Eclaircissements sur les dispositions des articles UG.7.1, UG.7.2 et UG.13 du PLU de Paris

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

April 2023

Temps de lecture

4 minutes

CE 12 avril 2023 Syndicat des copropriétaires des 1-3 square Alice et autres, n° 451794 : mentionné aux tables du recueil Lebon

Dans cette affaire, est attaqué le permis de construire délivré par la maire de la Ville de Paris à la SA HLM « Toit et Joie » pour réaliser un immeuble de 20 logements sociaux sur 1 000 m² de SDP.

C’est l’occasion pour le Conseil d’Etat d’apporter des précisions intéressantes sur l’interprétation de trois dispositions du PLU de Paris.

1.    Atteinte aux conditions d’éclairement d’un immeuble voisin au sens des dispositions de l’article UG 7.1 du PLU de Paris

Le Conseil d’Etat se prononce sur l’application des dispositions de l’article UG 7.1 du règlement du plan local d’urbanisme (PLU) de la Ville de Paris disposant que l’implantation d’une construction en limite séparative peut être refusée si elle a pour effet de porter gravement atteinte aux conditions d’éclairement d’un immeuble voisin.

Comme l’a rappelé le rapporteur public Florian Roussel sur cet arrêt, les dispositions de l’article UG 7.1 répondent à des préoccupations de salubrité et d’habitabilité des constructions, et non à la protection des riverains contre les troubles de voisinage et de jouissance.

Ainsi, la Haute Assemblée rappelle clairement que l’atteinte grave aux conditions d’éclairement au sens de ces dispositions suppose une obstruction significative de la lumière, qui ne saurait se réduire à une simple perte d’ensoleillement 1)En ce sens CE 20 octobre 2017, req. n°399508 ; CE 22 novembre 2019, n°420948..

Lorsqu’une obstruction significative résulte de la perte totale d’éclairement d’une pièce d’au moins un des appartements de l’immeuble voisin, la gravité de l’atteinte doit s’apprécier en prenant en compte les caractéristiques propres de cette pièce.

Ainsi, le rapporteur public a été suivi lorsqu’il conclut « Il nous semble résulter tant de la lettre de l’article UG 7.1 que de ses précédents que la gravité de l’atteinte aux conditions d’éclairement doit s’apprécier au niveau de chacun des appartements. Pas au niveau général de l’immeuble (comme le souligne Nicolas Polge dans ses conclusions sur la décision R…) et pas non plus au niveau de chaque pièce ».

En l’espèce, le tribunal administratif avait relevé, pour juger que la construction projetée ne portait pas gravement atteinte aux conditions d’éclairement des appartements de l’immeuble voisin, que les pièces concernées par une obstruction de la lumière à raison de ce projet n’étaient pas des pièces de vie principales mais des salles de bain seulement éclairées par des jours de souffrance, c’est-à-dire par des ouvertures ne laissant entrer que la lumière. Ainsi, le Conseil d’Etat a considéré que le tribunal ne s’était pas fondé sur la seule circonstance que les salles de bains de chacun des appartements concernés, privées d’éclairement du fait du projet envisagé, avaient le caractère de pièces secondaires, mais avait aussi tenu compte de la destination de ces pièces et de leur rôle dans le niveau d’éclairement d’ensemble des appartements concernés. Par suite, le tribunal administratif n’a pas commis d’erreur de droit.

C’est sur ce point de droit que l’arrêt est fiché au Recueil du Conseil d’Etat.

2.   Précision sur la conclusion d’une convention de cour commune en application de l’article UG 7.2

En application des dispositions du 1° de l’article UG 7.2 du règlement du PLU de la Ville de Paris « Les propriétaires de terrains contigus ont la possibilité de ménager entre leurs bâtiments des cours communes. (…) ».

Le Conseil d’Etat a une interprétation extensive de ces dispositions en ne limitant pas la possibilité d’instituer une convention de cours communes aux terrains comportant des bâtiments de part et d’autre.

Ainsi, il considère que « Eu égard à l’objet de ces dispositions qui est d’aménager les règles d’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, une servitude dite de “cours communes” peut être instituée alors même qu’une des parcelles ne comporterait pas de bâtiments mais des infrastructures ou même ne serait pas encore bâtie ».

Comme le rappelle le rapporteur public Florian Roussel dans ses conclusions sur la décision commentée « la prise en compte des servitudes de cour commune entre des propriétés riveraines pour l’application des documents d’urbanisme est expressément prévue à l’article L. 471-1 du code de l’urbanisme. Les auteurs du PLU ne sauraient donc en restreindre le champ d’application, même si telle était leur intention.»

3.   L’interprétation extensive des dispositions de l’article UG 13.1 du PLU de Paris

Aux termes de l’article UG 13.1.2, les constructions sur un terrain doivent respecter des normes relatives aux espaces libres et de pleine terre. Son 3° permet, à titre dérogatoire, lorsque l’occupation d’un terrain déjà bâti n’est pas conforme à ces normes, de réaliser des travaux qui diminuent la surface au sol des espaces libres sous réserve de ne pas diminuer la surface végétalisée pondérée calculée conformément au PLU et que les espaces libres après travaux fassent l’objet d’un traitement de qualité, à condition que ces travaux conservent la majeure partie du bâti existant sur ce terrain.

La question posée en l’espèce est celle de savoir si les travaux projetés qui impliquent la réalisation d’un immeuble d’une SDP de près de 1 000 m² venant s’ajouter à la surface de trois immeubles existants sur la même unité foncière de plus de 16 000 m², peuvent être regardés comme « conservant la majeure partie du bâti existant ».

Le Conseil d’Etat répond par l’affirmative :

« 6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la construction projetée consiste en un nouvel immeuble d’habitation devant être édifié à côté de ceux existant sur une même unité foncière constituant le terrain d’assiette. Ayant souverainement relevé que les travaux ne diminuent pas la surface végétalisée pondérée totale calculée sur l’ensemble du terrain avant travaux et que les espaces libres après travaux doivent faire l’objet d’un traitement de qualité, c’est sans erreur de droit que le tribunal administratif a jugé que ces travaux, conservant par ailleurs la majeure partie du bâti existant, ne méconnaissent pas les dispositions du 3° de l’article UG. 13.1.2 du règlement du PLU. »

Ainsi, la dérogation s’applique alors même que l’on construit un immeuble distinct sur un terrain d’assiette comprenant d’autres immeubles existants, le projet ayant pour objet « une nouvelle construction sans démolition préalable », et satisfaisant, par ailleurs, aux conditions de non-diminution de la surface végétalisée pondérée et de traitement de qualité des espaces libres.

A la lecture des conclusions du rapporteur public,  cette lecture des dispositions de l’article UG 13.1.2 a été retenue en prenant en compte les éléments d’interprétation figurant dans le rapport de présentation.

 

 

 

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1. En ce sens CE 20 octobre 2017, req. n°399508 ; CE 22 novembre 2019, n°420948.

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