Des précisions sur les justifications pouvant être apportées par les communes s’agissant de l’affectation de la participation pour non-réalisation d’aires de stationnement au financement de la réalisation d’un parc public de stationnement

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

March 2020

Temps de lecture

4 minutes

CE 11 mars 2020 Commune d’Arpajon, req. n° 421445 : mentionné dans les tables du recueil Lebon

La SCI Epinvest 1)Aux droits de laquelle est venue la SCI 200 quai de Jemmapes. a obtenu le 30 septembre 2005 un permis de construire en vue d’édifier des logements et un local d’activités sur la commune d’Arpajon.

Dans l’impossibilité technique de réaliser les douze places de stationnement prévus, un permis modificatif a mis à la charge de la société bénéficiaire une participation de 166 860 EUR en application des dispositions de l’article L. 421-3 du code de l’urbanisme alors applicable.

En 2007, la société s’est acquittée de cette participation à hauteur de 110 466,72 EUR s’agissant de la participation correspondant à huit places de stationnement tel que le permis de construire initial le prévoyait.

Par un courrier du 22 juin 2010, la commune a informé la société de l’affectation de la participation acquittée par cette dernière à la réalisation du parc de stationnement public du Jeu de Paume, lui indiquant par ailleurs que la société restait redevable de la participation relative à quatre places de stationnement correspondant à une somme de 56 393,28 EUR à ce titre.

Par un courrier du 21 février 2012, la société a alors contesté l’affectation de la participation qu’elle avait versée à la création d’un parc public de stationnement et en a demandé la restitution à la commune, laquelle a rejeté cette demande.

Par un jugement du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Versailles a ordonné à la commune d’Arpajon la restitution de la somme de 110 466,72 EUR, majorée des intérêts au taux légal.

La cour administrative d’appel de Versailles a confirmé le jugement dans un arrêt du 12 avril 2018 en rejetant l’appel formé par la commune. C’est contre cet arrêt que la commune d’Arpajon a formé un pourvoi en cassation.

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Le Conseil d’Etat rappelle d’abord le régime juridique applicable aux participations pour non-réalisation de stationnement 2)    Pour rappel, la participation pour non-réalisation d’aires de stationnement a été abrogée depuis le 1er janvier 2015..

Aux termes de l’article L. 421-3 du code de l’urbanisme, dans sa version alors applicable :

« Le permis de construire ne peut être accordé que si les constructions projetées sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires concernant l’implantation des constructions, leur destination, leur nature, leur architecture, leurs dimensions, leur assainissement et l’aménagement de leurs abords et si le demandeur s’engage à respecter les règles générales de construction prises en application du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de la construction et de l’habitation.

(…)

Lorsque le pétitionnaire ne peut satisfaire lui-même aux obligations imposées par un document d’urbanisme en matière de réalisation d’aires de stationnement, il peut être tenu quitte de ces obligations en justifiant, pour les places qu’il ne peut réaliser lui-même sur le terrain d’assiette ou dans son environnement immédiat, soit de l’obtention d’une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation, soit de l’acquisition de places dans un parc privé de stationnement existant ou en cours de réalisation.

(…)

A défaut de pouvoir réaliser l’obligation prévue au quatrième alinéa, le pétitionnaire peut être tenu de verser à la commune une participation fixée par le conseil municipal, en vue de la réalisation de parcs publics de stationnement. Le montant de cette participation ne peut excéder 12 195 euros par place de stationnement. Cette valeur, fixée à la date de promulgation de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, est modifiée au 1er novembre de chaque année en fonction de l’indice du coût de la construction publié par l’Institut national de la statistique et des études économiques. / Un décret en Conseil d’Etat détermine les conditions d’application des quatrième et cinquième alinéas du présent article et précise notamment les modalités d’établissement, de liquidation et de recouvrement de la participation prévue au quatrième alinéa, ainsi que les sanctions et garanties y afférentes. (…) ».

L’article R. 332-22 du même code dans sa version applicable au litige précisait pour sa part que le redevable de la participation pouvait en obtenir, sur sa demande, le dégrèvement ou la restitution, dans les hypothèses suivantes :

  • en cas de péremption, de retrait ou d’annulation du permis de construire ;
  • si les constructions étaient démolies en vertu d’une décision de justice pour violation d’une servitude de droit privé ;
  • si, dans le délai de 5 ans à compter du paiement, la commune ou l’établissement public compétent n’avait pas affecté le montant de la participation à la réalisation d’un parc public de stationnement.

C’est de la dernière hypothèse dont se prévalait la SCI bénéficiaire pour demander la restitution des sommes versées.

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Dans sa décision, le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord que :

« La participation pour non-réalisation d’aires de stationnement doit être regardée, non comme une imposition, mais comme une participation que la loi, dans les limites qu’elle définit, autorise la commune à percevoir sur le bénéficiaire du permis de construire à raison des équipements publics dont la réalisation est rendue nécessaire par la construction » 3)CE sect. 26 mars 1999 Vincent, req. n° 189805 – CE 2 mars 2017 Commune de Saint-Pierre, req. n° 391024..

Il précise ensuite que :

« Une telle participation doit être affectée au financement de la réalisation d’un parc public de stationnement dans le délai de cinq ans à compter de son paiement. Cette affectation implique le financement, par la commune, dans le délai imparti, d’un parc public de stationnement pour un montant égal ou supérieur à celui des participations perçues pour non-réalisation d’aires de stationnement. Elle doit être en principe établie par les documents budgétaires de la commune, dans le respect du cadre budgétaire et comptable applicable ; la commune peut cependant en justifier par tout moyen ».

La commune peut ainsi justifier par tout moyen de l’affectation de la participation au financement de la réalisation d’un parc public de stationnement et non seulement au regard des seuls documents budgétaires de la commune.

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En l’espèce, la cour avait estimé que « si la commune justifiait avoir exposé des dépenses pour l’aménagement du parking du Jeu de Paume pour un montant supérieur au montant global de différentes participations pour non-réalisation d’aires de stationnement, elle n’établissait pas que la participation versée par la SCI Epinvest avait été effectivement affectée à cette opération ».

La Haute Juridiction a considéré que, ce faisant, la cour administrative d’appel de Versailles avait commis une erreur de droit, « en excluant ainsi que la commune puisse faire état de tous éléments de nature à établir l’affectation de la participation dès lors qu’elle n’était pas précisément retracée dans les documents budgétaires de la commune ».

En conséquence, le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles et renvoie l’affaire devant cette même cour.

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References   [ + ]

1. Aux droits de laquelle est venue la SCI 200 quai de Jemmapes.
2.     Pour rappel, la participation pour non-réalisation d’aires de stationnement a été abrogée depuis le 1er janvier 2015.
3. CE sect. 26 mars 1999 Vincent, req. n° 189805 – CE 2 mars 2017 Commune de Saint-Pierre, req. n° 391024.

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