Les irrégularités affectant les modalités de publication d’un avis d’enquête publique ne vicient la procédure et n’entraînent donc l’annulation de la décision prise à l’issue de celle-ci que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l’information du public ou d’exercer une influence sur les résultats de l’enquête

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

June 2013

Temps de lecture

4 minutes

CE 3 juin 2013 Commune de Noisy-le-Grand, req. n° 345174.

A l’occasion d’une enquête publique relative à la création d’une liaison piétonne et automobile sur le territoire de la commune de Noisy-le-Grand, l’avis d’enquête n’a été publié que dans un seul journal régional ou local alors que l’article R. 11-4 du code de l’expropriation applicable à l’époque imposait que l’avis d’ouverture d’enquête soit publié « dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans tout le département ou tous les départements intéressés ».

C’est ainsi au motif de l’absence de publication dans un second journal régional ou local que la cour administrative d’appel de Versailles a annulé l’arrêté par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a déclaré d’utilité publique l’acquisition des parcelles nécessaires à l’opération :

« (…) qu’il ressort des pièces du dossier que l’avis au public relatif à l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique prononcée par l’arrêté attaqué a seulement été publié dans l’édition datée du samedi 21 mai 2005 du journal les affiches parisiennes et départementales et que cette publication a été renouvelée dans l’édition du 10 juin 2005 du même journal ; que le ministre et la commune soutiennent que la publication de cet avis a également eu lieu par l’intermédiaire du journal municipal Noisy-Mag ; que, toutefois, le journal en question, dont aucun élément du dossier n’indique qu’il aurait une diffusion suffisante au niveau local, ne contient, dans son édition du 4 juin 2005, soit moins de huit jours avant le début de l’enquête, qu’une mention de l’opération en question se résumant à un rappel succinct des enquêtes publiques et parcellaires ; que, dès lors, la référence à cette mention, faite au surplus par une autorité autre que le préfet, ne saurait valablement constituer la seconde publication dans un journal régional ou local exigée par l’article R. 11-4 précitée ; que, par suite, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l’arrêté attaqué du 21 octobre 2005 avait été, pour ce motif, pris sur le fondement d’une procédure irrégulière » (CAA Versailles 14 octobre 2010 Commune de Noisy-le-Grand, req. n° 08VE02574).

Toutefois, le Conseil d’Etat a, par un considérant de principe, retenu que :

« Considérant que s’il appartient à l’autorité administrative de procéder à la publicité de l’ouverture de l’enquête publique dans les conditions fixées par les dispositions précitées, la méconnaissance de ces dispositions n’est de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l’illégalité de la décision prise à l’issue de l’enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l’information de l’ensemble des personnes intéressées par l’opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l’enquête et, par suite, sur la décision de l’autorité administrative » (CE 3 juin 2013 Commune de Noisy-le-Grand, req. n° 345174).

En l’espèce, il en a déduit que :

« (…) la cour administrative d’appel de Versailles a annulé l’arrêté du 21 octobre 2005 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a déclaré d’utilité publique l’acquisition des parcelles nécessaires à la création de la liaison piétonne et automobile projetée au motif de l’absence d’une publication dans un second journal régional ou local répondant aux exigences de l’article R. 11-4 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique sans rechercher, alors qu’une publication résumée de cet avis était intervenue dans un magazine municipal distribué dans l’ensemble de la commune, si ce manquement était, dans les circonstances de l’espèce, de nature à entacher d’irrégularité l’ensemble de la procédure d’enquête publique pour défaut d’information et de consultation du public ; qu’elle a ainsi commis une erreur de droit ; que, par suite, la commune de Noisy-le-Grand est fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué » (CE 3 juin 2013 Commune de Noisy-le-Grand, précité).

Le Conseil d’Etat fait ici une application fidèle de l’arrêt M. D aux enquêtes publiques, généralisant ainsi encore davantage le contrôle casuistique auquel doivent se prêter les juges pour tirer les conséquences d’un vice de procédure, à qui il est demandé désormais, non pas de déterminer objectivement si le vice relevé est substantiel mais d’analyser concrètement les conséquences réelles qu’a pu avoir l’irrégularité constatée.

En effet, par un arrêt d’assemblée en date du 23 décembre 2011, la Haute Juridiction a considéré, de manière générale, que les irrégularités de procédure ne peuvent entacher une décision d’illégalité que si le vice a pu avoir une influence sur le sens de la décision ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie :

« (…) si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie » (CE Ass. 23 décembre 2011 M. D et autres, req. n° 335033).

Ce principe a d’ailleurs déjà été expressément étendu au cas des études d’impact dans un arrêt Société Ocréal en date du 14 octobre 2011 :

« (…) que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d’une étude d’impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d’entraîner l’illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative » (CE 14 octobre 2011 Société Ocréal, req. n° 323257).

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