Les recours des concurrents évincés dirigés contre les contrats signés avant le 4 avril 2014 restent régis par la jurisprudence Tropic

Catégorie

Contrats publics

Date

February 2016

Temps de lecture

3 minutes

CE Sect. 5 février 2016 SMTC Hérault Transport c/ Société « Voyages Guirette », req. n° 383149

A l’occasion d’un recours introduit par un concurrent évincé de l’attribution d’un marché public conclu en 2009, le Conseil d’Etat juge que ce recours reste régi, notamment au regard de sa recevabilité et des moyens susceptibles être invoqués par le requérant, par la jurisprudence Société Tropic travaux signalisation du 16 juillet 2007 1)CE Ass. 16 juillet 2007 Société Tropic travaux signalisation, req. n° 291545 : Rec. CE p. 360, concl. Casas. et ne doit donc pas être jugé au regard des règles définies par la jurisprudence Département de Tarn-et-Garonne du 4 avril 2014 2)CE Ass. 4 avril 2014 Département de Tarn-et-Garonne, req. n° 358994 : Rec. CE p. 70, concl. Dacosta ; BJCP 2014/94, p. 204, concl. Dacosta, obs. Terneyre ; AJDA p. 1035, chron. Bretonneau et Lessi., qui n’est bien applicable qu’aux recours en contestation de validité du contrat introduits à l’encontre de contrats conclus à compter de cette dernière date.

Par voie de conséquence, conformément aux précisions données par l’avis contentieux Société Gouelle 3)CE 11 avril 2012 Société Gouelle, avis n° 355446 : BJCP 2012/84, p. 387, concl. Boulouis, obs. C.M., lorsque le recours en contestation de validité du contrat est régi par la jurisprudence Société Tropic travaux signalisation, tout requérant qui aurait eu intérêt à conclure le contrat administratif contesté peut invoquer tout moyen à l’appui de son recours contre le contrat.

A l’inverse, lorsque le recours est régi par la jurisprudence Département de Tarn-et-Garonne, les moyens invocables par le requérant (autre que le préfet ou le membre de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné) doivent être en rapport direct avec l’intérêt lésé dont il se prévaut ou d’une gravité telle que le juge devrait les relever d’office.

Dès lors, et ainsi que le précise expressément le Conseil d’Etat à l’occasion de la présente affaire, lorsque le tiers agissant dans le cadre de la jurisprudence Département de Tarn-et-Garonne agit en qualité de concurrent évincé de la conclusion d’un contrat administratif, ce tiers ne peut utilement invoquer que, d’une part, les vices d’ordre public et, d’autre part, les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui, au surplus, doivent être en rapport direct avec son éviction :

    « Sur les règles applicables au recours :

    2. Considérant qu’indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles ; que cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu’au représentant de l’Etat dans le département dans l’exercice du contrôle de légalité ; que si le représentant de l’Etat dans le département et les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l’appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l’intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d’une gravité telle que le juge devrait les relever d’office ; que le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d’un contrat administratif ne peut ainsi, à l’appui d’un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d’ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction ;

    3. Considérant toutefois que la décision n°358994 du 4 avril 2014 du Conseil d’Etat, statuant au contentieux a jugé que le recours défini ci-dessus ne trouve à s’appliquer, selon les modalités précitées et quelle que soit la qualité dont se prévaut le tiers, qu’à l’encontre des contrats signés à compter de la lecture de cette même décision ; qu’il en résulte que le recours de la société Voyage Guirette, formé le 7 août 2009 devant le tribunal administratif de Montpellier, doit être apprécié au regard des règles applicables avant ladite décision, qui permettaient à tout requérant qui aurait eu intérêt à conclure un contrat administratif d’invoquer tout moyen à l’appui de son recours contre le contrat ;

    4. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en retenant, pour résilier le marché public contesté, un moyen tiré de l’illégalité de la durée de cet accord-cadre, sans avoir recherché si ce moyen pouvait être utilement invoqué par la société, eu égard à l’intérêt lésé dont elle se prévalait, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ni méconnu l’étendue de son office ».

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References   [ + ]

1. CE Ass. 16 juillet 2007 Société Tropic travaux signalisation, req. n° 291545 : Rec. CE p. 360, concl. Casas.
2. CE Ass. 4 avril 2014 Département de Tarn-et-Garonne, req. n° 358994 : Rec. CE p. 70, concl. Dacosta ; BJCP 2014/94, p. 204, concl. Dacosta, obs. Terneyre ; AJDA p. 1035, chron. Bretonneau et Lessi.
3. CE 11 avril 2012 Société Gouelle, avis n° 355446 : BJCP 2012/84, p. 387, concl. Boulouis, obs. C.M.

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