Quand la cristallisation des dispositions d’urbanisme dans un lotissement soumis à déclaration préalable s’oppose à la possibilité de surseoir à statuer sur une demande de permis de construire

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

February 2022

Temps de lecture

3 minutes

CE 31 janvier 2022 M. Z., req. n° 449496 : mentionné aux Tab. Rec. CE.

Résulte-t-il de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme qu’il ne peut être sursis à statuer, sur le fondement de l’article L. 424-1 du même code, sur une demande de permis de construire présentée dans les cinq ans suivant une décision de non-opposition à la déclaration préalable de lotissement au motif que la réalisation du projet de construction serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan local d’urbanisme ?

C’est cette question que le Conseil d’Etat vient de trancher dans une décision du 31 janvier 2022.

1             Le mécanisme de la cristallisation

L’article L. 442-14 du code de l’urbanisme dispose que le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme nouvelles intervenues depuis la date de la non-opposition à déclaration préalable ou la date du permis d’aménager, et ce pendant cinq ans à compter de la date de la non-opposition à déclaration préalable ou, dans le cas des lotissements autorisés par un permis d’aménager, à compter de l’achèvement des travaux d’aménagement.

Cette cristallisation des règles d’urbanisme assure ainsi au lotisseur et aux acquéreurs des lots une stabilité pour la réalisation des constructions dans ce délai.

Ce délai de cinq années, dont le point de départ diffère selon la nature de l’autorisation nécessaire, assure l’instruction des demandes de permis de construire au regard des règles applicables lors de la non-opposition à déclaration préalable ou de l’achèvement des travaux d’aménagement.

Dans l’affaire commentée, il s’agit d’une non-opposition à déclaration préalable.

Il convient de rappeler que c’est la délivrance de l’autorisation qui doit être effective dans ce délai afin de s’en prévaloir, et non le simple dépôt de la demande durant ce délai qui est insuffisant pour se prévaloir de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme.

Ces dispositions n’interdisent à l’autorité compétente que de refuser ou d’assortir l’autorisation de prescriptions spéciales sur le fondement de nouvelles dispositions entrées en vigueur.

La question se posait donc de savoir si l’autorité pouvait opposer un sursis à statuer sur une demande de permis déposée sur une parcelle issue d’un lotissement ayant fait l’objet d’une non-opposition à déclaration préalable.

Il résulte en effet des dispositions des articles L. 424-1 et L. 153-11 du code de l’urbanisme qu’un sursis à statuer peut être opposé lorsque le projet est de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution d’un futur plan dont l’élaboration ou la révision a été engagée (mais non la modification : CE 28 janvier 2021 Sté Denali consulting et a., req. n° 433619 : mentionné aux Tab. Rec. CE.), et ce, à partir du moment où a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d’aménagement et de développement durable.

2             L’impossibilité d’opposer un sursis à statuer dans ce délai

Dans sa décision du 31 janvier 2022 qui sera mentionnée dans les Tables du Recueil Lebon, le Conseil d’Etat juge qu’un sursis à statuer ne peut être opposé dans une telle situation.

Il rejoint ainsi la position majoritaire des juges du fond (CAA Nantes 30 avril 2014 M. A., req. n° 12NT02773 – cf. égal. les jugements visés par le rapporteur public M. Skzryerbak dans ses conclusions sur la décision commentée).

Les faits d’espèce concernaient la délivrance d’un permis de construire déposé sur une parcelle issue d’une division qui avait fait l’objet d’une décision de non-opposition à déclaration préalable moins d’une année avant la date de signature du permis de construire.

C’est le tribunal administratif de Lyon qui, saisi d’un recours de voisin de ce projet de construction d’une maison d’habitation et d’une piscine, avait estimé que celui-ci était de nature à compromettre et à rendre plus onéreuse l’exécution du plan local d’urbanisme et de l’habitat de la métropole de Lyon qui était alors en cours d’élaboration.

Le Conseil d’Etat annule ce jugement en affirmant que :

« Il résulte de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme que l’autorité compétente ne peut légalement surseoir à statuer, sur le fondement de l’article L. 424-1 du même code, sur une demande de permis de construire présentée dans les cinq ans suivant une décision de non-opposition à la déclaration préalable de lotissement au motif que la réalisation du projet de construction serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan local d’urbanisme » (point n° 4).

 

 

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