Permis de construire modificatif et participation en vue de la réalisation de parcs publics de stationnement   

Catégorie

Droit administratif général, Urbanisme et aménagement

Date

October 2020

Temps de lecture

6 minutes

CE 7 octobre 2020, req. n° 426477 : mentionné dans les tables du recueil Lebon

La société Berrier-Fontaine 1)Aux droits de laquelle est venue la société Berrier-Carnot. a obtenu le 27 juillet 2009 un permis de construire en vue de réaliser 5 231 m² de SHON de bureaux et 158 places de stationnement.

Par un arrêté du 11 juillet 2011, le maire de la commune de Toulon a délivré au pétitionnaire un permis de construire modificatif réduisant la SHON à 5 191 m² et le nombre de places de stationnement à 100.

Le projet accusant désormais un déficit de 58 places par rapport aux prescriptions du plan d’occupation des sols en vigueur au 11 juillet 2011, le PCM prévoyait une participation pour non-réalisation d’aires de stationnement de 725 824,18 EUR.

Par délibération du 27 juillet 2012, le conseil municipal de Toulon a, ensuite, modifié le plan local d’urbanisme, en réduisant notamment le nombre de places de stationnement exigé.

Le 29 octobre 2013, un nouveau permis de construire modificatif a été délivré à la société Berrier-Carnot autorisant une augmentation de la SHON de 85 m² et la réalisation de 94 places de stationnement.

Se prévalant de ce que le nombre de places de stationnement à réaliser aux termes de ce second permis respectait les nouvelles prescriptions du plan local d’urbanisme, la société a demandé à ne plus être assujettie au paiement de la participation pour non-réalisation d’aires de stationnement calculée sur la base du permis de construire initial, ce qu’a refusé le maire de Toulon le 20 janvier 2014.

Par un jugement 2)N° 1401077. du 8 novembre 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la requête formée par la société à l’encontre de cette décision.

La cour administrative d’appel de Marseille a confirmé ce jugement par un arrêt 3)N° 16MA04896. du 31 octobre 2018. C’est à l’encontre de cet arrêt que cette dernière a formé un pourvoi en cassation.

1             En premier lieu, après avoir considéré que la demande de la société Berrier-Carnot à laquelle le maire a opposé le refus litigieux devait être regardée, non comme une demande contestant le bien-fondé de la participation financière qui lui avait été réclamée sur la base du permis de construire initial délivré le 11 juillet 2011, comme l’avait jugé à tort la cour administrative d’appel de Marseille 4)La cour administrative d’appel de Marseille a opposé à la société l’autorité relative de la chose jugée par son précédent arrêt du 12 mai 2017 rejetant la requête de la société Berrier-Carnot formée contre le jugement du 3 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulon avait rejeté sa demande tendant à l’annulation de la mise en demeure de payer le montant de la participation financière pour la réalisation de parcs publics de stationnement mise à sa charge par le permis de construire délivré le 11 juillet 2011 comme irrecevable, faute pour la société d’avoir présenté au tribunal ses conclusions dans le délai de recours prévu par le 2° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales., mais comme une demande de dégrèvement, conformément aux dispositions de l’article R. 332-22 5)« Le redevable de la participation en obtient, sur sa demande, le dégrèvement ou la restitution : a) En cas de péremption du permis de construire ; b) En cas de retrait ou d’annulation du permis de construire ; c) Si les constructions sont démolies en vertu d’une décision de justice pour violation d’une servitude de droit privé ; d) Si, dans le délai de cinq ans à compter du paiement, la commune ou l’établissement public compétent n’a pas affecté le montant de la participation à la réalisation d’un parc public de stationnement ». du code de l’urbanisme dans sa version alors applicable, de cette participation fondée sur des éléments nouveaux, le Conseil d’Etat substitue au motif 6)Sur la pratique de la substitution de motifs par le juge de cassation : CE 9 janvier 1929, Poiré: publié au Rec. CE – CE sect., 6 avril 2007, Blondeau, req. n° 266913 : publié au Rec. CE. retenu par la cour le motif tiré de ce que « la société ne pouvait utilement, à l’appui de sa demande de dégrèvement fondée sur des éléments nouveaux, soulever des moyens dirigés contre le bien-fondé de la participation mise à sa charge par le permis de construire délivré le 11 juillet 2011 ».

