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CE 26 juillet 2024 M. et Mme A., req. n° 489004 : mentionné aux tables du recueil Lebon
Par une décision du 26 juillet 2024, le Conseil d’Etat vient préciser le régime juridique applicable en matière de péremption des permis de construire délivrés par la collectivité de Saint-Barthélemy, et tout particulièrement aux dispositions prévoyant la suspension du délai de validité desdits permis à compter de l’introduction d’un recours.
En l’espèce, le conseil d’Etat intervenait en tant que juge de cassation en matière de référé suspension d’un permis de construire modificatif et du refus de dresser procès-verbal d’infraction et d’interrompre les travaux d’installation de réseau souterrains.
Les requérants soutenaient que le PCM devait être suspendu au motif que le PC initial délivré le 13 juillet 2017 était devenu caduc.
Rappelons à titre liminaire que la collectivité de Saint-Barthélemy, régie par l’article 74 de la Constitution, est compétente pour adopter sa propre réglementation en matière d’urbanisme 1)LO. 6214-3 du code général des collectivités territoriales , actuellement fixée au sein du code de l’urbanisme, de la construction et de l’habitation de Saint-Barthélemy dit « code de l’UCH » 2)consultable en ligne sur le site de la collectivité de Saint-Barthélemy. Ainsi, toutes les dispositions nationales contenues dans le code de l’urbanisme ne sont pas applicables au territoire de Saint-Barthélemy à l’exception de la réglementation nationale d’urbanisme (RNU) et des règles nationales de procédure administrative contentieuse propres à l’urbanisme 3)CE 8 avril 2015 M. et Mme A, req. n° 368369 : mentionné aux tables du Rec. CE. Toutefois, les principes fondamentaux de la matière se déclinent localement, ce qui est le cas de la péremption des autorisations d’urbanisme, principe selon lequel toute autorisation est accordée pour une durée limitée.
Ainsi, à Saint-Barthélemy, par une délibération rectifiée n° 2019-012 CT du 13 mars 2019, le conseil territorial a adopté la première partie du code de l’UCH, défini les dates et modalités d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions et abrogé le code de l’urbanisme de Saint-Barthélemy à compter du 1er juillet 2019.
A cet égard, il a notamment été prévu que les anciennes dispositions du code demeuraient applicables aux autorisations déposées avant le 1er juillet 2019, à l’exception des articles 133-52 à 133-55 du code de l’UCH applicables, à compter du 1er avril 2019, aux demandes de modification de permis en cours de validité et aux demandes de prorogation du délai de validité d’une autorisation. Parmi ces dispositions, l’article L. 133-54 du code de l’UCH prévoyait la suspension du délai de validité des permis de construire en cours de validité à compter de l’introduction du recours. La décision commentée consacre l’application du principe de suspension du délai de validité de permis de construire à compter de l’introduction du recours (article L. 133-54 du code de l’UCH) aux permis de construire – délivrés par la collectivité de Saint-Barthélemy – en cours de validité au 1er avril 2019 et faisant l’objet à cette date d’un litige en cours.
En effet, le conseil d’Etat a confirmé l’appréciation du juge des référés du tribunal administratif de Saint-Barthélemy, en considérant que « le conseil territorial de Saint-Barthélemy, par sa délibération du 13 mars 2019, a entendu faire bénéficier les permis de construire en cours de validité au 1er avril 2019 qui faisaient, à cette date, l’objet d’un recours pendant devant la juridiction administrative, d’une suspension de leur délai de validité à compter de l’introduction de ce recours » (extrait du considérant n° 4 de la décision).
Au cas présent, d’une part, le permis de construire a été délivré le 13 juillet 2017 et notifié au pétitionnaire le 4 août suivant. Le délai de validité du permis de construire étant de deux ans à compter de sa notification en vertu du droit applicable à la date de délivrance du permis initial (ancien article 82 du code de l’urbanisme de Saint-Barthélemy), le permis de construire initial, susceptible d’être périmé le 4 août 2019, était donc valide à la date du 1er avril 2019.
D’autre part, ce permis a fait l’objet de deux recours contentieux. Le premier recours a été introduit le 5 novembre 2017 et tous deux ont été portés jusqu’à la cour administrative d’appel de Bordeaux, laquelle a donné acte du désistement des requérants par ordonnances des 3 septembre et 16 novembre 2020, dont la seconde est devenue irrévocable au plus tôt le 16 février 2021 en application du délai de « distance » 4)le délai de cassation étant porté à trois mois (R. 821-2 du code de justice administrative. A la date du 1er avril 2019, le permis faisait donc l’objet de deux recours pendants.
Ainsi, faisant application de l’article L. 133-54 du code de l’UCH, le conseil d’Etat a jugé que la durée de validité du permis de construire initial a été suspendue à compter de l’introduction du recours, intervenue le 5 novembre 2017, et a recommencé à courir à compter du 16 février 2021. A l’issue des deux recours contentieux, le permis de construire attaqué bénéficiait donc d’une durée de validité résiduelle d’un an et neuf mois.
Le conseil d’Etat souligne également que le permis a, entre temps, bénéficié de l’application du nouvel article 133-49 du code de l’UCH, dans sa rédaction issue de la délibération du conseil territorial du 24 septembre 2021, portant à quatre ans la validité des permis de construire en cours de validité au 1er novembre 2021 ou délivré postérieurement. En effet, le permis de construire étant valide au 1er novembre 2021 ; sa durée de validité, suspendue lors du recours, a été allongée de deux ans.
Il en résulte qu’à la date de dépôt de la demande du permis de construire modificatif le 13 octobre 2022, le permis de construire initial, dont la date de péremption était désormais portée au 16 novembre 2024, n’était pas caduc. Le moyen n’était donc pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la délibération accordant la modification du permis initial.
Les autres moyens n’ayant pas non plus convaincu le juge de cassation, le pourvoi a été rejeté.
References
1. | ↑ | LO. 6214-3 du code général des collectivités territoriales |
2. | ↑ | consultable en ligne sur le site de la collectivité de Saint-Barthélemy |
3. | ↑ | CE 8 avril 2015 M. et Mme A, req. n° 368369 : mentionné aux tables du Rec. CE |
4. | ↑ | le délai de cassation étant porté à trois mois (R. 821-2 du code de justice administrative |