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CE 3 juillet 2025 Société Mayotte Route Environnement, req. n° 501774
L’affaire jugée le 3 juillet 2025 donne l’occasion au Conseil d’Etat de confirmer qu’un pouvoir adjudicateur ne peut pas rejeter une offre comme irrégulière au seul motif qu’elle ne contient pas certains renseignements demandés pour l’évaluation des critères de jugement, si ces renseignements ne figurent pas dans la liste des pièces et informations exigées pour que l’offre soit complète.
La direction de l’environnement, de l’aménagement, du logement et de la mer (DEALM) de Mayotte a lancé une procédure pour la passation d’un accord-cadre à bons de commande mono-attributaire relatif à l’entretien préventif du réseau routier national pour la période 2024-2028.
Saisi par la société Colas Mayotte, dont l’offre a été classée seconde, le juge du référé précontractuel du tribunal administratif de Mayotte a annulé la procédure au stade de l’analyse des offres, en estimant que l’offre de l’attributaire, la société Mayotte Route Environnement, aurait dû être écartée comme irrégulière. Cette dernière s’est alors pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat.
Les juges du Palais-Royal rappellent tout d’abord :
- que les offres qui ne comportent pas toutes les pièces ou renseignements requis par les documents de la consultation sont incomplètes et, pour ce motif, doivent être éliminées comme étant irrégulières ;
- que l’acheteur peut demander aux soumissionnaires, en plus des documents requis à peine d’incomplétude de leurs offres, la communication d’éléments d’information utiles pour lui permettre d’apprécier la valeur des offres au regard des critères qu’il a définis 1)CE 20 septembre 2019 Collectivité territoriale de Corse, req. n° 421075 : Rec. Tables..
Cette distinction entre les pièces et informations dont la communication est exigée au titre du contenu de l’offre et celles qui sont demandées par l’acheteur seulement au titre de l’appréciation des offres est importante.
En effet, un élément d’information sollicité au titre de l’appréciation de la valeur de l’offre, mais non requis au titre de sa complétude, peut faire défaut sans que cela n’affecte la régularité de l’offre. Une telle omission n’aura d’incidence que sur sa notation.
En l’espèce, le Conseil d’Etat constate que les méthodes d’intervention sur le chantier « ne figurait que dans la partie ” 4-2. Jugement et classement des offres ” du règlement de la consultation précisant les éléments sur lesquels le pouvoir adjudicateur entendait fonder son appréciation de la valeur technique de l’offre, et non dans sa partie ” 3-1.2.3 – Présentation des offres “, qui énumérait les pièces dont la communication était requise ».
Dès lors, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a commis une erreur de droit en retenant que l’offre de la société attributaire, dont la note technique ne contenait pas de renseignement sur les méthodes d’intervention sur le chantier, était pour ce motif irrégulière et aurait dû être écartée.
Réglant l’affaire au titre de la procédure engagée par la société Colas Mayotte sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat constate une nouvelle fois que le règlement de la consultation n’exigeait pas la fourniture, à peine d’irrégularité, d’informations sur les méthodes d’intervention prévues sur les chantiers, et écarte le moyen tenant à l’irrégularité de l’offre de la société Mayotte Route Environnement.
Les autres moyens étant également écartés, le Conseil d’Etat rejette la demande de la société Colas Mayotte.
Cette décision apporte une précision bienvenue, tant la situation dans laquelle l’acheteur demande aux soumissionnaires la communication d’éléments d’information pour apprécier la valeur des offres en plus des documents requis à peine d’incomplétude de leurs offres se rencontre fréquemment.
References
1. | ↑ | CE 20 septembre 2019 Collectivité territoriale de Corse, req. n° 421075 : Rec. Tables. |