Précisions du Conseil d’Etat sur le rapport de compatibilité entre l’autorisation d’exploitation commerciale et le SCOT

Catégorie

Aménagement commercial, Urbanisme et aménagement

Date

December 2012

Temps de lecture

4 minutes

CE 12 décembre 2012 Société Davalex, req. n° 353496 : mentionné aux Tables Rec. CE

Dans la lignée de l’arrêt SAS Sodigor du 11 juillet 2012 (req. n° 353880), le Conseil d’Etat a jugé, sur le fondement des anciennes dispositions de l’article L. 122-1 du code de l’urbanisme abrogées par la loi Grenelle II, que :

    « à l’exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci, avec lesquels les autorisations délivrées par les commissions d’aménagement commercial doivent être compatibles en vertu de ce même article, doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs ; qu’en matière d’aménagement commercial, s’il ne leur appartient pas, sous réserve des dispositions applicables aux zones d’aménagement commercial [ZACOM], d’interdire par des dispositions impératives certaines opérations de création ou d’extension relevant des qualifications et procédures prévues au titre V du livre VII du code de commerce, ils peuvent fixer des orientations générales et des objectifs d’implantations préférentielles des activités commerciales, définis en considération des exigences d’aménagement du territoire, de protection de l’environnement ou de qualité de l’urbanisme ; que si de tels objectifs peuvent être pour partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux commissions d’aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d’exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale mais d’apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu’ils définissent ».

En d’autres termes, les SCOT-SRU ne comportant pas de document d’aménagement commercial (DAC) ne peuvent contenir de normes prescriptives en matière d’aménagement commercial.

C’est un rappel de ce que la notion de compatibilité se distingue de la notion de conformité en ce que la seconde implique un rapport de stricte identité, alors que la première se satisfait d’une non-contrariété.

C’est ce que considère de manière constante le juge administratif en jugeant qu’une opération d’aménagement ou le classement d’une zone par un PLU est compatible avec l’orientation fondamentale du schéma dès lors qu’elle n’empêche pas la mise en œuvre de cette orientation (CE 23 octobre 1987 Epoux Fournier, req. n° 62929 : les limites des zones prévues par le schéma et celles prévues par le POS peuvent ne pas coïncider dès lors que « le parti d’urbanisme retenu par le POS ne remet pas en cause les options d’aménagement du secteur et ne compromet ni le maintien d’espaces boisés, ni la protection des sites naturels tels qu’ils sont prévus dans le schéma directeur » – conclusions H. Savoie sous CE 10 juin 1998 SA Leroy-Merlin, req. n° 176920 : BJDU 4/98, p. 247 in Patrick Hocreitère Valérie Guéguen, Le plan local d’urbanisme, Berger Levrault 2ème édition, pages 360-361 – conclusions Bruno Genevois CE Section 17 décembre 1982 sous Chambre d’agriculture de l’Indre, req. n° 38517 : Rec. CE. p. 433)

Dans cette ligne l’arrêt Davalex rappelle qu’un projet faisant l’objet d’une autorisation d’exploitation commerciale doit être compatible avec les objectifs et orientations d’un schéma directeur, aucune de ses dispositions ne pouvant être impérative.

C’est ce principe qu’applique le Conseil d’Etat en considérant que :

    « (…) que si le schéma directeur de l’aire métropolitaine bordelaise valant schéma de cohérence territoriale comporte une disposition qui prévoit « l’arrêt de toute implantation nouvelle de supermarchés de plus de 1 000 m² de surface alimentaire et galeries marchandes créés ex-nihilo » – disposition qui ne saurait être regardée comme impérative – il prévoit également « le développement des commerces de proximité » dans les zones périphériques « pour assurer un équilibre des services commerciaux par secteur » ; que si le projet contesté vise à créer un supermarché d’une surface de 2 000 m² dans la commune de Montussan, la seule circonstance que la surface de vente dépasse le seuil de 1 000 m² mentionné par le schéma directeur n’implique pas qu’il doive être regardé comme incompatible avec ce schéma ; qu’il ressort des pièces du dossier, notamment de l’avis donné par le président du Syndicat du schéma directeur de l’agglomération bordelaise, que cette commune se trouve dans une zone périphérique caractérisée par un déficit de grandes surfaces qui entraîne un report des consommateurs vers des grandes surfaces plus éloignées, de nature à justifier qu’y soit implanté un supermarché d’une surface de 2 000 m² afin d’améliorer l’offre de commerce de proximité et de rééquilibrer ainsi les services commerciaux ; que dès lors, le moyen tiré de ce que le projet contesté serait incompatible avec le schéma directeur valant schéma de cohérence territoriale doit être écarté; ».

Et, si le Conseil d’Etat admet que des objectifs quantitatifs puissent être fixés (reprenant CE 11 juillet 2012 SODIGOR, req. n° 353880), il n’en demeure pas moins que les SCOT-SRU ne sont opposables qu’à travers un rapport de compatibilité.

Aussi a-t-il jugé que, alors même que le schéma directeur de l’aire métropolitaine bordelaise prévoit « l’arrêt de toute implantation nouvelle de supermarchés de plus de 1 000 m² de surface alimentaire et galeries marchandes créés ex-nihilo », ces dispositions ne sont pas impératives de sorte qu’un projet de création d’un supermarché de 2 000 m² n’est pas nécessairement incompatible avec ce schéma.

Au contraire, ce projet a été jugé compatible avec les orientations et objectifs du schéma directeur dès lors qu’il était situé dans une zone périphérique déficitaire en grandes surfaces et qu’il permettait ainsi de limiter l’évasion commerciale, d’améliorer l’offre de proximité et de rééquilibrer ainsi les services commerciaux autres objectifs fixés par le schéma directeur.

Enfin, il y a lieu de noter que le Conseil d’Etat a implicitement admis au contraire que les SCOT-Grenelle pouvaient, à l’intérieur des ZACom définies par le document d’aménagement commercial, prévoir des objectifs quantitatifs visant à interdire de façon prescriptive certaines opérations commerciales. Que reste-t-il alors de la notion de compatibilité ?

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