2             En second lieu, après avoir rappelé qu’il résultait des dispositions combinées des articles L. 332-7-1 7)« La participation pour non-réalisation d’aires de stationnement prévue par l’article L. 123-1-12 est fixée par le conseil municipal (…) »., L. 332-6-1 8)Le b) du 2° de l’article L. 332-6-1 du code de l’urbanisme : « La participation destinée à la réalisation de parcs publics de stationnement prévue à l’article L. 332-7-1 »., L. 332-28 9)« Les contributions mentionnées ou prévues au 2° de l’article L. 332-6-1 et à l’article L. 332-9 sont prescrites, selon le cas, par le permis de construire, le permis d’aménager, les prescriptions faites par l’autorité compétente à l’occasion d’une déclaration préalable ou l’acte approuvant un plan de remembrement. Ces actes en constituent le fait générateur (…) ». et L. 123-1-12 10)« Lorsque les conditions de desserte par les transports publics réguliers le permettent, le règlement peut fixer un nombre maximal d’aires de stationnement à réaliser lors de la construction de bâtiments destinés à un usage autre que d’habitation. Lorsque le plan local d’urbanisme impose la réalisation d’aires de stationnement, celles-ci peuvent être réalisées sur le terrain d’assiette ou dans son environnement immédiat. Lorsque le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition à une déclaration préalable ne peut pas satisfaire aux obligations résultant de l’alinéa précédent, il peut être tenu quitte de ces obligations en justifiant, pour les places qu’il ne peut réaliser lui-même, soit de l’obtention d’une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation et situé à proximité de l’opération, soit de l’acquisition ou de la concession de places dans un parc privé de stationnement répondant aux mêmes conditions. En l’absence d’un tel parc, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition à une déclaration préalable peut être tenu de verser à la commune une participation en vue de la réalisation de parcs publics de stationnement dans les conditions définies par l’article L. 332-7-1. Lorsqu’une aire de stationnement a été prise en compte dans le cadre d’une concession à long terme ou d’un parc privé de stationnement, au titre des obligations prévues aux premier et deuxième alinéas ci-dessus, elle ne peut plus être prise en compte, en tout ou en partie, à l’occasion d’une nouvelle autorisation ». du code de l’urbanisme dans leurs rédactions alors applicables, que le fait générateur de la participation en vue de la réalisation de parcs publics de stationnement étant la délivrance du permis de construire et que cette participation devait, en conséquence, être déterminée selon les règles applicables à la date à laquelle ce permis a été accordé, le Conseil d’Etat consacre le principe, qu’il avait déjà dégagé 11)Pour l’application du principe à la participation pour dépassement du plafond légal de densité : CE 4 novembre 1990, Chabert, req. n° 88484 ; Pour l’application du principe à la participation pour dépassement du coefficient d’occupation des sols : CE 21 décembre 2001, SCI Le Complexe, req. n° 211663 : publié au Rec. CE., selon lequel un permis de construire modificatif ne peut constituer le fait générateur d’une nouvelle participation se substituant à la précédente que dans le cas où ce permis doit être regardé comme un nouveau permis de construire se substituant au permis initial, c’est-à-dire « que dans le cas où ce nouveau permis emporte une modification substantielle du projet initial 12)Sur la notion de modification substantielle du projet : CE 1er octobre 2015, Commune de Toulouse, req. n° 374338 : Publié au Rec. CE. ».

Or, comme le souligne le Conseil d’Etat :

« Dans cette hypothèse, le permis modificatif est regardé comme se substituant au permis initial, cette substitution emportant retrait du premier permis au sens du b de l’article R. 332-22 du code de l’urbanisme 13)« Le redevable de la participation en obtient, sur sa demande, le dégrèvement ou la restitution : (…) b) En cas de retrait ou d’annulation du permis de construire ; ». cité au point 3 ci-dessus ».

Ainsi, un pétitionnaire ne peut obtenir le dégrèvement ou la restitution de la participation en cause que si son permis modificatif peut être considéré comme un nouveau permis emportant retrait du permis initial au sens de l’article R. 332-22 précité.

C’est ainsi que le Conseil d’Etat rejette le pourvoi de la société pétitionnaire en considérant qu’« en jugeant que la circonstance que le permis de construire modificatif délivré le 29 octobre 2013 à la société Berrier-Carnot comportait le nombre de places de stationnement exigé par les nouvelles prescriptions du plan local d’urbanisme alors en vigueur n’était pas de nature à lui permettre d’obtenir, sur le fondement de l’article R. 332-22 du code de l’urbanisme, le dégrèvement de la participation mise à sa charge par le permis initial », la cour avait « nécessairement estimé que ce permis modificatif ne se substituait pas au permis initial » et n’emportait donc pas son retrait.

