Quand le Conseil d’Etat vide de sens le mécanisme de la revoyure en CNAC de l’article L. 752-21 du code de commerce

Catégorie

Aménagement commercial

Date

November 2022

Temps de lecture

3 minutes

CE 7 octobre 2022 Société Entrepôt Nîmes, n° 450615 : Rec. T. CE

Un pétitionnaire dont le projet a été rejeté pour un motif de fond par la CNAC ne peut déposer une nouvelle demande d’autorisation sur un même terrain, à moins d’avoir pris en compte les motivations de la décision ou de l’avis de la commission nationale (article L.752-21 du Code de l’urbanisme).

Tel a été le cas de la société Entrepôt Nîmes qui, à la suite d’un avis défavorable sur son projet relatif à la création d’un magasin de bricolage d’une surface de vente de 5 806 m² et d’un point permanent de retrait par la clientèle d’achats au détail commandés de 352 m² d’emprise au sol ayant reçu un avis défavorable de la CNAC le 28 septembre 2017, a déposé une nouvelle demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale.

Cette deuxième demande concernait le même projet, situé sur le même terrain, cette fois-ci disposant d’une surface de vente de 5 652 m² pour le magasin de bricolage et de 350 m² pour le point permanent de retrait.

Estimant que ce nouveau projet avait régulièrement pris en compte le motif de refus de la CNAC et respectait ainsi les critères de l’article L. 752-6, la CDAC des Bouches-du-Rhône a donné un avis favorable. Saisie d’un recours, la CNAC a également donné un avis positif sur le projet. Un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale a par la suite été délivré par le maire de la commune d’Arles.

A la suite d’un recours contentieux formé par les sociétés Bivaumon et Distrimon contre cet arrêté, la cour administrative d’appel de Marseille a estimé, dans un arrêt en date du 15 février 2021, que les modifications présentées par la société Entrepôt Nîmes ne présentaient pas un caractère suffisant pour être regardées comme ayant pris en compte les motivations de l’avis défavorable de la CNAC en date du 28 septembre 2017.

Le Conseil d’Etat, saisi d’un pourvoi en cassation, a annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille. Il a ainsi précisé l’office des commissions d’aménagement commercial saisie d’une deuxième demande à la suite d’un premier refus au fond en jugeant que :

« il appartient à la commission d’aménagement commercial saisie de ce nouveau projet de vérifier que cette condition préalable est satisfaite et, seulement dans l’hypothèse où elle l’est, de procéder au contrôle qui lui incombe du respect des autres exigences découlant du code de commerce, y compris, s’agissant des exigences de fond, de celles dont il avait été antérieurement estimé qu’elles avaient été méconnues ou dont il n’avait pas été fait mention dans l’avis de la Commission nationale d’aménagement commercial.

Il ressort des termes mêmes de l’arrêt attaqué que, pour déterminer si le projet litigieux avait effectivement pris en compte les motivations de l’avis défavorable de la Commission nationale d’aménagement commercial du 28 septembre 2017, conformément aux dispositions citées au point 3, la cour a estimé que les modifications et mesures complémentaires présentées par le pétitionnaire à l’appui de sa nouvelle demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ne présentaient pas un caractère suffisant pour être regardées comme ayant pris en compte ces motivations, eu égard aux objections initiales de la Commission nationale d’aménagement commercial. En déduisant de cette circonstance que la nouvelle demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ne satisfaisait pas aux exigences de l’article L. 752-21 du code de commerce, au lieu de se borner à rechercher si les ajustements et précisions qui avaient été apportés par la société Entrepôt Nîmes à sa demande étaient en lien avec les motifs ayant fondé l’avis défavorable de la Commission nationale d’aménagement commercial du 28 septembre 2017, ce qui suffisait à la rendre recevable, la cour a entaché son arrêt d’erreur de droit»

La seule circonstance que les modifications apportées au projet initial soient « en lien » avec l’avis défavorable ou le refus de la CNAC, suffit à pouvoir déposer une nouvelle demande sur le fondement de l’article L. 752-21 du code de commerce sans avoir à justifier que le projet a été amélioré et répond ainsi aux objections émises par la CNAC.

Voilà qui facilite le travail des porteurs de projet mais supprime probablement une grande partie de l’effet utile du mécanisme de revoyure…

 

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