Précisions sur l’étendue du contrôle des pouvoirs adjudicateurs sur les caractéristiques techniques de l’offre des candidats

Catégorie

Contrats publics

Date

December 2015

Temps de lecture

3 minutes

CE 9 novembre 2015 société Les Autocars Roger Ceccaldi, req. n° 392785

Le département de la Corse-du-Sud a lancé une procédure d’appel d’offres ouvert pour la passation d’un marché portant sur l’exploitation d’un service de transport scolaire divisé en 132 lots.

La société Autocars Roger Ceccaldi, en tant que candidate évincée, avait saisi d’un référé précontractuel le juge des référés du tribunal administratif de Bastia au motif que cette procédure de passation était entachée de divers vices constitutifs d’un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence.

Par une ordonnance du 4 août 2015, le tribunal administratif de Bastia a annulé :

► Pour le n° 127 (Ajaccio-Vico), la décision de la commission d’appel d’offres du 10 juin 2015 déclarant la procédure infructueuse ainsi que la procédure négociée engagée par la suite par le département ;
► Pour le lot n° 132 (Porto-Ota), l’intégralité de la procédure d’appel d’offres.

La société Autocars de l’Ile de Beauté, attributaire des deux lots en cause, avait alors saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation.

Le Conseil d’Etat a notamment apporté d’utiles précisions sur le degré de contrôle auquel étaient tenus les pouvoirs adjudicateurs au regard des capacités techniques des candidats.

1 Pour le lot n° 127, après avoir rappelé l’article 35-I-1 CMP 1) Article 35-1-1° CMP : « Une offre est inacceptable si les conditions qui sont prévues pour son exécution méconnaissent la législation en vigueur, ou si les crédits budgétaires alloués au marché après évaluation du besoin à satisfaire ne permettent pas au pouvoir adjudicateur de la financer »., le Conseil d’Etat juge que le tribunal administratif de Bastia n’a pas commis d’erreur de droit en prenant en compte « pour déterminer si les offres présentaient un caractère inacceptable, les crédits budgétaires alloués au lot n° 127 du marché ».

En l’espèce, le juge du référé précontractuel a jugé que la commission d’appel d’offres avait méconnu ses obligations de publicité et de mise en concurrence en déclarant la procédure infructueuse au motif que les offres – tant celle de la SARL Autocars de l’Ile de Beauté finalement retenue que celle de la société Autocars Roger Ceccaldi écartée– étaient inacceptables ou irrégulières, et ce alors même qu’aucun élément n’établissait le caractère inacceptable de l’offre de la société Autocars Roger Ceccaldi.

Le Conseil d’Etat confirme ainsi ce manquement et précise que ce dernier était bien de nature à léser les intérêts de la société Autocars Roger Ceccaldi puisque, comme l’a retenu le juge du référé précontractuel, « il n’ (était) pas contesté que l’offre initiale de la SARL Autocars de l’Ile de Beauté ne pouvait pas être financée par le pouvoir adjudicateur compte tenu des crédits budgétaires alors alloués au marché ».

2 Sur la vérification des caractéristiques techniques, le Conseil d’Etat juge, concernant le lot n° 132 que :

    « lorsque, pour fixer un critère d’attribution du marché, le pouvoir adjudicateur prévoit que la valeur des offres sera examinée au regard d’une caractéristique technique déterminée, il lui incombe d’exiger la production de justificatifs lui permettant de vérifier l’exactitude des informations données par les candidats ».

Autrement dit, le pouvoir adjudicateur se doit de vérifier les informations délivrées par les candidats, lorsque cette analyse est indispensable au jugement de l’offre, la caractéristique technique étant un sous-critère d’attribution du marché.

En l’espèce, la Haute Juridiction retient « d’une part, que les candidats avaient notamment été invités à préciser si les véhicules seraient stationnés dans un lieu couvert, cet élément constituant un sous-critère du critère de la valeur technique et d’autre part, que le pouvoir adjudicateur n’avait pas demandé aux candidats, que ce soit par le règlement de consultation ou par tout autre document de la consultation, de produire des justificatifs lui permettant de contrôler effectivement l’exactitude des informations fournies en la matière ».

Le Conseil d’Etat confirme le fait que le pouvoir adjudicateur doit alors exiger, dans les documents de la consultation, les justificatifs lui permettant de vérifier les caractéristiques techniques des candidats, notamment, comme c’est le cas en l’espèce, s’agissant d’éléments déterminants pour le jugement d’un sous-critère.

En conséquence, le pourvoi de la société Autocars de l’Ile de Beauté est rejeté, confirmant ainsi l’ordonnance du 4 août 2015 du tribunal administratif de Bastia.

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1. Article 35-1-1° CMP : « Une offre est inacceptable si les conditions qui sont prévues pour son exécution méconnaissent la législation en vigueur, ou si les crédits budgétaires alloués au marché après évaluation du besoin à satisfaire ne permettent pas au pouvoir adjudicateur de la financer ».

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