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References   [ + ]

1. Aux droits de laquelle est venue la société Berrier-Carnot.
2. N° 1401077.
3. N° 16MA04896.
4. La cour administrative d’appel de Marseille a opposé à la société l’autorité relative de la chose jugée par son précédent arrêt du 12 mai 2017 rejetant la requête de la société Berrier-Carnot formée contre le jugement du 3 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulon avait rejeté sa demande tendant à l’annulation de la mise en demeure de payer le montant de la participation financière pour la réalisation de parcs publics de stationnement mise à sa charge par le permis de construire délivré le 11 juillet 2011 comme irrecevable, faute pour la société d’avoir présenté au tribunal ses conclusions dans le délai de recours prévu par le 2° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales.
5. « Le redevable de la participation en obtient, sur sa demande, le dégrèvement ou la restitution : a) En cas de péremption du permis de construire ; b) En cas de retrait ou d’annulation du permis de construire ; c) Si les constructions sont démolies en vertu d’une décision de justice pour violation d’une servitude de droit privé ; d) Si, dans le délai de cinq ans à compter du paiement, la commune ou l’établissement public compétent n’a pas affecté le montant de la participation à la réalisation d’un parc public de stationnement ».
6. Sur la pratique de la substitution de motifs par le juge de cassation : CE 9 janvier 1929, Poiré: publié au Rec. CE – CE sect., 6 avril 2007, Blondeau, req. n° 266913 : publié au Rec. CE.
7. « La participation pour non-réalisation d’aires de stationnement prévue par l’article L. 123-1-12 est fixée par le conseil municipal (…) ».
8. Le b) du 2° de l’article L. 332-6-1 du code de l’urbanisme : « La participation destinée à la réalisation de parcs publics de stationnement prévue à l’article L. 332-7-1 ».
9. « Les contributions mentionnées ou prévues au 2° de l’article L. 332-6-1 et à l’article L. 332-9 sont prescrites, selon le cas, par le permis de construire, le permis d’aménager, les prescriptions faites par l’autorité compétente à l’occasion d’une déclaration préalable ou l’acte approuvant un plan de remembrement. Ces actes en constituent le fait générateur (…) ».
10. « Lorsque les conditions de desserte par les transports publics réguliers le permettent, le règlement peut fixer un nombre maximal d’aires de stationnement à réaliser lors de la construction de bâtiments destinés à un usage autre que d’habitation. Lorsque le plan local d’urbanisme impose la réalisation d’aires de stationnement, celles-ci peuvent être réalisées sur le terrain d’assiette ou dans son environnement immédiat. Lorsque le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition à une déclaration préalable ne peut pas satisfaire aux obligations résultant de l’alinéa précédent, il peut être tenu quitte de ces obligations en justifiant, pour les places qu’il ne peut réaliser lui-même, soit de l’obtention d’une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation et situé à proximité de l’opération, soit de l’acquisition ou de la concession de places dans un parc privé de stationnement répondant aux mêmes conditions. En l’absence d’un tel parc, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition à une déclaration préalable peut être tenu de verser à la commune une participation en vue de la réalisation de parcs publics de stationnement dans les conditions définies par l’article L. 332-7-1. Lorsqu’une aire de stationnement a été prise en compte dans le cadre d’une concession à long terme ou d’un parc privé de stationnement, au titre des obligations prévues aux premier et deuxième alinéas ci-dessus, elle ne peut plus être prise en compte, en tout ou en partie, à l’occasion d’une nouvelle autorisation ».
11. Pour l’application du principe à la participation pour dépassement du plafond légal de densité : CE 4 novembre 1990, Chabert, req. n° 88484 ; Pour l’application du principe à la participation pour dépassement du coefficient d’occupation des sols : CE 21 décembre 2001, SCI Le Complexe, req. n° 211663 : publié au Rec. CE.
12. Sur la notion de modification substantielle du projet : CE 1er octobre 2015, Commune de Toulouse, req. n° 374338 : Publié au Rec. CE.
13. « Le redevable de la participation en obtient, sur sa demande, le dégrèvement ou la restitution : (…) b) En cas de retrait ou d’annulation du permis de construire ; ».

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