

4° Lorsque les prix définitifs de prestations comparables ayant fait l’objet de marchés antérieurs sont remis en cause par le candidat pressenti ou par le pouvoir adjudicateur, sous réserve que ce dernier ne dispose pas des éléments techniques ou comptables lui permettant de négocier de nouveaux prix définitifs ».

 Comme le souligne le ministre, le recours à un « prix provisoire » en dehors des cas visés constitue une irrégularité[5].

 Enfin, le ministre rappelle qu’il est essentiel de précisément définir ses besoins préalablement à la passation d’un marché afin de permettre aux opérateurs économiques de pouvoir déterminer leur prix (article 5 CMP). Ajoutons qu’il s’agit là même d’une obligation pour les pouvoirs adjudicateurs[6] en vue d’assurer une concurrence pleine et entière.

 Pour autant, la réponse ministérielle met en avant les outils juridiques pouvant être utilisés, dans les cas où une telle définition préalable des besoins s’avérait impossible à réaliser en pratique :

  •  Dialogue compétitif (article 36 CMP) lorsque l’incertitude « porte à la fois sur les objectifs à atteindre et sur les moyens d’y parvenir »[7] ;
  • Accords-cadres[8] (article 76 CMP) ou marché à bons de commande[9] (article 77 CMP).
 

[1]   La question vise notamment les marchés de services juridiques.

[2]  CE 28 mars 1980 Société Cabinet 2000, req. n° 07703.

[3]  CAA de Versailles 15 novembre 2011 Cabinet MPC Avocats, req. n° 08VE02781.

[4]  CE 9 mars 1960 Massida, req. n° 39717.

[5]  CE 8 décembre 1982 Sté Losfeld-Industries c/ ministre de la défense, req. n° 33375.

[6]  Cf. notamment : CE 15 décembre 2008 ville de Dunkerque, req. n°310380.

[7]  C’est moins sur le besoin en tant que tel que la difficulté se cristallise. L’article 36 CMP exige qu’au moins l’une des deux conditions suivantes soit remplie : « le pouvoir adjudicateur n’est objectivement pas en mesure de définir seul et à l’avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins » ou « le pouvoir adjudicateur n’est objectivement pas en mesure d’établir le montage juridique ou financier d’un projet ».

[8]   Contrats conclus entre un pouvoir adjudicateur et des opérateurs économiques « ayant pour objet d’établir les termes régissant les marchés à passer au cours d’une période donnée, notamment en qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées » (article 1er CMP).

[9]   « Marché conclu avec un ou plusieurs opérateurs économiques et exécuté au fur et à mesure de l’émission de bons de commande » (aticle 77 CMP).

 

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