Stade de France :  zéro faute, pas d’annulation, ça joue !

Catégorie

Contrats publics

Date

May 2025

Temps de lecture

3 minutes

CE 17 avril 2025 Consortium Stade de France, req. n° 501427 : mentionné aux T. du Rec. CE

Par une décision rendue le 17 avril 2025, les 7ème et 2ème chambres réunies du Conseil d’État ont rejeté le pourvoi formé par le Consortium Stade de France contre l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montreuil le 6 février 2025. Ce pourvoi visait à contester la régularité de la procédure d’attribution de la concession du Stade de France au groupement GL Events Venues.

Saisie d’une affaire importante tant sur le plan économique que symbolique, la Haute juridiction apporte des précisions précieuses sur les conditions de recours au référé précontractuel et l’appréciation des moyens dans les procédures de concession, suivant sans réserve les conclusions particulièrement denses et structurées du rapporteur public, M. Nicolas Labrune.

Une dizaine de moyens a été invoquée par la société requérante. Concentrons-nous sur quelques-uns.

Tout d’abord, il était reproché à l’autorité concédante d’avoir indûment pris en compte les références techniques de la société d’exploitation POPB, qui était membre de l’équipe technique du groupement attributaire, mais non membre du groupement en tant que co-traitante. Le Conseil d’Etat confirme l’analyse du juge des référés, en ce que cette société a pris un engagement large de mise à disposition de ses moyens et compte tenu de la nature de la mission susceptible de lui être confiée par le groupement, ses références en matière de construction, de gestion et d’exploitation d’enceintes évènementielles, pouvaient être prises en compte.

D’autres aspects classiquement invoqués dans le cadre de référés-précontractuels ont également été précisés.

  • L’analyse de la capacité financière

Le débat portait sur le chiffre d’affaires propre de GL Events Venues qui était relativement faible par rapport au montant de la concession. C’est finalement celui de ses filiales qui a été pris en compte par l’autorité concédante pour vérifier la solidité économique du groupement. Le Conseil considère, comme le rapporteur public, que les termes du règlement de la consultation permettaient cette lecture. En l’occurrence, les filiales intervenaient dans le même secteur et apportaient des garanties réelles. Le rapporteur public concède ici que l’interprétation du règlement de la consultation n’était pas évidente. Cela ne suffit néanmoins pas à caractériser une erreur manifeste d’appréciation ou une dénaturation par le juge des référés.

  • L’irrégularité de l’offre régularisée

La société requérante soutenait que l’offre retenue était irrégulière et ne pouvait, dès lors, pas faire l’objet d’une régularisation. Elle s’appuyait sur une jurisprudence récente 1)CE 30 décembre 2024 ciné espace évasion, req. n° 491266 du Conseil d’Etat selon laquelle une offre finale irrégulière ne peut plus être régularisée.

Néanmoins, l’offre finale ne désignait pas l’offre définitive. Celle-ci constituait une offre intermédiaire encore susceptible de faire l’objet d’une négociation et donc d’être régularisée. Aucune rupture d’égalité n’était caractérisée, puisque le règlement de consultation permettait clairement cette faculté. De surcroît, la régularisation ne portait pas sur des éléments substantiels au point de constituer une nouvelle offre.

  • Le conflit d’intérêt

Le grief tiré de l’influence supposée des fédérations sportives et notamment de la fédération française de rugby n’a pas convaincu. Les liens allégués entre GL Events et la fédération (collaborations passées, personnes physiques, partenariats) ont été jugés trop indirects ou anciens pour créer une suspicion objective. L’équité de procédure est ici analysée avec réalisme : les relations de chaque candidat relèvent de sa stratégie commerciale et, non d’une partialité imputable à l’acheteur. Ce moyen est inopérant dans la mesure où la fédération française de rugby ne participait pas à la procédure de passation du contrat.

  • La durée

Le consortium critiquait enfin la durée du contrat de 30 ans, qu’il considérait excessive au regard du volume d’investissement imposé. Le Conseil d’Etat rappelle ici sa jurisprudence constante 2)CE 3 octobre 2008 SMIRGEOMES, req. n° 305420 : le juge du référé ne censure un manquement que s’il est de nature à léser ou risque de léser un candidat. Or, tous les candidats disposaient d’une information suffisante sur la nature des investissements attendus, ce moyen n’a donc pas été retenu puisque la requérante n’était pas lésée.

En somme, l’arrêt du 17 avril 2025 se distingue par sa rigueur méthodologique et sa fidélité aux principes fondamentaux du contentieux précontractuel. Il confirme aussi la latitude d’appréciation laissée au juge du référé précontractuel.

 

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