Soumission des groupements de commandes à l’obligation d’allotissement

Catégorie

Contrats publics

Date

October 2015

Temps de lecture

3 minutes

CE 18 septembre 2015 syndicat intercommunal des eaux du bas Roubion, req. n° 389740

Le syndicat intercommunal des eaux du bas Rhin (SIEBR) et la commune de La Begude de Mazenc ont constitué un groupement de commandes pour la réalisation de travaux d’aménagement sur ladite commune et dont le SIEBR était le coordonnateur.

Par un avis d’appel public à la concurrence publié en décembre 2014, le SIEBR a lancé une procédure de passation d’un marché à procédure adaptée.

Les documents de la consultation prévoyaient trois marchés distincts dont un serait conclu avec le SIEBR et les deux autres avec la commune.

En effet, le SIEBR avait divisé l’opération en trois lots/marchés : un lot « alimentation en eau potable », un lot « poste et conduite de refoulement » et un lot « voirie et réseau divers ».

Toutefois, le règlement de la consultation précisait que les trois marchés devaient être conclus soit avec le même entrepreneur unique ou soit avec le même groupement d’entreprises solidaires.

La société Sorodi, qui avait présenté une offre, a vu cette offre rejetée par le SIEBR par un courrier en date du 12 mars 2015, ce qui l’a conduit saisir le tribunal administratif de Grenoble d’un référé précontractuel 1) Article L. 551-1 CJA..

Ce dernier a annulé la procédure en jugeant qu’« en décidant tout à la fois de passer trois marchés distincts et que les trois marchés seraient conclus avec le même lauréat, le syndicat intercommunal des eaux du bas Roubion, qui s’interdisait ainsi d’examiner les offres lot par lot, a nécessairement commis une erreur de droit » 2) TA Grenoble ord. 9 avril 2015 société Sorodi, req. n° 1501865. et que ce manquement était susceptible d’avoir lésé ou risquait de léser la société requérante.

Saisi d’un pourvoi formé par le SIEBR, le Conseil d’Etat valide la position du tribunal administratif de Grenoble.

1 – Après avoir rappelé le principe de l’allotissement 3) Article 10 CMP. et le régime des groupements de commande 4) Article 8 CMP., le Conseil d’Etat juge que « les dispositions précitées de l’article 10 du code des marchés publics, qui prévoient le principe d’une dévolution des marchés publics par lots et définissent les hypothèses dans lesquelles un marché global peut être conclu, sont applicables lorsqu’un groupement de commandes a été constitué dans les conditions prévues par l’article 8 du code des marchés publics ; que le juge des référés n’a commis aucune erreur de droit sur ce point ; qu’il n’a pas davantage commis d’erreur de droit en annulant la procédure litigieuse, lancée par le SIEBR en tant que coordonnateur du groupement de commandes, au motif que le syndicat ne pouvait légalement prévoir que les trois marchés distincts qui devaient être conclus devaient l’être avec le même attributaire ».

Ainsi, l’article 10 CMP est applicable aux marchés passés dans le cadre d’un groupement de commandes 5) Sur ce point, voir : Lexbase Hebdo édition publique n˚ 389 du 8 octobre 2015, L’obligation d’allotir les marchés publics passés dans le cadre d’un groupement de commande, http://www.adden-leblog.com/?p=7283. .

Sur ce point, le Conseil d’Etat considère que le fait de prévoir trois marchés distincts, d’une part, et de ne pouvoir les attribuer qu’au même attributaire, d’autre part, constitue bien un manquement aux règles de l’allotissement.

Le tribunal administratif de Grenoble avait d’ailleurs relevé dans son ordonnance précitée qu’« en décidant tout à la fois de passer trois marchés distincts et que les trois marchés seraient conclus avec le même lauréat, le syndicat intercommunal des eaux du bas Roubion, qui s’interdisait ainsi d’examiner les offres lot par lot, a nécessairement commis une erreur de droit » et donc méconnaissait le principe de l’allotissement.

La procédure ainsi mise en œuvre par le SIEBR constituait un allotissement fictif, artificiel, puisque in fine le pouvoir adjudicateur n’était pas en mesure d’examiner les offres lot par lot, ayant décidé de les attribuer au même candidat.

2 – Le SIEBR invoquait également des difficultés techniques qui, selon lui, justifiait a posteriori la possibilité de passer un marché global au regard à l’alinéa 2 de l’article 10 CMP.

Le Conseil d’Etat examine en l’espèce si les conditions de l’alinéa 2 de l’article 10 du CMP pour recourir à un marché global sont réunies :

    « le SIEBR ne pouvait utilement soutenir devant le juge des référés que le recours à un marché global était possible dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l’article 10 cité ci-dessus, dès lors, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, qu’il avait lui-même décidé de passer trois marchés distincts ; que, par suite, et en tout état de cause, les moyens tirés de ce que le juge des référés n’aurait pas répondu à l’argumentation du syndicat tirée des difficultés techniques que soulèverait l’allotissement des prestations et aurait commis une erreur de droit en ne recherchant pas si le recours à un marché global était possible, ne peuvent qu’être écartés ».

En l’espèce, le SIEBR avait séparé de lui-même le marché en trois lots/marchés distincts, ce qui montre bien que les conditions de recours au marché global n’étaient pas remplies.

C’est la raison pour laquelle le Conseil d’Etat confirme l’ordonnance du TA précitée et rejette le pourvoi du SIEBR, confirmant ainsi l’annulation de la procédure.

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References   [ + ]

1. Article L. 551-1 CJA.
2. TA Grenoble ord. 9 avril 2015 société Sorodi, req. n° 1501865.
3. Article 10 CMP.
4. Article 8 CMP.
5. Sur ce point, voir : Lexbase Hebdo édition publique n˚ 389 du 8 octobre 2015, L’obligation d’allotir les marchés publics passés dans le cadre d’un groupement de commande, http://www.adden-leblog.com/?p=7283.

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