Classer des parcelles en zone N lors de la révision d’un PLU, alors que ce classement avait été précédemment annulé, et sans remettre en cause l’autorité de la chose jugée : mode d’emploi  

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

January 2021

Temps de lecture

2 minutes

CE 18 décembre 2020 M. B.…, req. n° 421988 : mentionné aux tables du recueil Lebon

A l’occasion de la contestation d’un classement en zone N de diverses parcelles dont il est propriétaire par la délibération approuvant le plan local d’urbanisme de l’Ile d’Yeu,  un requérant avait obtenu, par un jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 15 juillet 2004 devenu définitif, l’annulation de ce classement au motif que ces parcelles faisaient en réalité partie d’une zone urbanisée.

Lors de la révision du Plan local d’urbanisme, ces parcelles ont de nouveau été classées en zone N, bien que leurs conditions d’urbanisation n’aient pas changé depuis 2004. Le requérant a dès lors, à nouveau saisi le juge administratif, mais s’est fait débouter en première instance puis en appel.

Le Conseil d’Etat a en effet validé le raisonnement de la cour administrative d’appel de Nantes, qui a considéré que le classement de ces parcelles en zone N était cette fois-ci conforme aux prescriptions du parti d’aménagement de la commune, issu notamment du projet d’aménagement et de développement durable (PADD) du PLU de l’Ile d’Yeu.

Pour rappel, peuvent être classées en zone naturelle et forestière, au sein d’un PLU, les secteurs « de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / b) Soit de l’existence d’une exploitation forestière ; / c) Soit de leur caractère d’espaces naturels (…) “.» (Article R.151-24 du Code de l’urbanisme).

La volonté des auteurs d’un PLU, manifestée dans le parti d’aménagement résultant notamment du PADD, de ne pas ouvrir à l’urbanisation certaines parcelles dont est constatée l’absence d’évolution notable de leur caractère naturel, dans l’objectif de préserver ces milieux, peut justifier à elle-seule leur classement en zone naturelle et forestière.

En effet, le juge administratif tend à faire primer les objectifs définis au PADD en cas de contestation relative au zonage au sein d’un PLU :

  • en cas de contrariété relative au classement d’une parcelle entre le règlement et le PADD d’un PLU (CE 30 mai 2018, n°408068),
  • ou lors de l’analyse de la justification d’un classement en zone N, au regard de la limitation de la consommation des espaces naturels et la préservation des coupures vertes de qualité définie pour certains secteurs dans le PADD (CAA Nantes 29 décembre 2009 Dainvaux, n° 09NT00262).

Ce raisonnement est poussé encore plus loin dans l’arrêt du Conseil d’Etat du 18 décembre 2020.

En effet, bien que les zones dont le classement était contesté n’avaient subi aucune évolution au regard des objectifs de l’article R. 151-24 précité depuis l’annulation du précédent classement en zone N, le Conseil d’Etat juge que « le parti d’aménagement choisi par les auteurs du nouveau plan local d’urbanisme retenait notamment, dans son projet d’aménagement et de développement durables, une limitation des possibilités de construire, afin de respecter des objectifs de préservation des milieux naturels, de limitation du mitage de l’espace et d’utilisation économe des espaces naturels, de nature à justifier que les parcelles litigieuses ne soient pas classées en zone urbaine (…) ».

Par cet arrêt, le Conseil d’Etat ouvre ainsi une possibilité de revenir sur un classement précédemment annulé, sans pour autant méconnaitre l’autorité de la chose jugée attachée à un jugement devenu définitif, en cas d’évolution du parti d’aménagement du PADD au sein d’un PLU justifiant de classer ces secteurs en zone N.

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