Une parcelle incluse dans un espace remarquable du littoral n’est pas forcément remarquable !

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

April 2021

Temps de lecture

3 minutes

 CE 7 avril 2021 Commune de Sète, req. n° 428233 : mentionné aux tables du recueil Lebon

Dans le cadre d’un contentieux en annulation d’un plan local d’urbanisme (PLU), le Conseil d’Etat apporte des précisions sur les modalités d’appréciation d’un espace remarquable nécessitant sa préservation en vertu de l’ancien article L. 146-6 du code de l’urbanisme (nouvel article L. 121-23 du même code).

Pour mémoire, le code de l’urbanisme prévoit la préservation des espaces ou caractéristiques et des milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques (cf. art. L. 121-23 du code de l’urbanisme).

Les espaces susceptibles d’être qualifiés d’espaces remarquables au regard des dispositions précitées sont énumérés à l’article R. 121-4 du même code.

Dans cette affaire, les requérants demandaient l’annulation de la délibération du conseil municipal approuvant le PLU de la commune de Sète, au double motif qu’il crée un emplacement réservé pour la réalisation d’une voie publique sur des parcelles présentant selon eux le caractère de site ou paysage remarquable au sens des dispositions précitées et en tant qu’il ne classe pas ces parcelles en espaces boisés classés.

Par une première décision du 30 mai 2018, le Conseil d’Etat avait considéré, pour annuler l’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille et renvoyer l’affaire devant la cour, que :

« Pour juger que l’emplacement réservé n° 29 du plan local d’urbanisme devait être regardé comme ayant été créé sur des parcelles présentant le caractère de site ou paysage remarquable à protéger au sens des dispositions du premier alinéa de l’article L. 146-6 du code de l’urbanisme citées au point précédent, la cour s’est bornée à relever que ces parcelles, dont elle constatait qu’elles étaient vierges de toutes construction et boisées d’essences d’arbres ne présentant aucun intérêt particulier, étaient situées en continuité avec le Bois des Pierres Blanches dont le rapport de présentation et le projet d’aménagement et de développement durables du plan local d’urbanisme soulignent l’importance paysagère. La cour, en relevant l’absence d’intérêt propre de ces parcelles, a ainsi nécessairement écarté le caractère remarquable de celles-ci prises isolément. En se fondant par conséquent sur leur seule continuité avec un bois présentant, selon son appréciation, un tel caractère, sans rechercher si elles constituaient avec cet espace une unité paysagère justifiant dans son ensemble cette qualification de site ou paysage remarquable à préserver, la cour a commis une erreur de droit » (CE 30 mai 2018 Commune de Sète, req. n° 408068 : mentionné aux tables du Rec. CE).

Par un arrêt du 20 décembre 2018 (req. n° 18MA02615), la cour administrative d’appel de Marseille a de nouveau annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier ainsi que le PLU approuvé.

Saisi à nouveau du pourvoi, le Conseil d’Etat exerce ainsi un contrôle de la qualification juridique des faits sur le point de savoir si une parcelle forme avec un espace remarquable une unité paysagère, nécessitant leur classement en espace remarquable au titre des dispositions de l’ancien article L. 146-6 du code de l’urbanisme (nouvel article L. 121-23 du code de l’urbanisme).

En l’espèce, les parcelles litigieuses étaient boisées et se trouvaient en continuité sur une longueur d’environ 250 mètres avec le bois des Pierres blanches, classé espace remarquable en raison de son caractère pittoresque.

Le juge de cassation considère toutefois que les parcelles objet du litige ne constituaient pas, par elles-mêmes, un espace remarquable, notamment en ce qu’elles n’étaient « pas visibles du littoral, contrairement à ce bois, et ne sont pas nécessaires à la préservation de l’espace remarquable pittoresque du bois des Pierres blanches, avec lequel, elles ne constituent pas, par suite, une unité paysagère ».

Aussi, la seule continuité des parcelles boisées avec un espace remarquable ne saurait leur conférer, à elle-seule, un tel caractère, dès lors qu’elles ne constituent pas avec cet espace une unité paysagère justifiant dans son ensemble la qualification d’espace remarquable.

Par conséquent, il revient au juge d’apprécier les caractéristiques propres à la zone objet du litige au regard des critères définissant les espaces remarquables (voir également en ce sens :  CE 3 septembre 2009 Commune de Canet-en-Roussillon et Seran, req. n° 306298 : mentionné aux tables du Rec. CE).

Par ailleurs, le Conseil d’Etat rejette également le second moyen des requérants accueilli par la cour administrative d’appel de Marseille relatif à l’absence de classement de ces parcelles en espace boisé classé, dès lors que celles-ci « ne sauraient être regardées comme faisant partie des parcs et ensembles boisés les plus significatifs que l’autorité communale était tenue de classer au titre de l’[ancien] article L. 130-1 du code de l’urbanisme » (cf. nouvel article L. 113-1 du code de l’urbanisme).

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